Adieu Démocratie, bonjour Gouvernement des Juges
Le 21 mars 2013, l'assemblée générale du Conseil d'Etat validait l'avis de sa section des Finances en stipulant que, tous prélèvements confondus, le taux marginal d'imposition ne pouvait dépasser les deux tiers des revenus : une décision absolument anti-démocratique.
En effet, le vote du budget par le peuple ( ou du moins par ses représentants ) est un des points fondamentaux de la démocratie.
Rappelons tout d'abord que la Révolution de 1789 eut pour déclencheur la question fiscale : le désaccord initial entre le roi et les Etats Généraux étaient que ces derniers ( pour le moins dans leur majorité ) réclamait le vote de l'impôt par les représentants du peuple, là où Louis XVI voyait l'impôt comme une prérogative royale. La souveraineté budgétaire au peuple naît donc avec la fin de l'Ancien Régime.
Le vote du budget, c'est déterminer à hauteur de quelle somme chacun doit contribuer à la polique de la Nation ( l'impôt ) et comment cet argent public sera utilisé ( les dépenses publiques ). A ce titre, la souveraineté budgétaire ne peut être enlevée au peuple, du fait qu'elle le concerne directement mais surtout qu'elle conditionne toute les autres formes de souveraineté : comment exercer par exemple la souveraineté en matière de défense nationale sans armée, et donc sans budget de la Défense ?
La souveraineté budgétaire ne peut donc pas être enlevé au peuple, ou du moins à ses représentants ( n'en déplaise à certains européistes... ).
Or, que fait le Conseil d'Etat en limitant aux deux tiers des revenus le taux marginal d'imposition ? Il fixe une règle fiscale.
Le Conseil d'Etat est-il un représentant du peuple, un dépositaire de la souveraineté populaire ? Non.
Est-il donc légitime pour prendre cette décision ? Non.
Cette décision donc absolument illégitime.
L'illégitimité constatée, passons maintenant à la question de la légalité.
Le Conseil était-il en droit ( du point de vue de la légalité donc ) de rendre cette décision, d'édicter cette règle ?
Le Conseil d'Etat est constitué de magistrats. Quel est le rôle du magistrat ? Appliquer le droit pour régler les litiges. En aucune manière dire le droit.
Ainsi, non seulement le Conseil d'Etat est illégitime, mais il outrepasse ses compétences légales.
Qui pourrait le rappeler à l'ordre ? Le Conseil Constitutionnel : mais ce dernier avait déjà signifié dans une décision de décembre dernier que le taux marginal d'imposition ne pouvait dépasser 68%, se plaçant lui aussi dans l'illégitimité et l'illégalité. Problème : aucune juridiction ne peut juger le Conseil Constitutionnel.
Nous nous trouvons ainsi dans une situation où deux des trois entités juridiques suprêmes en France ( la troisième est la Cour de Cassation ) ont clairement outrepassé leurs attibutions en disant le droit, au lieu de l'appliquer. La réaction du pouvoir politique ? Il accepte la décision.
Conclusion : des juges non élus ont créé, de manière illégitime et illégale, une norme juridique et l'ont imposée à un gouvernement qui repose lui sur une légitimité démocratique.
Cette décision est donc inacceptable : de plus, elle contredit absolument le principe de la République Française que proclame l'article 2 de la Constitution de 1958 : « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. » en obéissant davantage au principe de « gouvernement des juges », qui est tout sauf démocratique.
Aussi, au-delà de savoir si oui ou non un taux d'imposition supérieur aux deux tiers est confiscatoire, il est crucial de réaffirmer la souveraineté du peuple et de rappeler aux magistrats quel est leur métier : appliquer la loi, et non la faire.
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