La République n’est pas en danger, sauf que...
Récemment une initiative de Marianne avait créé un débat en déclarant que la République était en danger. Il y a même eu une foire d’empoigne à deux entre Apathie et Khan, noms d’oiseau à la clé. Au Figaro, Sarkozy annonce qu’il missionne la Cour de cassation par son président, la plus haute autorité judiciaire française, à trouver une solution pour que la loi dite de rétention de sûreté s’applique immédiatement.
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Dans son analyse le Conseil constitutionnel a décidé d’encadrer la loi de Rachida Dati. Notamment comme le publie Le Nouvel Observateur : Le Conseil constitutionnel avait stipulé jeudi que cette rétention de criminels jugés dangereux à l’issue de leur peine "ne saurait être appliquée à des personnes condamnées avant la publication de la loi" ou condamnés "pour des faits commis antérieurement" à cette publication.
En pleine période électorale, notre doux guide décide de trouver une solution pour court-circuiter ce fameux conseil. Comme l’annonceLe Figaro : L’Élysée souhaite rendre possible l’enfermement à vie des criminels dangereux déjà condamnés, en dépit de la censure partielle du Conseil constitutionnel. C’est par un communiqué de l’Elysée que l’on apprend qu’une mission a été demandée par le président de la République lui-même pour essayer de faire appliquer cette loi immédiatement. Voici le texte de ce communiqué, en fait sa partie contestataire et, en italique, ce qui nous pose un certain problème : Le Conseil constitutionnel a accepté toutes les mesures d’accompagnement de la sortie des criminels actuellement détenus que contenait la loi. Pour autant l’application immédiate de la rétention de sûreté aux criminels déjà condamnés, qui présentent les mêmes risques de récidive, reste un objectif légitime pour la protection des victimes. Le président de la République a demandé au premier président de la Cour de cassation d’examiner la question et de faire toutes les propositions nécessaires pour l’atteindre
On peut se dire que la conception présidentielle de Nicolas Sarkozy n’est pas dans la droite ligne de la constitution de la Ve République. On peut dire sans se tromper qu’il y a une dérive qui semble s’accentuer vers un pouvoir personnel sans contestation possible, pouvoir qui conteste celui des autres et maintenant de la plus haute instance de la France. Du reste, tout avait mal commencé. Alors que la Constitution stipule que le président nomme le Premier ministre et que celui-ci compose le gouvernement et le présente pour acceptation, le nouveau chef de l’Etat s’est comporté comme un farouche partisan de foulement aux pieds de cette Constitution. Tout d’abord, alors qu’il n’était pas encore président, bien qu’élu, donc qu’il n’était pas en fonction, il s’est installé à la Lanterne, résidence habituelle du Premier ministre et Villepin toujours en fonction, il a reçu les ministres potentiels pour former le gouvernement. Non seulement il agissait alors qu’il n’était pas en fonction, et ensuite il a agi contre la Constitution. Les arguments développés par ses soutiens ne tiennent pas la route. Ces soutiens ont défendu l’idée que l’on sortait de l’hypocrisie car, avant, tous les présidents formaient le gouvernement par-dessus le Premier ministre. C’est tout à fait faux et dans la forme et dans le fond. On peut déjà parler des deux cohabitations où c’est bien le Premier ministre qui formait son gouvernement. Je prendrai comme autre exemple Chirac, Premier ministre de Giscard et Rocard Premier ministre de Mitterrand. Lors de ces deux gouvernements, ce sont bien les Premiers ministres qui ont formé leur gouvernement et ils ont pu imposer une partie des ministres, même si les présidents ont imposé certains d’entre eux et, de plus, ce n’était pas une imposition directe, mais un acquiescement indirect. C’est donc une contre-vérité flagrante de dire que c’était une habitude présentée différemment de façon hypocrite. Il y avait des négociations entre le président et le Premier ministre avec des nominations de l’un et de l’autre. Avec Sarkozy, cela n’a pas été le cas. C’est lui qui a nommé tous les ministres.
Ensuite, il a nommé les conseillers de ces ministères qui prennent les ordres au château. C’est donc une autre dérive, celle qui fait que le président décide à la place des ministres. Comme il décide à la place du Premier ministre, comme il prend la place des ministres dans les réunions européennes où jamais jusqu’à présent un président n’avait assisté à une réunion de ministres de l’Eurogroupe.
Il faudrait être aveugle pour ne pas voir qu’il y a une dérive monarchique. Cette dérive s’accentue, comme les décisions souveraines de retirer la publicité aux chaînes publiques, comme celle d’imposer un devoir de mémoire et maintenant de contester dans le fond et publiquement une décision du Conseil constitutionnel en essayant de trouver par la forme une solution pour contourner la décision de ce même conseil. On s’approche d’un pouvoir monarchique, électif ou non, mais absolu sans doute.
Lorsqu’à peine élu, mais non encore en fonction, en contradiction avec la Constitution, un président nomme les ministres, quand un président décide que les ministres ne sont légitimes que lorsqu’ils sont élus ce qui est anticonstitutionnel car contre la séparation des pouvoirs, quand un président prend les décisions à la place de ses ministres et sans ensuite passer par l’Assemblée nationale, quand ce sont les conseillers sans mandat et sans responsabilités qui parlent au nom de la République, quand le président parachute des candidats à lui, quand le président reçoit dans les locaux de la République les membres d’un seul parti, quand ce même président reçoit à l’Elysée tous les mercredis les responsables d’un seul parti, celui dont il est issu, quand enfin il critique l’instance suprême et par le fait même de trouver un contournement de ses décisions qui pourtant constitutionnellement s’appliquent à tous y compris le président, on peut se dire légitimement que la République est en danger car chaque jour une marche de plus est montée vers le pouvoir monarchique, pouvoir entre une seule main.
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