En 1991, l’OTAN a refusé l’adhésion des pays d’Europe de l’Est qui en faisaient la demande

Un document, classé secret mais qui est maintenant déclassifié, montre que l’OTAN a refusé l’adhésion des pays d’Europe de l’Est qui en faisaient la demande en 1991. Le document ajoute d’ailleurs explicitement dans le résumé que « des garanties de sécurité sont inacceptables » puisque c’est pour s’assurer qu’ils ne seront pas agressés par la Russie que ces Etats demandent leur adhésion. Mais l’OTAN ne veut nullement s’engager à les défendre. Cela ne change évidemment rien à la nature agressive et contre-révolutionnaire de l’OTAN mais cela remet en question tout le mythe créé par Poutine et repris en chœur par les poutinolâtres à partir de 2007. Ce n’est pas sur le mode de la recherche à tous crins et le plus vite possible de l’extension de l’OTAN vers l’Est que s’est manifestée la politique des USA et de leurs alliés dans la période qui a suivi immédiatement la chute du bloc de l’Est.
Les capitalistes réactionnaires des USA et du monde entier remportent en effet une formidable victoire quand le bloc de l’Est tombe par morceaux sans que les forces réactionnaires mondiales aient réellement eu à combattre puisque cela s’est fait sans intervention extérieure. L’intérêt des USA et de l’OTAN était alors de laisser agir les forces sociales qui allaient dans le sens de l’abolition de l’ancien système et de ne pas provoquer ceux qui y étaient opposés. Je préciserai ultérieurement la nature des forces sociales qui voulaient en finir avec le système hérité de Staline, Khrouchtchev et Brejnev. Il est clair que ceux qui voulaient que ce système se perpétue constituaient l’aile conservatrice de la bureaucratie (ou nomenklatura), c’est-à-dire l’aile dure du parti, toujours prête à utiliser la force comme en 1953 en Allemagne de l’Est, en 1956 en Hongrie ou en 1968 en Tchécoslovaquie. C’est bien parce que les forces du capitalisme les plus réactionnaires sont animées de cette volonté de ne pas provoquer les partisans de la ligne dure qu’elles ne trouvent pas judicieux à cette époque d’étendre l’OTAN. Ils ne veulent surtout pas qu’une intervention brutale interrompe le processus en cours et ils ne veulent donc pas donner pour argument ou prétexte à l’aile conservatrice que les pays occidentaux seraient à la manœuvre dans le processus. Soyons bien certains que les bureaucrates conservateurs s’en seraient réjouis.
Commençons par examiner ce document. Il s’agit du compte-rendu d’une réunion préparatoire à la réunion du Conseil de l’Atlantique Nord de printemps qui sera seule habilitée à définir la position de l’OTAN dans une déclaration. Le CAN (Conseil de l’Atlantique Nord) est en effet le principal organe décisionnel de l’OTAN et les sommets de l’OTAN sont des réunions du CAN à son niveau le plus élevé : celui des chefs d’Etats et de gouvernements. Les décisions de l’OTAN ne sont jamais définitives et l’OTAN ne prend donc jamais d’engagements envers qui que ce soit pour un avenir indéfini. Elle n’a aucune raison de se lier les mains avec des promesses. Nous voyons bien ici qu’elle peut changer de position car nous savons tous qu’ultérieurement, mais dans d’autres conditions, l’OTAN s’est effectivement étendue vers l’Est. Les sommets ne se tiennent pas à des dates fixes et régulières mais ils se tiennent plutôt à des moments clés de l’évolution de l’Alliance quand la remise en question des décisions passées est envisageable. Ce rappel est nécessaire car je reparlerai des prétendues « promesses de non-extension de l’OTAN ».
Remarquons aussi à ce sujet que la politique de l’OTAN vient d’être grandement modifiée lors du sommet de Madrid des 29 et 30 juin 2022 pour tenir compte de l’invasion de l’Ukraine par l’armée Russe. L'alliance militaire impérialiste prévoit notamment d'augmenter toutes ses capacités militaires, qu'elles soient nucléaires, conventionnelles ou cybernétiques. De plus sa politique d’extension permet maintenant l’adhésion de nouveaux pays qui étaient auparavant partisans du non-alignement militaire. Rappelons aussi que les révolutionnaires demandent la dissolution de l'OTAN en même temps qu’ils se prononcent contre Poutine et pour le soutien total à la résistance du peuple ukrainien » autant qu’ils se prononcent d’ailleurs pour la défense de tous les peuples contre toute agression impérialiste d’où qu’elle vienne (Irak, Afghanistan, Syrie, Lybie, Yemen, Kazakhstan, Ukraine…)
Je donne ma traduction du document à la fin de l’article et j’ai ensuite reproduit les deux volets du texte original sur une image qu’il faut agrandir pour la lire. Vous pouvez trouver ce texte original sur internet ici. Je complète par une chronologie des évènements qui ont précédé la réunion de Bonn et je termine par une liste de 5 preuves qu'il n'y a jamais eu de promesses de non-extension de l'OTAN vers l'Est.
Cette réunion de Bonn était convoquée dans le but de préparer une réponse à la candidature des États d’Europe de l’Est qui voulaient adhérer à l’OTAN. La décision était d’emblée prise de refuser leur adhésion. La réunion était chargée de trouver des arguments pour justifier cette décision et aussi de faire des propositions pour tenter de satisfaire au mieux les gouvernements concernés sans toutefois accepter l’adhésion.
La réunion s’est tenue à Bonn, le 6 mars 1991. Elle regroupait les représentants de quatre états :
- Raymond G. H. Seith, sous-secrétaire d’Etat, représentant les USA. (A gauche sur notre photo).
- Jürgen Chrobog, secrétaire d'État aux Affaires étrangères, représentant l’Allemagne. (En haut au centre sur notre photo).
- John Weston, secrétaire adjoint du cabinet et directeur politique au foreign office, représentant le Royaume-Uni. (En bas au centre sur notre photo).
- Joëlle Timsit, ambassadrice, représentante de la France. (A droite sur notre photo).
Après avoir indiqué l’essentiel des conclusions que je viens de donner dans un bref résumé (47 mots), le compte-rendu détaille un peu plus les interventions dans quatre paragraphes que nous examinerons l’un après l’autre. Nous trouverons successivement :
- Les positions exprimées par Jürgen Chrobog, représentant de l’Allemagne.
- Les positions exprimées par John Weston, représentant du Royaume-Uni.
- Les positions exprimées par Raymond G. H. Seith, représentant des USA.
- La proposition faite par Jürgen Chrobog d’envisager des traités bilatéraux contenant des éléments de non-agression et les positions exprimées par Joëlle Timsit, représentante de la France.
Le représentant de l’Allemagne, Jürgen Chrobog déclare :
« Nous avions été clairs dans les négociations 2+4 sur le fait que nous n’étendrions pas l’OTAN au-delà de l’Elbe (Sic). Nous ne pourrions par conséquent pas octroyer le statut de membre de l’OTAN à la Pologne et aux autres. »
L’expression « 2+4 » fait référence aux deux Allemagne et aux quatre puissances alliées signataires en 1945 des accords de Potsdam à savoir : les USA, la Russie, le Royaume-Uni et la France. Ces discussions ont abouti « au traité de Moscou » signé le 12 septembre 1990. Le nom officiel est : « traité portant règlement définitif concernant l’Allemagne ». Les articles du traité peuvent être consultés sur la page de la Wikipédia. Le but du traité était de pallier au fait qu’à la libération, après la signature de l’armistice, aucun traité de paix n’avait été signé entre les belligérants de la seconde guerre mondiale. Il fallait donc inscrire dans un traité toutes les décisions concernant le nouveau découpage des frontières notamment celle séparant l’Allemagne de la Pologne (article 1). Il fallait aussi encadrer la stratégie militaire de l’Allemagne (article 2) ainsi que les conditions de son armement et du nombre de militaires (article 3). Le traité prévoit aussi d’abroger les droits et dispositions particulières des quatre autres puissances à l’égard de l’Allemagne. Cette dernière retrouve ainsi la pleine souveraineté sur ses affaires intérieures et extérieures (article 7). Il n’était donc pas prévu au départ de s’occuper particulièrement de l’unification de l’Allemagne mais, vu le contexte dans lequel les discussions se sont déroulées, ce fut en fait le principal sujet de discussion. D’ailleurs, le traité prévoit les conditions du retrait des troupes soviétiques de l’Allemagne de l’Est (article 4). Il prévoit aussi qu’après le retrait des troupes soviétiques les forces de l'OTAN pourront stationner à l'est de l'Allemagne mais sans y faire stationner des armes nucléaires (article 5). Il prévoit aussi que l’Allemagne pourra contracter librement des alliances (article 6).
Il est probable que, dans la première phrase, Jürgen Chrobog ait confondu l’Elbe et l’Oder. L’Elbe est un fleuve qui coupe l’Allemagne en deux en passant à l’Ouest de Berlin. L’Oder est un fleuve qui sépare l’Allemagne de la Pologne sur sa partie la plus en aval, exception faite de la région de Stettin. Sur la partie en amont c’est la Neisse, un affluent de l’Oder, qui délimite la frontière (voir les cartes ci-dessous. Jürgen Chrobog a simplement voulu dire « à l’Est de l’Allemagne » avec une formule plus imagée mais en disant l’Elbe à la place de l’Oder.
L’erreur de Chrobog est signalée dans article intitulé « Elargissement de l’OTAN à l’Est de l’Allemagne : vrai ou faux ? » du site web « Clio-Texte ». Il n’a jamais été question de l’Elbe dans les diverses discussions 2+4 contrairement à ce que dit Chrobog. Cela n’est du moins signalé nulle part ailleurs à ma connaissance et surtout pas dans les documents de l’OTAN. Cela explique d’ailleurs la mention « Sic » ajoutée à la suite de cette phrase par le rédacteur du résumé qui tient ainsi à montrer qu’une telle affirmation est de la responsabilité de Chrobog et non de la sienne.
Qu’il y ait eu ou non une erreur n’a d’ailleurs guère d’importance pour mon propos puisque l’Elbe ne pourrait être considérée comme une frontière que dans un discours visant à séparer l’Allemagne en deux parties car, à l’exception de la Pologne, tous les autres pays d’Europe de l’Est sont plus au sud.
Il s’agit donc bien dans les deux cas d’indiquer que, pour la Pologne, il serait possible d’argumenter le refus de son adhésion à l’OTAN en vertu de ce qui a été dit lors des discussions 2+4. La mention « and the others » pourrait alors concerner les pays Baltes situés à l’Est de la Pologne.
Au cas, peu probable, où il n’y aurait pas une erreur de Chrobog, il faudrait alors comprendre qu’au cours de la discussion sur l’Allemagne des dispositions différentes auraient pu être envisagées de part et d’autre de l’Elbe au sujet de la présence de l’OTAN dans l’Allemagne réunifiée.
Passons maintenant au paragraphe suivant pour examiner les positions exprimées par John Weston, représentant le Royaume-Uni. Il confirme la crainte des pays d’Europe de l’Est à l’égard de de la Russie sans toutefois préciser qu’il n’y a que la fraction conservatrice de la bureaucratie qui est agressive. Il dit : « Ils (les pays d’Europe de l’Est) étaient inquiets au sujet du danger éventuel d’une Union Soviétique ou d’une Russie revancharde et de l’instabilité au sein de l’Union Soviétique avec de possibles débordements ». C’est cette crainte d’une intervention armée de la Russie qui les incite à se mettre sous la protection de l’OTAN. Ils cherchent à avoir des garanties de sécurité. Mais l’OTAN ne veut jamais prendre des engagements pour une durée indéfinie. Elle peut changer d’orientation d’un sommet à l’autre. De plus, elle ne veut pas intervenir directement dans le processus qui va vers le rétablissement du capitalisme dans tout le bloc de l’Est.
Weston précise dans quelle limite il conviendrait de leur fournir une aide mesurée sur le plan militaire. De son point de vue, il faudrait donner une aide suffisante aux pays d’Europe de l’Est « pour dissuader toute intimidation » de la Russie mais pas assez pour « présenter une menace pour leurs voisins ». Cette stratégie de l’OTAN est classique. Elle fournit souvent une aide militaire mesurée en fonction d’un objectif en prenant garde de ne pas risquer qu’une aide trop importante permettrait de dépasser l’objectif poursuivi. Cela correspond bien à la stratégie adoptée actuellement en Ukraine. L’OTAN aide suffisamment l’Ukraine pour qu’elle ne soit pas rapidement écrasée par la Russie mais en prenant garde aussi qu’elle ne puisse pas chasser les russes dans de brefs délais. L’OTAN veut seulement mettre Poutine en difficulté en faisant durer la guerre.
De la même manière, Weston précise que la réponse à faire aux pays d’Europe de l’Est par rapport à leur demande d’adhésion à l’OTAN doit être nuancée. Il faut que ce soit un refus car il est important de ne pas « ostraciser les Russes ». Mais il faut accompagner ce refus de propositions bienveillantes. Il propose notamment :
- un renforcement des relations avec l’Europe de l’Est ;
- des contacts bilatéraux et multilatéraux avec eux ;
- des progrès au Conseil de Sécurité et de Coopération en Europe sur les questions de gestion de crise.
Quand Weston dit qu’il ne faut pas « ostraciser les Russes », il s’agit en fait de ne pas provoquer la fraction conservatrice de la bureaucratie afin de ne pas risquer que le retour au capitalisme actuellement en cours soit interrompu. Il s’agit donc de soutenir l’autre fraction de la bureaucratie (la fraction restaurationniste) mais sans que cela soit par trop ostentatoire. Cette fraction restaurationniste regroupe des bureaucrates qui veulent asseoir leurs privilèges sur la propriété privée des moyens de production. Elle veut « réformer » la bureaucratie mais de telle sorte que ses membres restent des privilégiés en devenant tout simplement des capitalistes. Cela doit aboutir, en fait, à la suppression de la bureaucratie et à l’instauration d’une nouvelle oligarchie capitaliste. Une digression est nécessaire pour examiner les forces en présence. J’en distingue trois :
- la fraction conservatrice de la bureaucratie ;
- la fraction restaurationniste de la bureaucratie ;
- la masse des travailleurs et de la jeunesse qui veulent davantage de liberté et de démocratie avec, parmi eux, des populations qui ont vécu la domination de la Russie sur toute l’URSS comme une forme de colonialisme.
Ces forces ne sont pas homogènes. Chacune d’elle englobe des partisans de positions souvent nuancées.
La propagande occidentale a toujours voulu faire croire que les peuples des pays de l’Est rêvaient d’un retour au capitalisme. C’est faux ! L’aspiration à la liberté n’était pas une aspiration à l’enrichissement et cela ni avant ni après la chute du bloc de l’Est. En Allemagne en 1953, en Hongrie en 1956, en Tchécoslovaquie en 1968, en Pologne à partir de 1980, les multiples revendications que ce soit chez les ouvriers où les étudiants ne visaient jamais un retour au capitalisme. Jamais ils n’ont réclamé qu’il y ait des riches et des pauvres, des exploiteurs et des exploités, des ouvriers et des actionnaires, des employés et des patrons... Ils ont réclamé le droit de manifester, d’avoir des syndicats, la liberté d’expression, des élections libres, le droit d’organisation, la liberté de la presse... C’était d’ailleurs la même chose dans les écrits du Samizdat qui circulaient en Russie même. Personne n’a réclamé la « liberté » du marché, la « libre » circulation des produits... Cela c’est ce que voulaient les bureaucrates restaurationnistes désireux de devenir les nouveaux riches mais ils n’ont jamais osé le dire publiquement.
Nous observons que, dans les trois forces en présence, deux d’entre elles peuvent parfois agir dans le même sens sans pour autant s’unir dans une alliance. Ainsi les deux fractions de la bureaucratie seront toujours d’accord pour éviter qu’une mobilisation de la troisième force balaie toute la bureaucratie pour mettre en place un nouveau pouvoir fondé sur la démocratie ouvrière en conservant la socialisation du travail et donc l’abolition de la propriété privée des moyens de production. En bref, ces deux forces veulent éviter une révolution politique. Elles seront parfois d’accord pour réprimer des populations qui veulent s’émanciper de la tutelle de la Russie comme dans les pays Baltes, le Kazakhstan ou l’Ukraine.
De même, la fraction restaurationniste de la bureaucratie peut parfois agir dans le sens souhaité par les masses populaires en accordant plus de liberté : libération de Sakharov puis d’autres prisonniers politiques, acceptation de l’organisation « Mémorial » avec tout son travail de recherche sur les crimes de Staline et de réhabilitation des militants massacrés…
Revenons à l’analyse du document. Le paragraphe suivant indique que Seitz, le représentant des USA dit clairement : « Nous ne devons pas fournir un prétexte aux tenants de la ligne dure en Union Soviétique pour construire des sentiments anti-occidentaux. L’OTAN ne devrait pas être étendue formellement ou informellement à l’Est.. ». Puis, il enchaîne à son tour avec des propositions pour montrer la bienveillance de l’OTAN malgré son refus :
- « Nous devrions renforcer les relations bilatérales entre des pays d’Europe de l’Est, tout autant que les relations de l’OTAN avec eux.
- Nous pourrions aussi envisager des séminaires : des échanges sur l’organisation des urgences civiles ; des rencontres d’experts au format table ronde ; des formations OTAN d’officiers d’Europe de l’Est visant à la surveillance civile des forces de défense ; des invitations à assister au séminaire de défense de l’OTAN ; l’établissement de Conseils Atlantiques dans les pays d’Europe de l’Est et en Union Soviétique, etc
- Il y avait la possibilité pour des gouvernements d’entreprendre des formations et des échanges d’officiers, potentiellement d’académie à académie, des discussions en matière de stratégie et potentiellement même à plus long terme une sorte de relation de vente d’armes. »
Au dernier paragraphe, il est indiqué que Timsit, la représentante de la France, n’a aucune objection majeure aux propositions des autres intervenants. Chrobog indique que des traités bilatéraux sont envisageables.
En guise de conclusion, je répète ces trois extraits du document puisqu’ils montrent bien pourquoi l’OTAN a refusé de s’étendre vers l’Est en 1991 après l’unificatoin allemande.
- "Ils étaient inquiets au sujet du danger éventuel d’une Union Soviétique ou d’une Russie revancharde et de l’instabilité au sein de l’Union Soviétique avec de possibles débordements.
- Il serait important dans notre réponse de ne pas ostraciser les Russes.
- Nous ne devons pas fournir un prétexte aux tenants de la ligne dure en Union Soviétique pour construire des sentiments anti-occidentaux".
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TRADUCTION
SECRET
« Buisson ardant »
Émetteur : FCO
Destinataire : Washington, immédiatement
Ligne téléphonique n° : 460
À 18 heures 15. Heure de Greenwich, le 7 mars 1991
Informez immédiatement : Paris, Bonn, la délégation britannique à l’OTAN, Moscou
Mes 4 points d’instruction : réunion quadripartite des directeurs politiques à Bonn, le 6 mars : la sécurité en Europe centrale et Europe de l’Est
Résumé
- Le Royaume-Uni fait circuler le papier promis sur la sécurité en Europe centrale et Europe de l’Est. Consensus général sur le fait que l’admission au sein de l’OTAN et des garanties de sécurité sont inacceptables. Accord pour examiner la déclaration de la réunion de printemps du Conseil de l’Atlantique Nord indiquant l’intérêt de l’OTAN dans la sécurité et la stabilité en Europe de l’Est. Renforcement des relations bilatérales et des contacts OTAN/Europe de l’Est.
Détail
2. Chrobog (Allemagne) dit que nous avions besoin de nouvelles idées sur la manière d’assurer notre rôle quant à la sécurité des pays d’Europe centrale et de l’Est. Nous avions été clairs dans les négociations 2+4 sur le fait que nous n’étendrions pas l’OTAN au-delà de l’Elbe (Sic). Nous ne pourrions par conséquent pas octroyer le statut de membre de l’OTAN à la Pologne et aux autres. Nous pourrions cependant envisager de nous référer à nos intérêts dans ces pays dans de futures déclarations de l’OTAN. Des pas supplémentaires pourraient être entrepris au sein du Conseil de Sécurité et de Coopération en Europe et à travers des accords bilatéraux.
3. Weston a fait circuler un papier britannique à ce sujet et le présenta rapidement. Nous avons dû répondre aux demandes des pays d’Europe centrale et de l’Est pour obtenir des relations plus étroites avec l’OTAN. Ils étaient inquiets au sujet du danger éventuel d’une Union Soviétique ou d’une Russie revancharde et de l’instabilité au sein de l’Union Soviétique avec de possibles débordements et aussi un risque de conflit entre des pays d’Europe de l’Est. Notre but devrait être que les pays d’Europe de l’Est deviennent des Etats prospères, démocratiques et tournés vers l’Ouest, avec leurs propres forces militaires assez fortes pour dissuader toute intimidation mais pas assez pour présenter une menace pour leurs voisins. Nous pourrions faire beaucoup de choses pour eux dans les domaines économiques et politiques sans leur attribuer le statut de membre de l’OTAN ou de l’Union Européenne. Cependant, l’approche politique et économique ne serait pas suffisante en elle-même. Il semblait psychologiquement important pour l’Europe de l’Est d’examiner la question de la sécurité militaire. Il serait important dans notre réponse de ne pas ostraciser les Russes. Nous ne pouvons pas offrir aux européens de l’Est le statut de membre ou de membre associé de l’OTAN. Nous ne pouvons pas davantage offrir des garanties de sécurité explicites ou implicites. Ils ne peuvent pas avoir en tant que groupe une relation avec l’OTAN. L’OTAN ne peut pas non plus jouer un rôle de gardien de la paix dans la région. Nous devons pousser davantage la réflexion sur un certain nombre d’autres possibilités, comme les trois suivantes :
- Des garanties de sécurité négatives telles que proposées par la Pologne ou la Hongrie : notre position initiale était qu’il n’était pas nécessaire d’y donner suite.
- Une déclaration d’intérêt de l’OTAN envers les pays d’Europe Centrale et de l’Est.
- Divers contacts entre l’OTAN et ces pays au sujet des questions de défense et de sécurité aussi bien que des contacts bilatéraux entre les pays occidentaux et des pays individuels d’Europe Centrale et de l’Est (Il a fait la liste des exemples donnés dans le papier britannique).
Notre position initiale était que la meilleure manière d’avancer était de considérer, par rapport à notre intérêt dans ces régions, d’envisager de se référer à notre intérêt envers ces pays dans la déclaration du Conseil de l’Atlantique Nord de printemps : un renforcement des relations avec l’Europe de l’Est ; des contacts bilatéraux et multilatéraux avec eux ; et des progrès au Conseil de Sécurité et de Coopération en Europe sur les questions de gestion de crise.
4. Seitz est tombé d’accord. Une série de visites de chefs d’Etat d’Europe de l’Est à Washington sera planifiée et commencera par Walesa. Les polonais et d’autres cherchaient à obtenir des déclarations bilatérales. Les Etats-Unis auraient eu à se prononcer sur la sécurité dans ce contexte. Nous avions exprimé clairement à l’Union Soviétique, tant dans le 2+4 que dans d’autres échanges, que nous ne profiterions pas de l’avantage du retrait soviétique d’Europe de l’Est. Nous ne devons pas fournir un prétexte aux tenants de la ligne dure en Union Soviétique pour construire des sentiments anti-occidentaux. L’OTAN ne devrait pas être étendue formellement ou informellement à l’Est. Le principal objectif et la garantie recherchée par l’Europe de l’Est était le retrait des troupes soviétiques. Nous devrions renforcer les relations bilatérales entre des pays d’Europe de l’Est, tout autant que les relations de l’OTAN avec eux. Nous pourrions aussi envisager des séminaires : des échanges sur l’organisation des urgences civiles ; des rencontres d’experts au format table ronde ; des formations OTAN d’officiers d’Europe de l’Est visant à la surveillance civile des forces de défense ; des invitations à assister au séminaire de défense de l’OTAN ; l’établissement de Conseils Atlantiques dans les pays d’Europe de l’Est et en Union Soviétique, etc. Il y avait la possibilité pour des gouvernements d’entreprendre des formations et des échanges d’officiers, potentiellement d’académie à académie, des discussions en matière de stratégie et potentiellement même à plus long terme une sorte de relation de vente d’armes.
5. Chrobog a dit que nous devrions également envisager des traités bilatéraux contenant des éléments de non-agression. De tels traités devraient aussi être conclus avec l’Union Soviétique. Timsit (France) a dit qu’elle regarderait les propositions du papier britannique. La France n’était pas emballée par l’idée de liens entre des pays d’Europe de l’Est et l’Alliance en tant que tels. Mais elle n’eut aucune objection majeure aux propositions qu’elle a entendue. Il fut décidé que le débat à l’OTAN devrait être dirigé en suivant globalement ces lignes.
HURD
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DOCUMENT ORIGINAL
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CHRONOLOGIE DES EVEVEMENTS QUI ONT PRECEDE LA REUNION
- 4 décembre 1999. Sommet de l’OTAN à Bruxelles. Dans le contexte des changements fondamentaux qui se produisent en Europe centrale et orientale et dans la perspective de la fin de la division de l’Europe, le président américain, Bush, consulte les dirigeants de l’Alliance à la suite de sa réunion au sommet avec le président Gorbatchev à Malte. Pendant que se déroule le sommet de l’OTAN, les dirigeants des pays du Pacte de Varsovie dénoncent l’invasion de la Tchécoslovaquie de 1968 et rejettent la « doctrine Brejnev » de souveraineté limitée.
- 8 janvier 1990 : Manifestations massives en RDA en faveur de la réunification allemande.
- Le 7 février 1990, le Comité central du PCUS accepta la recommandation de Gorbatchev de renoncer à son monopole sur le pouvoir politique. En 1990, les quinze républiques constitutives de l'URSS tinrent leurs premières élections libres et compétitives. Les réformateurs et les nationalistes ethniques remportèrent de nombreux sièges. Le PCUS perdit les élections dans six républiques, où les députés indépendantistes devinrent majoritaires.
- Le 13 février 1990 : L'OTAN et le Pacte de Varsovie réunis à Ottawa décident de la réduction des forces conventionnelles en Europe et discutent de la réunification allemande.
- 26 et 27 février 1990 lors de sa première visite officielle à Moscou, le président de la Tchécoslavaquie, Václav Havel, signe un accord prévoyant le retrait, avant le 30 juin 1991, des troupes soviétiques stationnées sur le sol tchécoslovaque. Le traité bilatéral d'assistance militaire est déclaré non reconductible.
- Le 4 mars 1990, la République socialiste fédérative soviétique de Russie tint des élections relativement libres pour le Congrès des députés du peuple de Russie. Boris Eltsine fut élu député, représentant la ville de Sverdlovsk, en recueillant 72% des voix.
- Le 14 mars 1990 : Première réunion 2+4 qui est en fait une conférence 2+4 : +1 car la Pologne y est associée. Discussion sur la réunification de l’Allemagne.
- Le 18 mars 1990 : Déclaration d'indépendance de la RDA vis-à-vis de l'URSS, à la suite des élections libres qui voient le succès de chrétiens démocrates (apparentés à la CDU au pouvoir en RFA). Le parti communiste, rebaptisé parti du socialisme démocratique, s’effondre.
- Mai 1990, la Hongrie, à son tour obtient que soient retirées de son territoire les troupes soviétiques.
- Le 17 mai 1990. A Bruxelles. Manfred Wörner secrétaire général de l’OTAN prononce un discours devant le Bremer Tabaks Collegium. Il déclare notamment : « Notre stratégie et notre Alliance sont exclusivement défensives. Ils ne menacent personne, ni aujourd'hui ni demain. (…) Ce sera également le cas d'une Allemagne unie au sein de l'OTAN. Le fait même que nous soyons prêts à ne pas déployer les troupes de l'OTAN au-delà du territoire de la République fédérale donne à l'Union soviétique de solides garanties de sécurité. » Cette phrase sera ultérieurement citée par les défenseurs de Poutine qui voudront voir ici une promesse de non-extension de l’OTAN.
- Le 18 mai 1990 : La RDA et la RFA signent un accord d'union économique et monétaire, étape vers la réunification. Pour éviter une émigration massive de la main-d’œuvre de l’est vers l’ouest, le chancelier Kohl fait adopter, en dépit de l’opposition de nombreux économistes, la parité monétaire entre le deutschemark de la RFA et celui de la RDA. Les salaires, les retraites et l’épargne (jusqu’à 4000 DM) seront convertis au taux de un pour un et d’énormes crédits (115 milliards de DM) sont prévus pour faciliter le passage à l’économie de marché.
- Le 29 mai 1990, Boris Eltsine fut élu président du Présidium du Soviet suprême de la RSFSR, alors que Gorbatchev avait demandé aux députés russes de ne pas voter pour lui. Eltsine était soutenu par des membres démocrates et conservateurs du Soviet suprême, qui cherchaient à prendre le pouvoir dans la situation politique en constante évolution. Une nouvelle lutte de pouvoir apparut entre la RSFSR et l'Union soviétique.
- 7 juin 1990, les dirigeants des pays membres du pacte de Varsovie, réunis à Moscou, amorcent une transformation de l'alliance militaire en « un accord fondé sur une base démocratique, entre États souverains et de droits égaux ».
- Le 17 juin 1990 : Signature d'un accord de bon voisinage entre l'Allemagne réunifiée et la Pologne.
- Le 21 juin 1990 : La Volksammer (assemblée est-allemande) et le Bundestag (assemblée ouest-allemande) reconnaissent solennellement la frontière Oder-Neisse pour séparer l’Allemagne et la Pologne, et ratifient le Traité d'État RDA-RFA.
- Le 22 juin 1990 : Disparition à Berlin de Checkpoint Charlie, point de passage entre l'est et l'ouest depuis 1961.
- 26 juin 1990, le Parlement hongrois demande au gouvernement de négocier le retrait du pays du pacte de Varsovie.
- Le 1er juillet 1990 : Entrée en vigueur de l'union économique et monétaire entre la RDA et la RFA : la réunification se fait sous les auspices du libéralisme. L’union monétaire entre dans les faits, mais sans union politique, elle n’incite guère les entreprises occidentales à investir, d’autant que le coût du travail paraît désormais très élevé. Le gouvernement est-allemand de Lothar de Maizière accepte de négocier un second traité qui ne pourra s’appliquer qu’après l’accord des quatre puissances occupantes (États-Unis, URSS, Royaume-Uni, France).
- 5 et 6 juillet 1990. 11ème sommet de l’OTAN tenu à Londres. Publication de la Déclaration de Londres sur une Alliance de l'Atlantique Nord rénovée, exposant des propositions pour le développement de la coopération avec les pays d’Europe centrale et orientale sur tout un éventail d’activités politiques et militaires, y compris l’établissement d’une liaison diplomatique régulière avec l’OTAN. Personne ne songe à une extension de l’OTAN. L'OTAN a tendu une « main amicale » aux anciens pays du Pacte de Varsovie, les invitant à nouer de nouvelles relations avec l'OTAN (et non pas à adhérer à l’OTAN). Le compte rendu textuel exprime le souhait de l'OTAN de s'ouvrir aux pays d'Europe centrale et orientale, sans pour autant isoler l'Union soviétique. Ce sommet a été suivi par la création du CCNA (Conseil de Coopération Nord-Atlantique le 20 décembre 1991. Le programme d'action décidé par les chefs d'Etat et de gouvernement à Londres contenait cinq éléments clés :
- instaurer une nouvelle relation avec les pays d'Europe centrale et orientale, autrefois unis contre l'OTAN au sein du Pacte de Varsovie, mais considérant aujourd'hui l'Alliance comme un partenaire prêt à tenir compte de leur désir de se rapprocher de l'Occident et à surmonter un sentiment d'isolement et d'insécurité ;
- élaborer une nouvelle stratégie militaire qui non seulement refléterait le fait que l'OTAN ne se trouve plus confrontée à une menace unique et écrasante, mais qui permettrait également à l'Alliance de gérer les défis et les crises les plus susceptibles de menacer sa sécurité à l'avenir ;
- confirmer la volonté de renforcer la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) et la doter d'institutions permanentes qui soulignerait de manière plus tangible son rôle de forum paneuropéen pour la coopération et d'instrument de gestion des crises et de règlement pacifique des différends ;
- s'engager à poursuivre le processus de maîtrise des armements au-delà du traité sur les forces conventionnelles en Europe (FCE) dans le but de limiter le potentiel offensif des forces armées à un niveau où toute attaque surprise ou agression majeure deviendrait impossible. Cet engagement s ' accompagnerait de mesures visant à intensifier la confiance et la transparence sur les activités militaires de tous les Etats membres de la CSCE ;
- encourager l'Europe à assumer une identité en matière de sécurité et jouer un rôle propre dans le domaine de la défense, dans le cadre de la construction d'un pilier européen au sein de l'Alliance, en vue de créer un partenariat transatlantique d'égal à égal, plus mûr et mieux équilibré.
- Le 12 juillet 1990, Eltsine démissionna du Parti communiste dans un discours prononcé au 28ème Congrès.
- Le 16 juillet, le Parlement ukrainien approuva à une écrasante majorité la Déclaration sur la souveraineté de l’Ukraine avec un vote de 355 voix pour et quatre voix contre. Les députés du peuple votèrent à 339 voix contre 5 pour proclamer le 16 juillet fête nationale ukrainienne.
- Le 23 août 1990 : La Volksammer (assemblée de la RDA) décide l'adhésion de la RDA à la RFA à compter du 3 octobre 1990. Avant la réunification, le Bundestag (RFA) et la Volkskammer (RDA) votent une résolution précisant que la frontière avec la Pologne ne sera pas remise en cause par les Allemands, en échange de quoi la Pologne renonce aux réparations de guerre et s’engage à respecter les droits culturels de sa petite minorité germanophone.
- 12 septembre 1990, traité portant règlement définitif concernant l’Allemagne dit le plus souvent « traité de Moscou » ou « Traité 2 + 4 » (les deux Allemagnes + USA, France, Royaume-Uni, Russie). Les contours de l’Allemagne réunifiée sont fixés. Nulle part, il n'est fait mention d'une quelconque promesse formelle de ne pas inclure d'autres pays d'Europe de l'Est dans l'OTAN à l'avenir. Mikhaïl Gorbatchev renonce à son opposition à la participation de l’Allemagne à l’OTAN. Le pays est immédiatement un État pleinement souverain. Son armée sera réduite à 370 000 hommes. Aucune arme nucléaire ne pourra être déployée en ex-RDA que les soldats soviétiques quitteront au plus tard en 1994, contre versement d’une indemnité de 13 milliards de deutschmarks. Les quatre puissances abandonnent les droits et les responsabilités que leur donnait la victoire de 1945.
- 24 septembre 1990, la RDA, engagée dans son processus d'unification étatique avec la RFA, est la première à annoncer officiellement son retrait du pacte de Varsovie.
- 3 octobre 1990, la réunification de l’Allemagne est proclamée. Les cinq Länder de RDA rejoignent la RFA. La réunification s’effectue par une annexion de l’Est par l’Ouest.
- Le 30 octobre 1990, l’organisation Memorial inaugure sur la place de la Loubianka le premier monument commémoratif aux victimes des répressions. C’est un magalithe rapporté des îles de la mer Blanche, appelées « îles Solovski », où avaient été installés les premiers camps. Il s’appelle désormais, tout naturellement, la « pierre des Solovki ».
- 19 novembre 1990. Traité de Paris. Le traité FCE (Traité sur les Forces Conventionnelles en Europe) est signé à Paris par 22 pays : les 16 membres de l'OTAN de l'époque (les États-Unis , le Canada , le Danemark , la France , l'Allemagne , la Grèce , l'Islande , l' Italie , le Luxembourg , les Pays- Bas , la Norvège , le Portugal , l'Espagne , la Turquie , le Royaume-Uni et la Belgique) et les 6 États du traité de Varsovie de l'époque (la Bulgarie , la Tchécoslovaquie , la Hongrie , la Pologne , la Roumanie et l' Union soviétique). Ce traité vise à éliminer l’avantage numérique dont disposent les forces du Pacte de Varsovie. D’énormes quantités d’armes (non nucléaires) doivent être détruites entre 1992 et 1995.
- Le 14 janvier 1991, Nikolaï Ryjkov démissionne de ses fonctions de président du Conseil des ministres ou de premier ministre de l'Union soviétique et est remplacé par Valentin Pavlov au poste nouvellement créé de Premier ministre de l'Union soviétique.
- 25 février 1991 Acte final du pacte de Varsovie. Les ministres des Affaires étrangères et de la Défense des pays qui sont encore membres du pacte de Varsovie (U.R.S.S., Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie, Tchécoslovaquie) se réunissent à Budapest, pour dissoudre la structure militaire de l'ancien bloc socialiste. L'alliance militaire issue du pacte de Varsovie est officiellement dissoute.
- 7 mars 1991. Réunion à Bonn des représentants de quatre pays occidentaux (Allemagne, Amérique, Royaume-Uni, France).
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CINQ PREUVES QU’IL N’Y A PAS EU DE PROMESSE
DE NON-EXTENSION DE L’OTAN VERS L’EST
11 mois après la réunion du 6 mars 1991 un article du Spiegel a évoqué ce compte-rendu qui avait été déclassifié après avoir été classé secret. Cet article, publié le 18 février 2022, est disponible ici avec sa traduction. Klaus Wiegrefe, l’auteur de l’article, prétendait montrer à partir de ce document que les accusations de Poutine concernant l’extension de l’OTAN étaient fondées alors que ce document prouve exactement l’inverse : il n’y a jamais eu de promesses de non-extension de l’OTAN. Bien entendu, le journal Spiegel n’a pas publié ce document. Il a seulement publié une photo des cinq premières lignes concernant les positions de Chrobog. J’avais longuement démonté la supercherie dans mon article « La vérité sur les promesses de non-extension de l’OTAN ». Nous avons maintenant cinq preuves qu’il n’y a jamais eu de telles promesses. Les voici :
Première preuve : La déclaration de Gorbatchev.
Je renvoie ceux qui veulent des précisions sur le contexte de cette déclaration à mon article.
Deuxième preuve : La déclaration de Chevardnadze.
Voir l’interview où il a fait cette déclaration et ce que j’en ai dit dans mon article.
Troisième preuve : L’explication donnée par Chevardnadze, en plus de sa déclaration.
Il a dit : « « A l'époque, nous ne pouvions pas croire que le Pacte de Varsovie puisse être dissous. C'était au-delà de notre domaine de compréhension. Aucun des pays participants n'avait de doute sur le Pacte de Varsovie. Et les trois États baltes, qui font maintenant partie de l'OTAN, faisaient alors encore partie de l'Union soviétique. »
Il est évident que dans ces conditions l’adhésion à l’OTAN de ces pays ne pouvait être envisagée puisque tout le monde pensait qu’ils resteraient liés à la Russie par le pacte de Varsovie.
Quatrième preuve : Nous avons vu comment les décisions sont prises dans l’OTAN et que jamais l’OTAN ne se lie les mains en prenant des engagements. Elle peut toujours, d’un sommet à l’autre, revenir sur ses positions et elle se garde cette liberté.
Tout le monde s’accorde pour dire qu’il n’y a pas eu de promesses écrites mais Poutine et ses admirateurs prétendent qu’il y a eu des promesses orales. Cela est impossible. Toute décision prise par l’OTAN est stipulée par écrit même si ces écrits peuvent restés secrets. Mais, il faudrait qu’une personnalité politique soit bien irresponsable pour faire des promesses au nom de l’OTAN sans qu’une décision ait été prise par l’OTAN elle-même à ce sujet.
Cinquième preuve : Le présent document.
Nous avons vu que le but de cette réunion du 6 mars 1991 était de trouvé une argumentation pour expliquer à des pays d’Europe de l’Est que leur demande d’adhésion à l’OTAN serait refusée. Si une promesse de non-extension à l’OTAN avait été adressée à la Russie, il n’y aurait pas lieu de mener cette discussion. Elle aurait suffi de dire : "Nous ne pouvons pas vous accepter dans l’OTAN parce que nous avons promis à la Russie de ne pas le faire".
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Nous savons que bien des admirateurs de Poutine qui ne voudront jamais démordre que Poutine dit la vérité citent des personnalités des USA liées à ‘OTAN comme Baker. Par des interprétations abusives, ils prétendent que ces citations seraient l’expression de promesses. C’est faux ! Nous voyons bien qu’à l’issue de cette réunion du 6 mars 1991, un des participants pourrait dire par exemple : « Je pense qu’il n’y aura pas d’adhésion de pays d’Europe de l’Est à l’OTAN dans un proche avenir ». Les poutinolâtres s’exclameraient aujourd’hui ; « Vous voyez bien que celui-là a fait une promesse ». Eh bien non ! Nous savons que ce ne serait pas une promesse. Il ne s’agissait que d’une stratégie mise en place pour la période bien particulière de la réintroduction du capitalisme dans le bloc de l’Est et nous savons qu’elle n’a pas duré longtemps.
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