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Accueil du site > Tribune Libre > Le courage est-il socialo-historiquement soluble ?

Le courage est-il socialo-historiquement soluble ?

En réponse amicale à Approche critique de l’engagement contemporain (I) : Considérations sur
le courage
(19 mars).

MERCI INFINIMENT DU COURAGE DE PARLER DU COURAGE. QUI PEUT ÊTRE APPROCHÉ SANS CRITIQUE NI ENGAGEMENT NI CONTEMPORAINS, NI PRÉTENTION.

Le courage est-il socialo-historiquement soluble ?

Il est évident qu'il n'a pas de valeur exclusivement humaine. Il n'est pas une vertu, encore moins un humanisme.
L'en dehors de la nature ou du naturel aurait donc un sens ? Rien n'est moins sûr.
Surmonter sa peur est peut-être un acte de courage mais qu'est-ce qu'une peur non « physique » ?
Surmonter un défi : celui de l'être, qui n'est ni soi ni l'autre ? Ce qui ne déphase pas forcément en ces temps morts.

Il n'y a pas de rentabilité de l'acquis pour toujours dans l'Avoir, dont la première loi est l'impermanence, mais un leurre-illusion, un mensonge non conforme au courage de chaque instant.
Nous ne sommes propriétaires de rien, pas plus du courage que la lâcheté. Très bien.

L'acte courageux n'est pas intéressé puisqu'il n'y a rien à gagner – pas plus en basant tout sur ce rien qu'en le niant (certain estimant que le courage augmente avec la quantité à perdre, mise en jeu dans le défi, dont on « croit » qu'on ne le perdra pas du moment qu'on le relève, autant par heureux hasard que par le défi lui-même, considéré comme victoire acquise en soi, en tant que négation (supposée positivement humaniste face à la loi de l'obstacle) supérieure prétendue d'une réalité donnée (malgré l'arbitraire de l'acte mis en scène pour les enfants de Guignol, découpant sa petite parcelle d'appropriation ou d'affrontement créateur de valeur heureuse – soit-disant « valeureuse »).
Mais il n'y a pas que des tartarinades.

La valeur du courage est donc une rétribution en soi, une valorisation d'être surplombant celle qui se réclame de l'Avoir, mais qui la rejoint secrètement dans le calcul-plan lui-même, au niveau d'un capital dit symbolique. Très bien ?

Le courage n'a pas de valeur, il est une valeur incomparable qui libère, non de la peur mais de l'esclavage psychologique du binaire quantitatif et des dualismes dilemmiques du pouvoir intellectuel qui fondent la peur. Dans ce sens il les dépasse, mais il le fait par son étrangeté même d'avec avec une nature humaine faussée, construite sur la loi d'une force brutalement intellectuelle, purement humaine, aryenne, comme possédée par la possession.

Qui peut décider de vivre dans l'angoisse perpétuelle sinon celui qui confond la paix et la guerre dans une prétention affichée, faute de vie, de suspendre sa vie ? De gagner à la perdre ? L'absurde gain !

Personne ne peut suspendre sa vie : c'est elle qui nous suspend, comme femme se détourne. Il faudrait définir la qualité d'une volonté prétendument supérieure à « la vie », considérant qu'il puisse en exister une en dehors d'elle. Ce qui ne veut pas dire que cette volonté soit étrangère à ce qui fait la vie. Camus n'approuverait-il pas, d'ailleurs, cette vue ?

Positivement oui, la vue inverse est absurde, comme le monde partiel et réduit qui la fonde.
Une certaine « non-satisfaction » n'est pas insatisfaction mais refus lucide d'un pouvoir qui ne se superpose à l'être que pour limitation et domination. Il n'y a pas de satisfaction dans l 'inutile.

Multiplier à l 'infini une quantité estimée d'être dit supérieur ou meilleur (…) c'est le contraire d'un seul acte libre non calculé, dont le poids est infini puisqu'il conditionne sans le programmer tout devenir.

Le courage engage l'être entier, sans plan, bien qu'il soit entier dans l'intention qui le rend conscient et l'engage absolument dans le même temps.

Il n'y a rien à prouver au monde, surtout pas le courage, qui ne regarde que soi dans son rapport à l'autre, finalement très peu concerné par cette vertu intérieure. Le combat est un art alliant sagesse et action : il n'y a d'héroïsme que naturel, un peu comme celui de ces « justes » qui s'ignorent et qu'on ignore.
Leur héroïsme ne leur donne la force que d'être soi, qui est tout, absolument. Paisibles, face à l'absurde, qui, comme tout le monde sait « n'existe que dans la mesure où l'on y consent pas ». Qui a prétendu que ce refus était militant ? Les fabricants de médailles ? Pour reprendre donc Camus et Shakespeare en même temps, autant dire que cet absurde, bien réel du monde, n'existe que dans la mesure où l'on n'y croit pas du tout. Il n'y a pas de combat, là est le combat.


 


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8 réactions à cet article    


  • benedicte_gab 22 mars 2013 11:21

    Je dois avouer que l’article auquel vous répondez m’avait fait tiquer sur plusieurs points, à commencer par l’exemple du départ du saut à l’élastique, et que le votre exprime une vision qui semble globalement assez proche de la mienne.

    Je n’avais pas réussi à formuler un commentaire cohérent et je n’ai donc pas commenté. Vous avez parlé des « justes » j’y avais pensé aussi, et également à un autre exemple celui des mutins fusillés en 1917, si courage il y a c’est de leur côté qu’il était et non du côté de ceux qui allaient dans les tranchées la peur au ventre massacrer et se faire massacrer parce qu’ils avaient plus peur encore de « désobéir » et du regard des autres ... 
    En fait le concept de courage est pervers, et sert souvent à parer de vertu la lâcheté et présenter la conscience comme absence de courage ... et une confusion également entre courage et domestication d’une peur « mineure » pour soi (la hiérarchisation des peurs est personnelle) dans un cadre visant à le faire sans risque tout en se donnant l’illusion d’en prendre, le saut à l’élastique relève de ce cas de figure, s’il est présenté comme relevant du courage, ce qui n’est pas forcément le discours de tous ceux/celles qui l’ont fait ou le font.
    Or en fait agir en conscience, ne demande pas de courage, au sens de ce concept, ce n’est pas une violence que l’on se fait, et ne signifie en aucun que l’on ignore la peur, mais qu’on en est conscient, ne la laisse pas devenir son maître et qu’on ne cherche pas à parer de vertu, les actes qu’elle peut nous amener à commettre ... 
    Je n’arrive pas à trouver les mots pour exprimer ce que je voudrais dire sans faire long et confus ... désolée, je vais m’arrêter là donc :)

    • Darkhaiker Darkhaiker 22 mars 2013 18:01

      Merci de votre convergence, Benedict. Ne pas arriver à formuler n’est pas signe d’injustesse de vue, on est tous concernés à ce niveau : voyez nos politiques, qui nous ouvrent largement son chemin de perfection...

      Je dirais que le vrai courage, peut-être si proche du coeur (non au sens sentimental pur, mais surtout d’énergie qui nous dépasse et aide au dépassement), ne peut être approché par un concept : le courage (surtout intellectuel) n’est pas « intellectuel », et je ne connais pas de meilleur exemple que celui de Camus, à propos de sa mère, bien qu’il y en ait une infinité d’autres tout autour de nous.

      Quand il déclara – conscient du scandale moralo-politique qu’il allait déclencher, bravant d’avance la haine intellectuelle qu’allait soulever sa déclaration, et qui allait le discréditer définitivement aux yeux de tous les héros révolutionnaires de la révolte conforme du monde – préférer sa mère à la justice ! Ce geste symbolise peut-être le plus haut courage ordinaire, ou de « common sense » pour reprendre un terme orwellien, face aux « conventions collectives » quand elles sont perverties...

      Ne pouvant pas être approché comme qualité humaine ordinaire ET extraordinaire, quand elle fait face à une force mécanique aveugle ou négatrice, il ne peut qu’être corrompu par ceux qui en tirent
      finalement avantage, et parfois évidemment sali, dénoncé ou moqué. D’accord pour les mutinés de 17, comme pour tous les non-violents, ou pas, qui vont et iront jusqu’au bout de ce qu’ils sont.

      Personnellement, il m’arrive d’être trés ému (là est leur force supérieure) en voyant comment certains animaux menacés ou perdus, meurent. Surtout cette façon qu’ils ont de se retirer en silence, de faire face à la mort, dans une immobilité et un calme dont nous ferions parfois bien d’imiter la simplicité et la puissance naturelle. Cette tranquilité scandaleuse, annihilant en soi toute forme d’absurdité pensée (construite) de sa soit-disant condition... (non-consentement camusien).

      Pour ce qui est de la peur, qui n’est pas la prudence, elle ressemble beaucoup à une pathologie psychosociale, que le fascisme ordinaire « domestique », comme vous dites, par une peur très logiquement, très méthodiquement ou très subtilement – toujours plus grande. Une peur mathématique en quelque sorte...arabo-romaine...(au sens de culture de pouvoir).

      D’accord avec l’action en conscience, qui n’est pas se faire violence, mais devenant violente si cette action se voit « interdite », et s’il faut « faire taire » le procureur complice en nous, qui cherche à nous retenir d’être ce que l’on est, nous obliger à mentir (ne pas être) ou à respecter une omerta si naturalisée qu’il faut être « fou pour ne pas la suivre dans sa folie », pour reprendre quelqu’un (être « démocratiquement » conforme).

      A la nuance donc que la violence peut ou non s’intérioriser, devenir effrayante dans cette sorte d’imposition de la peur, de terrorisme intellectuel ou moral. D’accord aussi pour dire avec vous que le courage consiste alors à ne pas se laisser dominer, sans en faire une vertu, oui, tout en étant conscient que ce refus protège ce que nous sommes et que « la vertu » de ce que nous sommes est notre liberté la plus haute.
      On peut citer Bossuet, (à peu prés) : la liberté, ce n’est pas de faire ce que l’on veut, mais ne pas faire ce que l’on ne veut pas.


    • Darkhaiker Darkhaiker 22 mars 2013 19:24

      Cher Claus D.,

      Je regrette votre réaction négative.
       
      Je n’ai pas d’intention négative à votre égard : sans votre article je n’aurais pas eu l’occasion de m’exprimer, ni les autres, ou plutôt d’exprimer un point de vue, hélas un peu trop discriminé à gauche, à mon goût et depuis trop longtemps. Peut-être est-ce là ce que vous appelez « faire un coup » ?

      Pour ce qui est du négatif, il va falloir l’abandonner : j’ai une petite santé et ne peux pas trop le supporter, pas beaucoup plus que les sondages d’intention. Vous risquez une non-réponse, à terme.
      Je ne pense pas que ce soit votre objectif de départ.

      J’aurais préféré des arguments sonnants et trébuchant, défendant la partie théorique du courage qui peut l’être vraiment, humainement. Je pensais votre recherche sincère puisque vous en appeliez à l’autre dans sa différence...pour vous épauler. Vous parliez de Camus...Vous n’allez pas m’en vouloir de vous avoir cru sur parole ?

      Mais il n’est jamais trop tard, sachant que je refuse la corrida aussi farouchement que le bénitier, et qu’on ne peut répondre qu’à la hauteur d’une attaque ou d’un sentiment de blessure (évidemment au moins « vécue »), momentané.

      J’attends donc un retour de courant ascendant, comme celui de votre article pour m’expliquer la blessure involontaire que j’aurais pu lui porter en exprimant un point de vue différent, mais non concurrent : je reconnais le parallélisme ou la convergence dans une tribune, pas le tribunal ou la main courante. Je connais la main tendue, pas la main coupée.

      Vous ne pouvez me condamner à un négatif que je ne vois pas, et que même s’il existait au yeux de certains, ne changerait pas mon regard sur le courage. Si la main qui nourrit le débat le tue dans le même temps parce qu’elle croit la perdre, je ne peux la serrer et c’est quand même bien dommage.

      Si Darkhaiker se fait connaître, ce n’est pas pour briller avant de s’éteindre de fatigue mais parce qu’il existe et qu’il est ce qu’il est, comme chacun, et que ça devrait largement suffire pour être au moins autant entendu que n’importe qui éprouve le besoin de parler pour dire quelque chose.
      S’il y a du vrai dans ce qui est dit, ça ne peut pas être au dépend d’un autre vrai : le vrai s’ajoute ou il est faux. Voilà le positif que j’attends de votre part, si je peux encore espérer en vous. Alors, pardon, sans ironie malsaine, mais allons-y ou alors tant pis !

      Cordialement.


      • Darkhaiker Darkhaiker 24 mars 2013 14:37

        Cher Claus,

        Heureux de votre volonté de confiance mutuelle : sans elle il n’y a rien (situation actuelle fabriquée du monde et de l’en soi : si je n’ai pas confiance en moi, comment en avoir dans l’autre et dans ce monde ?).

        Pour la communication, je n’ai aucune inquiétude : on peut communiquer à travers des langues différentes, si l’attitude est convergente et bienveillante (image d’un blanc « déserteur » débarquant au Nouveau Monde, dans l’inconnu...). Je ne pense donc pas que l’on doive mobiliser quelque effort que ce soit pour entendre quelqu’un, pas plus que pour le voir. Ceci peut être un autre débat.

        Pour ce qui est du partage des vues entre nous, même si ce penseur devient de plus en plus l’objet de tentatives de récupération politico-médiatiques, il y a au moins l’éternel Camus, sans doute l’un des poètes en prose français les plus importants du siècle 20.

        Rien n’a raisonné de vous en moi comme une suffisance ou une prétention : ce que l’on prétend n’est que ce que l’on met (justement ou injustement) en avant. Railler, ne peut être qu’un déraillement stérile. Non seulement on y perd de la hauteur, mais de l’efficacité, cette vertu si moderne. Plus classiquement, il n’y a pas d’efficacité sans distance bienveillante.

        Je n’en sais pas plus que vous sur le courage mais j’ai l’expérience de ce qu’il n’est pas, et ne pas montrer ce non-être serait négationniste, dans le cadre d’un débat, plutôt que sur un plan personnel. Puisque sur ce second plan, le premier courage est bien d’être soi-même, non la pâle copie d’une idée ou d’un autre, si exemplaires soient-il.

        Si je réponds à votre article c’est bien à partir de votre constat d’enfermement, que je partage. Je ne crois pas qu’il s’agisse d’une impression : rien ne sera jamais plus vrai. A partir donc de cette certitude absolue (non relativisable rationnellement, par ceci ou cela), il ne peut y avoir, comme vous le disiez, qu’une sorte de projet, de projection vers un « au delà » de cette situation. Donc, pour ce qui est de lutter, il vaut mieux le faire contre une vraie négation de la liberté que contre une impression de non liberté.

        Faire confiance à cette impression-là renforce le courage, sisyphien seulement en apparence :

        « Cet univers désormais sans maître ne lui PARAÎT ni stérile, ni fertile. Chacun des grains de cette pierre, chaque éclat minéral de cette montagne pleine de nuit, à lui seul, forme un monde. La lutte elle-même vers les sommets SUFFIT A REMPLIR UN COEUR d’homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux. »

        Ainsi, la meilleure façon de résister aux raisons d’un découragement n’est-elle pas de reconnaitre leur « irréalité », au sens scientifique du mot ? Leur objectivité n’étant qu’une construction psycho-logique « imposée », donc une des sources du sentiment d’enfermement visé ? Et de méfiance de soi ? Puis de haine... ? (toujours visée !).

        Donc ce que je veux dire, c’est que l’important est aussi de voir ce qui est réel ou pas, ensuite, à partir de ce qui l’est, d’affronter le regard fantasmatique ou fanatisé d’autrui, ainsi que la complexité imaginaire d’un monde en voie de « déréalisation », à moins que ce ne soit la même chose...Projet sans projection mais non sans courage.

        Cependant il ne s’appuie pas sur une idée de soi-même, ni de l’autre (ce qui est la même chose). Il n’est que spontané et naturel lui-même. Ce qui ne veut pas dire qu’il est incompatible avec un projet idéal conscient et rationnel, qui va dans le même sens, qui converge sur un autre plan, ils ne sont que deux faces.

        Dans ce sens là, cordialement, et au plaisir de vous lire dans débat ouvert.


      • Darkhaiker Darkhaiker 25 mars 2013 17:05

        Cher Claus,

        Je risque de vous décevoir en vous disant que je n’ai aucun engagement citoyen précis si ce n’est Darkhaiker, que vous pouvez considérer comme un plan « philosophique », derrière son apparence, ses interventions (selon le hasard et la nécessité), son site ou son Pearltree.
        Si la vie n’est pas un engagement de chaque instant, je ne sais pas et ne veux pas savoir ce qu’elle est, ni ce qu’elle vaut, ni ce qu’elle veut : je laisse ça aux esprits experts qui peuvent se passer de leur nature pour être ce qu’il deviennent inévitablement, par suite de ce non-engagement.
        Il faut de tout pour faire un monde et au moins autant pour le refaire.
        Pour ma part je n’ai qu’une façon de voir, que je pratique absolument, très relativement.
        Comme toute personne « raisonnable », j’ai quelque difficulté à vivre en ce monde « déraisonnable », au sens plein et vide du terme, sans autre « prétention » qu’un geste, ou une parole, précis et assumés dans la vie de ce monde réel, et notamment celui de l’Internet.
        Vie très virtuelle donc dans ses actes, mais que je considère néanmoins comme plus réelle que la « vraie vie » (dite matérielle), comme le dernier lieu et terrain d’action et de réflexion le plus concrètement libre qui soit. La lutte réelle consistant donc à défendre en temps réel ce lieu utopique autant qu’un Notre Dame des Landes intérieur, sans lequel celui reste sans réponse humaine.

        L’objectif n’est pas tant d’exprimer littérairement que de dire le plus « efficacement » possible ce qui est (réel, désirable, inacceptable ou souhaitable, possible, nécessaire, humain ou pas...), sans pour autant faire de leçon explicite ou morale ni même philosophique, au sens académique ; donc que cela passe par une forme ou une autre, sans plus de préjugé, quelle importance ? Ce sont les choses dont on parle qui comptent.

        En ce sens, je rejoins une partie de vos préoccupations : nous n’avons pas le temps d’être parfaits pour être ou dire ou faire. J’irais même plus loin en demandant si tout ça est vraiment nécessaire, cette compétence-perfection supposée, quand on ne veux parler que de ce qui est, parfaitement ou imparfaitement, pour être « crédible ». Je me moque du crédit : l’être n’est pas de la monnaie, de l’avoir ! Le savoir- faire vient en faisant, comme pour l’être-là.

        L’important est cet être-là qui fait tout, même si on le pré-voit trop matériellement impuissant : l’animal encagé perd-t-il pour autant ses « qualités » ? Sauf à être reconditionné, reprogrammé, non.
        En ce sens le combat est assez simple de refuser absolument et inconditionnellement cette possibilité-là au nom même de ce qui est qualitativement et spontanément « heureux » : le bon « heur » sans recherche. Il y a là un principe d’autonomie non rationaliste, important pour garder une raison d’être face à l’absurde. Elle se fonde sur le non-absurde, qui n’est pas une négation, mais la position naturelle et « normale » contre laquelle l’absurde se construit en nous, contre nous-elle.

        Donc, et pour en finir sur ce thème, la langue, sans être une fin en soi, est pour moi le premier être pour tous, le premier bien commun. En ce sens elle mérite un minimum de respect, non souillé de je ne sais quel purisme ou puritanisme : je parle de langue libre (libérée des codes entrecroisés qui réduisent et séduisent la parole spontanée). Bref il s’agit d’une des premières imprescriptibilités du droit humain, autrement important finalement que celui de penser, quand celui n’est plus qu’une théorie ou une autre.

        Cette libération ne peut évidemment pas être seulement un jubilation ou un moyen, si l’on n’est pas conscient ( ou sensible à) de la fin immédiate lointaine de ce qui doit être dit ou suggéré. Pour faire court, Darkhaiker n’est qu’ une sorte de militant d’une certaine poésie universelle non universaliste, éternelle non conservatrice. Là est la limite de ses forces, qui force au respect de sa raison pratique tout en la bornant à un minimum d’ouverture, de par ce fait. Une limite qui ne permet pas de passage est un obstacle, ou un adversaire, en soi, regrettable. Discerner n’est pas distinguer.

        Ainsi tout approfondissent concernant Darkhaiker, ne passe que par ses textes, avec leur qualités et leur limites revendiquée, mais cependant non justifiées systématiquement ou par principe.
        Ce sont des textes libres citoyens du monde qui vont leur chemin, circulant totalement, par leur esprit, leur diffusion. Des pierres virtuelles pour un monde nouveau, mais très modestement, comme chacun peut en faire autant avec ses qualité propres s’il le veut (bien que pour continuer à être nous n’ayons pas vraiment le choix de nier ce que nous sommes, à l’envie ou au désespoir : on fait avec ce que l’on est). Ils cherchent aussi à donner envie d’exprimer le monde pour et par chacun, sans discrimination ni objectif extérieur à ce monde, si menacé par l’aspect matériel de son idée fausse. Voilà !

        Maintenant je dois dire que je suis touché par votre rapprochement avec mes vues, et même votre reconnaissance, qui ne doivent pourtant pas faire oublier le mien avec les vôtres, et inversement, depuis le début, dans la perspective de l’éclairage que vous avez heureusement initiée dans votre recherche sur la « notion » de courage, qui me semble en effet, tellement essentielle dans l’aujourd’hui « contemporain »...
        Courage perdu (comme résultat logique d’un calcul fermé) tellement difficile à retrouver, dans la puissante confusion intellectuelle qui nous caractérise, à l’intérieur d’un enfermement invisible d’impuissances réelles conjuguées.

        A cet enfermement invisible, je ne pense pas que le courage consiste en une réponse trop visible, mais plutôt en des actes probants et « non crédibles », gratuits, : ils définissent en négatif une crédibilité d’intérêt qui n’existe plus, et dont il faut désormais se passer, pour revenir à une humanité plus « première », non pas décomplexée par le retour à une barbarie imaginaire, (comme celle qui, parallèlement, se profile derrière la crédibilité ordinaire du désespoir), mais par un retour aux sources de notre humaine raison (raison ordinaire comme le « common sense » du grand Orwell, par exemple), et qui est la vraie matrice d’un sentiment existentiel conscient et concret, non volontaire mais désiré, non construit (pensé, mythifié) mais donné, qui se découvre dès que le bruit extérieur cesse.

        « L’art commence là où la pensée s’arrête » disait Camus.

        Rassurez-vous, le « non-être de courage » nous définit tous, et personne en particulier, quand nous n’avons pas courage d’être ce que nous sommes, avec nos limites d’hommes, celles qui ne font pas de nous des robots déraisonnablement productifs et raisonnants.
         
        C’est pourquoi le courage est aussi une question de lucidité, et d’honnêteté envers soi, dont je vous remercie, quand celui de l’autre s’ajoute au mien et inversement (je pense ici aux Alcooliques anonymes, dont les cercles de discussion sont moins de confessions douloureuses que d’acceptation conditionnelle d’un dévoilement de soi, dépendant moins du calcul que du nécessaire lâcher-prise d’une prétendue maîtrise, du et au fond d’un esclavage ou d’une dépendance, d’abord psychologique), rendant tout jugement entre égaux ridicule et malsain, sauf dans le respect. C’est l’humanité que fait les égaux, non les principes péréquateurs de pseudo compensation calculées au plus ou moins...dérisoirement « juste » !
        Déserton les pouvoirs si nous voulons voir.
        Ainsi, là comme dans votre article, nous sommes bien dans une recherche, où l’intérêt est de trouver pour tous, donc pour personne en particulier, mais aussi de non disposé. Dans cette recherche, il n’y a pas de malheur : il n’y a que du bonheur, de la dignité.

        L’objectif n’est pas d’être novateur mais de trouver le neuf – du réel – qui n’a jamais pu vivre, et de le libérer du vieux rêve éveillé qui nous endort. C’est ce neuf qui nous fait la leçon, pas nous, prisonniers du vieux monde...Le seul maître c’est la situation, (pas les sartriens, ni les situs) disent les orientaux, pas celui qui vit dans l’illusion d’un viol fantasmé, dont il serait l’ordonnateur et le bénéficiaire officiel. On ne maîtrise pas plus la nature que c’est elle qui nous maîtrise heureusement.

        Cordialement.


      • Darkhaiker Darkhaiker 26 mars 2013 23:19

        Claus,

        Merci de votre convergence. Et merci d’abord de m’avoir obligé à approfondir certains points. Je suis en accord avec ce que vous dites et avec votre combat, que je respecte et partage malgré des différences trop simples.
         
        Je ne connaissais pas cette référence de Camus au grand Emerson, référence qui, en elle-même, ouvre aussi une porte...Mais le monde des mousquetaires chercheurs de vérité est beaucoup plus exigu qu’il n’y paraît.

        Je ne doute pas une seconde de l’intérêt de ce que vous allez poster la prochaine fois et serais heureux de participer au débat. A la condition toutefois de bien vouloir me signaler votre article (par la boite mail du site darkhaiker, si vous n’avez pas d’autre moyen) : les noms des rédacteurs n’apparaissent pas sur la liste de diffusion, et mes lectures sont parfois trop aléatoires.

        En attendant je vous souhaite le meilleur voyage.

        Cordialement.


      • alinea Alinea 13 mai 2013 22:06

        Je n’ai pas lu tous les commentaires ; je ne sais que dire ! Je ne me suis jamais posé la question du courage !
        Il peut avoir quelque chose de l’intelligence dans sa capacité d’anticipation : on agit pour un mieux à venir ou pour éviter le pire ; agir contre le pouvoir, prendre des risques, parce que l’on ne pourrait pas se regarder dans la glace, demain, sinon. Il demande exigence et nous fait suivre notre chemin, sans complaisance ni compromission... la droiture est sans doute courageuse ; tenir tête dans un rapport de force qui ne nous est pas favorable.. toujours par rapport à un idéal ou une morale... sinon chacun fait ce qu’il a à faire et trouve courage à son niveau ; ce que je fais peut paraître courageux à d’autres , et inversement ; c’est poser un acte de liberté dans un monde aliéné... mais ça .peut être aussi se taire, laisser faire... tout dépend des situations


        • alinea Alinea 13 mai 2013 22:26

          Ah si ! S’encourager pour braver la paresse, l’inertie et les peurs pour sortir du merdier dans lequel nous sommes !

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