Coup de grâce pour notre libre arbitre : l’interprétation de Copenhague est une conséquence du déterminisme
Si vous avez lu mon article publié récemment sur Agoravox, intitulé "une méthode mathématique pour démontrer que nous n'avons pas de libre arbitre", et plus particulièrement le texte cité en référence que je compte soumettre à une revue scientifique, vous avez peut-être vu qu'il renferme une conclusion implicite surprenante mais bien réelle : l'interprétation de Copenhague de la mécanique quantique peut être en fait considérée comme une conséquence du déterminisme.
J'ai moi-même découvert cette conclusion implicite fortuitement. Elle m'a sauté à la figure alors que je relisais tranquillement mon texte pour faire quelques ajustements avant traduction en anglais en vue d'une soumission à une revue scientifique. Du coup, j'ai modifié mon texte pour mettre cette conclusion en lumière.
Or, que peut-il rester de notre libre arbitre si même la mécanique quantique peut être vue comme une conséquence du déterminisme ?
L'interprétation de Copenhague
L'interprétation de Copenhague de la mécanique quantique est celle qui a émergé des discussions ayant eu lieu entre Bohr, Heisenberg, Born, Einstein, Dirac, etc., physiciens fondateurs de la mécanique quantique, spécialement à une conférence qui s'est tenue en 1927 à Copenhague. Bien sûr, cette interprétation, cohérente avec le caractère essentiellement probabiliste de la mécanique quantique, a été depuis amplement discutée, amendée, confirmée et adoptée par la grande majorité des physiciens. Elle dit a peu près ceci, ce qu'on peut trouver sur Wikipédia ou d'autres textes sur le sujets :
- la réalité physique n'existe pas indépendamment de l'observateur. C'est l'observateur qui "crée" le résultat des mesures
- la valeur des grandeurs physiques ne pré-existent donc pas à la mesure
- essayer de comprendre les mécanismes quantiques de ce qui se passe au niveau microscopique n'a aucun sens, et il faut se borner à appliquer les règles de calcul de la mécanique quantique pour produire les bonnes prédictions.
Or, si l'on suppose que nous sommes dans un monde déterministe, où la réalité est régie par une équation de champ non-linéaire, il est clair que tout y est déterminé, tous les phénomènes physiques, mais aussi toutes les expériences réalisées par les physiciens, la manière dont ils les imaginent et les réalisent. Dans ce monde, l'expérimentateur n'a pas le choix des paramètres qu'il utilise pour réaliser ses expériences. Ils s'imposent à lui "à l'insu de son plein gré". Aussi, peut-on dire que l'observateur n'est pas indépendant de la réalité qu'il observe. Ce qui est précisément équivalent à la première affiirmation ci dessus.
De la même manière, dans un monde déterministe, on peut dire que les paramètres de mesure ne pré-existent pas à la mesure, comme d'ailleurs aussi les grandeurs physiques, En effet ils apparaissent en même temps au moment de la mesure puisqu'ils ne sont pas indépendants les uns des autres.
Enfin, vers la fin de mon article, après diverses démonstrations, illustrations, et argumentations, je conclus que la mécanique quantique n'as pas de sens physique. En effet, il s'agit "simplement" d'une méthode mathématique permettant de définir et de calculer ce qui est calculable dans un monde qui ne l'est pas. Car un monde régi par une équation non-linéaire possède par essence des comportements de chaos déterministe. Or cette conclusion constitue, dite autrement, la troisième affirmation ci-dessus. En effet, si la mécanique quantique n'est qu'une méthode de calcul, il n'y pas de sens à chercher à la comprendre. Il faut simplement l'appliquer. Car, on ne cherche pas à interpréter la manière dont on fait des additions ou des soustractions lorsqu'on vérifie sa facture d'électricité !!
En conséquence, l'interprétation de Copenhague, qui paraît extraordinaire au premier abord, et qui donne un aspect magique à la mécanique quantique, est en fait naturelle dans un monde déterministe.
Or ; la mécanique quantique, par son comportement essentiellement probabiliste, reste le dernier rempart contre le déterminisme. Si elle peut être comprise grâce au déterminisme, que reste-il de notre libre arbitre ?
Mais, vous n'êtes pas obligés de me croire.
En effet, vous pouvez toucher du doigt cette découverte vous-mêmes. Vous pouvez la voir directement avec vos yeux, plutôt qu'à travers les miens. Car mon argumentation et mes démonstrations sont relativement simples à comprendre, par rapport à d'autres travaux sur le sujet. En fait, la démonstration du théorème de Bell, qui est à la base de tous les travaux des physiciens sur le réalisme physique et sa relation avec la mécanique quantique, est d'une simplicité déconcertante. On pourrait la donner en exercice à une interrogatation orale (une "colle", pour les initiés) d'un élève de classe préparatoire à l'entrée des grandes écoles. Aussi ses contre-arguments, ses contre-démonstrations ne sont pas d'un niveau plus élevé. Ainsi mon texte est lisible, compréhensible, donc vérifiable par toute personne ayant fait quelques études supérieures, c'est à dire possédant une licence en mathématiques ou en physique. Bien sûr, si vous faites partie de cette catégorie de personne, il faudra quand-même vous poser au calme et vous concentrer deux heures sur le sujet, car cela ne vous viendra pas tout seul par enchantement non plus.
Mais si vous n'en faites pas partie, vous avez certainement parmi vos ami(e)s, ou vos ami(e)s d'ami(e)s, une personne "fortiche en math", à qui vous pouvez demander de vous expliquer. En cas de doute sur un point particulier, vous pouvez lui dire de m'en faire part dans un commentaire, je lui répondrai.
Au chevet de notre libre arbitre
Depuis les succès des mathématiques et des sciences physiques du 19ième siècle, le libre arbitre des êtres humains était mis à mal, tant le monde semblait régi par des équations mécaniques implacables. Et il faut bien dire que l'avènement de la mécanique quantique lui a donné un répit. En effet, par son caractère essentiellement (et apparamment ?) probabiliste, elle a convaincu les physiciens, et par extension les êtres humains, qu'ils étaient capables de faire des choix librement, c'est-à-dire arbitraires, sans transgresser les lois de la nature.
Cependant, cette nouvelle découverte (que l'interprétation de Copenhague est une conséquence du déterminisme), s'ajoutant aux précédentes, je serais maintenant sidéré que notre libre arbitre survive bien longtemps. Alors, bien sûr, la démonstration mathématique que nous n'avons pas de libre arbitre que j'évoque dans mon article n'a pas encore été faite, ce qui laisse un sursis, mais je suis persuadé qu'il suffirait que des mathématiciens s'y attèlent pour que le problème soit résolu. C'est d'ailleurs l'objet de mon article que de montrer que cette démonstration est effectivement possible, même si je ne sais pas la faire entièrement moi-même, et aussi de motiver des mathématiciens à s'y intéresser.
D'ailleurs, un livre publié récemment vient encore renforcer ma conviction.
Il s'agit du livre écrit par Gerard t'Hooft en 2016 intitulé : "l'interprétation de la mécanique quantique par des automates cellulaires".
Gerard t'Hooft a reçu le prix Nobel en 1999 pour « pour l'élucidation de la structure quantique des interactions électrofaibles en physique ». C'est dire s'il connaît bien la mécanique quantique, car a basé sa carrière sur elle !! Pourtant, comme le titre de son livre le laisse transparaître, il pense que la mécanique quantique est déterministe. Il l'argumente sur 250 pages, Bien sûr, il n'apporte pas de réponse claire et définitive, et son texte reste assez difficile d'accès. Je ne connaissais pas ce livre avant d'écrire mon propre article, et je pense d'ailleurs que cela ne m'aurait pas beaucoup aidé. En effet, son idée d'automates cellulaires, bien qu'elle soit totalement cohérente avec le déterminisme, ne me convainc pas vraiment, Il n'en demeure pas moins qu'un certain nombre de nos arguments sont proches voire identifques pour certains, et que son objectif est clairement de motiver des physiciens et des mathématiciens à le suivre pour montrer que la mécanique quantique peut être expliquée par une théorie déterministe. Il ne va pas jusqu'à proposer, comme je le fais, une démarche mathématique pour démontrer qu'on peut déduire le formalisme quantique d'une théorie classique déterministe. Ce qui me permet de penser que mon article garde une certaine originalité (soupir...).
Alors, que peut-il rester de notre libre arbitre dans ces conditions ?
Deux minutes de philosophie
Je n'ignore pas bien sûr les conséquences philosophiques du fait que nous n'aurions pas de libre arbitre. Je ne vais pas m'étendre sur ce point, car il y a de nombreux articles sur Agoravox, et de nombreuses vidéos sur internet qui traitent du sujet. Cependant, il existe une conclusion simple que je n'ai encore retrouvée nulle part et que je voudrais partager avec vous.
Autant dans mon article j'argumente sur le fait que, contrairement à ce qui est couramment admis, aucune des démonstrations ou expériences scientifiques réalisées jusqu'ici ne peut évacuer l'hypothèse d'un monde déterministe, ce qui me permet d'envisager la démonstration que je mentionne, autant dans un monde déterministe, rien ne peut permettre d'évacuer la question de savoir qui (quoi, comment, pourquoi) a choisi la solution dans laquelle nous nous trouvons, et qui par conséquent détermine nos vies.
En effet, si notre monde est effectivement régi par une équation de champ classique non-linéaire, il existe a priori une infinité ("non-dénombrable" pour les initiés) de solutions possibles. Or nous sommes dans une et une seule de ces solutions. Qui (quoi, comment, pourquoi) en a décidé ainsi ?
Chacun pourra donner sa réponse personnelle à cette question, mais elle restera à tout jamais posée. Car c'est une question indécidable. En conséquence, le déterminisme ne peut pas évacuer le sentiment religieux.
Je vous laisse méditer sur ce point.
Mais n'oubliez pas de demander à vos ami(e)s mathématicien(ne)s de m'aider à démontrer que le formalisme quantique peut être déduit d'une théorie classique déterministe, c'est-à-dire, de démontrer que nous avons pas de libre arbitre. Pour les convaincre, vous pourrez leur indiquer les différents épisodes aboutissant à ce projet.
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