Hououou, mais c’est que ça remonte à plus loin encore, c’t’ histoire !
(bon, d’accord, c’est long, mais c’est bon !)
http://www.pierrederuelle.com/notre-dame-des-landes-un-projet-de-1967-pour-repondre-aux-defis-de-notre-temps/
Notre-Dame-Des-Landes : Un projet de 1967 pour répondre aux défis de notre temps
Bon, c’en est assez. Moi ça me fait peine. Beaucoup trop de contre-vérités sont énoncées quotidiennement sur l’affaire de l’Aéroport Grand-Ouest, outrageusement raccourci en NDDL par les supporters de la bande de squatteurs basanés polygames crypto-anarchistes néo-staliniens qui ne se lavent même pas tous les jours. Il est peut-être temps de prendre UN PEU de hauteur, de dépassionner le débat, et de ramener UN PEU de sérieux sur ce sujet de haute voltige.
Un peu d’histoire(s)
Le site de Notre-Dame-Des-Landes fut choisi en 1967 (selon les normes européennes environnementales et de préservation de la biodiversité qui devaient à l’époque déjà probablement être les mêmes qu’aujourd’hui) par le Service technique des bases aériennes, puis validé en 1970 par le Comité Interministériel d’Aménagement du Territoire pour remplacer le “déjà” actuel aéroport de “Nantes Atlantique” notamment pour y développer le fret, et aussi un peu pour pouvoir accueillir fièrement le tout nouveau Concorde. Mais si, vous savez, cet avion qui a eu un petit souci le 25 juillet 2000, tuant 113 personnes, et qui ressemblait à un burn-out de cigogne sous extasy avec une paire de Ray-Ban.
S’il semble aujourd’hui – mais je m’avance un peu peut-être – que le projet n’accueillera finalement pas le Concorde, dès mai 1967, les autochtones du crû les plus civilisés pouvaient déchiffrer dans la presse locale avec leurs quelques rudiments de langue française que “La métropole Nantes-Saint Nazaire pourrait devenir le Rotterdam aérien de l’Europe par la création d’un aéroport international de fret au nord de la Loire”. Les hommes politiques et leurs experts avaient parlé. Et tout le monde sait ça, ils tiennent toujours leurs promesses.
En 1971, une vague histoire de choc pétrolier mit semble-t-il un peu de sable d’embargo de pays arabes de l’OPEP dans le moteur du projet de nouvel Aéroport à Notre-Dame-Des-Landes. Enfin, comme ces problèmes de pétrole sont définitivement derrière nous, ne vous inquiétez pas, l’histoire peut reprendre son cours.
Après ces quelques années de trafic stagnant, dans les années 80 la CCI qui gérait Nantes Atlantique posa la question totalement saugrenue de construire une nouvelle piste perpendiculaire à l’existante, qui eu permis aux avions de ne plus survoler Nantes. C’était sans compter sur l’avis du Conseil général de l’époque qui considéra qu’importaient peu trajectoires rectilignes, sens des vents dominants, et beaucoup moins de nuisances sonores sur la population : “Faisons au plus simple, de toutes façons, après, il y aura Notre Dame des Landes”.
La solution retenue par les experts fut donc de prolonger la piste existante, très mal orientée selon les pilotes et par voie de conséquence selon les riverains qui ne comprennent décidément rien aux expertises des experts agrées par des hommes politiques experts dans l’art d’agréer les experts des expertises.
Les mêmes experts de prévisions de trafic de l’époque annonçaient donc entre 5 et 9 millions de passagers pour l’an 2000, et comme vous l’avez compris puisqu’ils ne se trompent jamais, l’aéroport de Nantes Atlantique en accueille aujourd’hui 3,2 millions par an.
Heureusement, en 2000, sous le gouvernement Jospin, parce qu’on peut être de gauche et moderne, le projet ressortit enfin des cartons.
Mieux qu’un aéroport de fret, un aéroport international ! Il remplacerait partiellement l’existant restant en fonctionnement pour la société Airbus, qui heureusement pour les riverains ne fait jamais décoller d’avion. Quel rêve merveilleux pour les hommes politiques locaux de s’imaginer accueillir à bras fiscaux ouverts les hommes d’affaires du monde entier apportant la croissance et la mondialisation dans leurs valises en descendant de gros aéronefs sur deux pistes neuves ! Et quel argumentaire économique merveilleux pour un programme de réélection à un mandat local ! Faire décoller et atterrir des avions c’est un peu magique non, vous ne trouvez-pas ?
L’actuel aéroport de Nantes Atlantique
La France compte plus de 156 aéroports, contre 44 en Allemagne et 43 en Grande-Bretagne. S’il faut bien qu’on les batte sur quelque chose, c’est fait.
L’aéroport actuel de Nantes-Atlantique s’étend sur 320 hectares. Sa piste mesure 2.900 mètres par 45 mètres, et a été bétonnée en 1939, parce que l’herbe, c’est quand même plus pratique pour jouer au golf que pour faire atterrir mamie qui rentre des Seychelles. Cette piste permettrait d’absorber 35 avions par heure, même s’il n’y en a que 10 à 12 actuellement, mais c’est un argument de gauchiste en tongs pas rasé.
Le décret n° 2001-705 du 31/07/2001 a inscrit l’aéroport de Nantes Atlantique parmi ceux sur lesquels l’Autorité de Contrôle des Nuisances Sonores Aéroportuaires (ACNUSA) a des compétences élargies (10 aéroports en France). Traduction : il casse les oreilles à 42 000 personnes, mais comme le nouvel aéroport va arriver, on ne va surtout pas construire une nouvelle piste orientée correctement, ni même régler les questions de gestion du trafic aérien.
Forcément, il a toujours un collectif de crypto-anarchistes pilotes de lignes doutant de la pertinence du projet de Notre-Dame-des-Landes pour affirmer que “30 % des avions qui survolent le centre-ville pourraient l’éviter en passant par le sud de l’agglomération”. Comment croire Thierry Masson, cet officier-pilote de ligne de 50 ans basé à Nantes qui a tout du conspirationniste notoire quand il déclare : “Deux tiers du trafic transitent par le sud-est de l’agglomération. J’aimerais bien savoir pourquoi, en arrivant de Limoges, de Poitiers ou de Bordeaux, il faut faire un détour par le nord-est de l’agglomération et survoler le centre de Nantes”
Par sa superficie, Nantes-Atlantique a déjà la dimension d’un aéroport international.
En 2011, pour 60 800 mouvements (les décollages/atterrissages sont un peu les pompes/abdos du contrôleur aérien) l’aéroport à reçu 3,2 millions de passagers.
Sa surface est plus grande que celle de l’aéroport de Londres-Gatwick, qui, par comparaison, assure 280 000 mouvements par an et reçoit 31 millions de passagers, et quasi-égale à celle de l’aéroport de San Diego, en Californie (USA) qui voit passer annuellement 223 000 mouvements et achemine 17 millions de passagers. L’aéroport de Genève, qui ne possède qu’une seule piste, accueille 10 millions de passagers par an, 170 000 mouvements d’avions, et occupe 340 hectares.
En fait, ce qui sature un aéroport ce n’est pas le nombre de passagers mais bien évidemment le nombre de décollages/atterrissages, et sur ce point Nantes Atlantique est passé de 54 858 mouvements en 2007 à 60 800 mouvements en 2011. En suivant cette courbe, Nantes Atlantique devrait atteindre les 200 000 mouvements en 2750 après la troisième apocalypse, quand Nantes sera devenue la capitale du monde.
Du coup, Nantes-Atlantique a reçu le trophée ERA Award 2011-2012 du meilleur aéroport européen, ce qui est donc une excellente raison pour en construire un nouveau.
Cerise on the cup-cake, il y a donc une usine Airbus en bordure de la piste de Nantes-Atlantique qui emploie 2300 salariés à la fabrication notamment des radômes (extrémités avant des avions) et des caissons centraux de voilure de toute la gamme Airbus, pièces qui partent pour assemblage à bord du Beluga, l’avion-cargo d’Airbus. Que se passera-t-il pour Airbus si Nantes-Atlantique ferme ? Airbus ne va quand-même pas délocaliser sa production ? La piste sera donc privatisée pour son bénéfice ? A moins – idée lumineuse – qu’on refile l’un des aéroports européens les mieux notés aux bons soins de Vinci, qui saura bien en faire quelqu’usage rentable : les bâtiments de l’aéroport seront peut-être transformés en skate-park, en agence Pôle-Emploi, ou en crèche pour les futurs pilotes de ligne.
“Un aéroport qui réponde aux défis de notre temps” [Jean-Marc Ayrault]
Suite à une enquête publique conclue fin 2006, la Commission d’enquête remit en avril 2007 un rapport au préfet de la région Pays de la Loire.
C’est monsieur Bernard Boucault qui était le préfet en poste à l’époque à la préfecture de la région Pays de la Loire. Il avait à peine eu le temps de lire le rapport et de reconnaître le projet d’utilité publique qu’il fut nommé en juin 2007 directeur de l’ENA, jusqu’à 30 mai 2012 où il fut nommé au poste de préfet de police de Paris. Comme quoi même faire les grandes écoles n’empêche pas de finir au poste.
C’est monsieur Bernard Hagelsteen qui lui succèda le 20 juin 2007 au poste de préfet de la région Pays de la Loire et préfet de la Loire-Atlantique. Une carrière à talonnettes que celle de monsieur Bernard Hagelsteen : en 1984 il devint secrétaire général de la préfecture des Hauts-de-Seine, puis obtint entre 1989 et 1992 le poste de directeur de la police générale à la préfecture de police de Paris, et plus récemment celui de secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance. Proche collaborateur du ministre de l’Intérieur de l’époque, un certain Nicolas Sarkozy, Bernard Hagelsteen avait eu pour tâche de préparer et de défendre la loi sur la prévention de la délinquance, promulguée en mars 2007.
Un mois après l’élection de Nicolas Sarkozy, il était donc nommé au poste de préfet de la région Pays de la Loire et préfet de la Loire-Atlantique, et héritait donc du dossier du décret d’utilité publique de l’aéroport.
Ce fameux décret d’utilité publique est finalement publié le 10 février 2008, suite à une enquête publique dans laquelle 80 % des contributions faites aux sept enquêteurs étaient opposées au projet. Mais comme on arrête pas le progrès, l’enquête s’est quand même avérée positive pour déclarer une DUP même si sur les sept enquêteurs qui ont fait le travail, deux ont abandonné leur position avant la fin de la commission d’enquête.
Et puisque la mode était à un truc médiatique appelé Grenelle de l’environnement, le décret comportait la réserve que cet aéroport soit de haute qualité environnementale(norme HQE).
Contesté par la suite devant le Conseil d’Etat, ce décret sera confirmé en 2009 et en 2010.
L’esprit mal tourné pourra s’indigner de ce que la présidente de la section des travaux publics au Conseil d’Etat fut Madame Marie Dominique Monfraix, épouse du préfet Bernard Hagelsteen en charge du décret en question, alors qu’il s’agit bien évidemment du fruit du hasard. Un hasard qui valait bien que Madame Monfraix-Hagelsteen fut élevée au grade de Commandeur de la Légion d’honneur le 13 Juillet 2009, ce qui n’a strictement rien à voir, nous ne salirons pas ici la mémoire une femme irréprochable, décédée depuis.
Le hasard total également si son époux désormais veuf monsieur Bernard Hagelsteen a pris sa retraite le 1er décembre 2011 pour devenir non pas conseiller à la Cour des comptes comme il l’avait annoncé initialement, mais conseiller auprès du DG de Vinci Autoroutes, puis responsable des péages pour ASF, filiale de Vinci. Vinci en charge du projet du nouvel aéroport. Tout ne peut pas être dramatique, le hasard fait parfois bien les choses, n’en déplaise à la loi dite de pantouflage concernant les représentants de l’état.
Les scénarios d’optimisation de l’aéroport existant de Nantes-Atlantique n’ont pas été posés, les solutions alternatives n’ont pas été étudiées : aucun intérêt, puisqu’on fait l’aéroport Grand-Ouest de NDDL. Quand au Grenelle de l’environnement, qui préconisait l’étude de solutions alternatives pour les projets à fort impact environnemental, c’est de toute façon aujourd’hui un truc complètement dépassé, d’ailleurs on en parle même plus à la télévision. J’en ai discuté avec un lobbyste du bétonnage pas cher, on vous jure mordicus que la norme HQE ça sert à rien.
Alors certains viendront braire que la vraie motivation pour ce projet en 2000 a été de faciliter une opération de rénovation urbaine importante dont une partie se situait dans le périmètre des nuisances sonores de l’actuel aéroport. Et vont s’imaginer que pour ne pas s’embarrasser de contraintes d’insonorisation trop fortes, on préfère se débarrasser de l’aéroport et en construire un nouveau.
Et pourquoi pas aussi fantasmer sur les soit-disant appétits économiques des soit-disant lobbies du BTP, tout ça parce que les Président et Directeur général de VINCI ont pu faire ensemble quelques voyages au Cambodge avec monsieur Thierry Mariani.
Écoutez plutôt Jean-Marc Ayrault, un homme qui a eu une vision prophétique de la magnificence de Nantes et lui souhaite “un aéroport qui réponde aux défis de notre temps”. Mais si, vous savez, Jean-Marc Ayrault, l’homme qui a réussi à rendre François Fillon charismatique : ancien maire PS de Nantes depuis 1989, ancien député, ancien président du groupe socialiste, il est aujourd’hui conseiller municipal de Nantes, conseiller communautaire de Nantes Métropole (qui participe au financement du projet) , et accessoirement semble-t-il 1er ministre.
Nantes-sur-Ayrault la sublime, nouvelle capitale française : Pensez-donc, avec 1 650 hectares cet aéroport de Notre Dame des Landes (toutes infrastructures comprises) sera donc plus grand que la surface aéroportuaire de Roissy Charles de Gaulle qui accueille sur 1 400 hectares 540 000 mouvements d’avions et 55 millions de passagers par an (pour une surface totale de 3.257 hectares). Si avec ça Nantes-sur-Ayrault ne devient pas Nantes-sur-Ayrault-la-magnifique …
(suite ci-dessous)
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