Les alchimistes de la cuisine

La cuisine a toujours eu le vent en poupe, mais elle trouve ces temps ci un regain d’intérêt …même la télévision s’en est emparée au point d’en faire un spectacle parfois dans le droit fil de la téléréalité.
Mais c’est l’originalité des cuisiniers qu’il faut découvrir, au-delà de la mise en scène, et des assiettes décorées, c’est l’inventivité qui s’invite à nos tables…
Si l’on prend le mot alchimie au pied de la lettre, il s’agit « d’associer plusieurs éléments donnant un résultat variable suivant la personne qui le réalise »…c’est donc de la chimie, le facteur humain en plus, comme l’affirme un restaurant du même nom. lien
Mais rentrons dans le vif du sujet.
Qui a entendu parler par exemple de l’aquafaba ?
Il s’agit de remplacer les traditionnels « blancs montés en neige » par un dérivé de pois chiche.
Pour qui douteraient de la faisabilité de cette possibilité, ça ressemble à ça :
Pour parvenir à ce résultat, il suffit de 200 gr de pois chiches secs, et d’une cuillérée à café de bicarbonate de soude.
On fait donc tremper les pois chiches pendant une journée, on les rince, et on fait cuire dans 900 ml d’eau à feu moyen pendant une heure, non sans y avoir ajouté le bicarbonate, dans une casserole avec un couvercle le plus hermétique possible. lien
Lorsque le contenu est tiède, on récupère l’eau de cuisson que l’on met au frais, et lorsqu’il sera devenu épais et visqueux, on pratique comme pour les blancs d’œufs pour les monter en neige.
Ensuite rien ne vous empêche d’en faire des meringues, des iles flottantes, ou tout ce que l'on fait avec des blancs d’œufs.
D’autres travaillent sur les épices et leur complexité, donnant tous les outils afin de réaliser soi même tel ou tel mélange d’épices.
Ainsi a été publié récemment un livre passionnant, réalisé par deux voyageurs gourmands et gourmets, qui ont sillonné la planète pour découvrir ceux qui mélangent ces épices, et les plats qu’ils concoctent avec ça.
Ils s’appellent Ethné et Philippe de Vienne, et leur livre, « les règles d’or des épices » (éditions Trécarré) est une bible pour tous ceux qui veulent se plonger profondément dans le monde savoureux des épices, d’autant qu’en complément de l’ouvrage, se trouve un coffret de réelles épices qui vont du Cari de Madras, ou de Singapour, au Colombo, en passant les épices du Yunnan, les épices à noircir Cajun, les épices à saté, tex-mex, à creton, et le panch phoran...etc. lien
Mais les alchimistes de la cuisine aiment aussi jouer avec la couleur, comme par exemple Anne-Sophie Pic, chef 3 fois étoilée, qui nous propose cette salade de betterave en véritable patchwork de couleurs.
Sa recette, au demeurant assez simple, est sur ce lien.
Cette betterave est un légume bien pratique, et l’intense couleur rouge qu’il laisse dans un bouillon est idéale pour colorer des tas de plats : l’utiliser pour mouiller une semoule de couscous va donner une couleur éclatante à la graine, cuire des pois chiche dans ce même bouillon, ou des pates, donne le même résultat.
Ces « betteraves râpées en Pickles » du grand Alain Passard, donnent une idée de ce que l’on peut faire avec sa couleur. lien
Pour terminer avec la betterave, pourquoi ne pas essayer ce risotto aux betteraves et au chèvre, qui consiste à cuire le riz dans un bouillon de betterave, ce qui va lui donner une douce coloration rosée.
Mais pour la couleur, il ne faut pas hésiter à utiliser les fleurs ? Des capucines aux physalis (pour la petite boule rouge qui se trouve à l’intérieur), en passant par la bourrache, le chèvrefeuille, l’œillet, le souci, l’hibiscus, le pissenlit, la rose trémière, la lavande, la pensée sauvage, la violette et beaucoup d’autres, toutes comestibles, qui peuvent être utilisées pour décorer un taboulé, ou n’importe quelle autre salade. lien
Et si on s’intéressait au poisson cru ?
Voici l’une des recettes les plus succulentes, et les plus faciles à réaliser.
Il s’agit de couper en dés de 3 cm environ une darne de poisson (thon, cabillaud, saumon, etc.)… de l’arroser d’un jus de citron, et de tenir au frais 2 heures.
Au moment de servir, on y ajoute des dés de mangue du même calibre, on sale, on poivre, on ajoute une petite cuiller de purée de piment, et on verse sur l’ensemble un bol de lait de coco, on mélange et il n’y a plus qu’a se régaler.
Pour le lait de coco, certaines précautions sont à prendre, car il existe le pire et le meilleur : il faut donc lire attentivement l’étiquette.
Pas d’additifs, pas de sucre ajouté, de préférence, achetez bio. lien
Si vous êtes tentés par l’originalité, tentez la pomme de terre : au four, non pelée, puis, lorsqu’elle est cuite, avec une seringue culinaire, injectez dans le tubercule un jus de viande, lequel va réhydrater la pomme de terre.
Il n’y a plus qu’à lui enlever sa peau, la couper en dés, la parfumer à son goût, et la faire revenir dans un peu d’huile d’olive.
Surprise des invités garantie.
Dans la série des livres à découvrir, un étonnant ouvrage paru dans la prestigieuse maison d’édition Slatkine, ( 40 recettes pour tous les fourneaux) qui met en vitrine le travail rigoureux et précis d’un grand chef : Dominique Gauthier, isérois d’origine, sacré « cuisinier de l’année » en 2008, (18/20) avec une étoile au Michelin, et qui exerce ses talents au Chat Botté, restaurant de l’Hôtel Beau Rivage à Genève.
La rédaction de l’ouvrage a été confiée à Jérôme Estèbe, journaliste à la Tribune de Genève, et chroniqueur gastronomique.
L’intérêt de ce livre se décline sur 4 saisons, expliquant par le détail toutes les recettes, avec un clin d’œil pour ceux qui voudraient les réaliser plus simplement : une version classe, et une version relax.
Pour le printemps, de la Fera du Léman, avec ses morilles et petits pois, jus de cébette au lard fumé, pata negra bellota, aux Pommes de riz de veau, avec sa salade de lentilles vertes, et truffes drômoises, (hiver) en passant en été par un Gambero Rosso, gaspacho de fraises et concombres au poivre noir, parfumé basilic et citron vert, ou, pour l’automne, aux Grenouilles de Vallorbe en tempura, servi avec une mousseline de pousses d’épinards, et un lait d’ail doux, il y en a pour tous les goûts, toutes les saisons, et tous les appétits.
La grande cuisine à la portée de tous…et je ne résiste pas à publier l’une des recettes, assez facile au demeurant, celle des ravioles d’asperges blanches, jus de roquette, parmesan castelmagno, version « relax ».
Pour les ravioles, mélanger 250 gr de farine, 2 œufs, 1 jaune d’œuf, 1 cl d’huile d’olive et pincée de sel, mettre en boule, filmer, et réserver au frais.
Cuire la botte de 12 grosses asperges dans l’eau bouillante salée pendant 5 minutes, après les avoir épluchées.
Rafraichir, égoutter, et couper les pointes en 2 dans le sens de la longueur. Réserver.
Couper les queues d’asperges en petits dés.
Faire réduire de moitié 20 cl de crème 35%, incorporer les dés et 100 gr de parmesan râpé.
Mélanger, rectifier l’assaisonnement et mettre au frais.
Étaler la pate pour les ravioles le plus finement possible.
Préparer 24 cercles de 7 cm.
Mettre la farce au centre de 12 cercles, humidifier le tour, et recouvrir avec les 12 autres cercles.
Presser fortement les bords.
Pocher les ravioles 3 minutes dans de l’eau frémissante salée.
Pendant ce temps là, saisir les pointes d’asperges à la poêle avec une pincée de fleur de sel.
Servir pointes et ravioles avec une salade de roquette à la vinaigrette de balsamique, coiffée de quelques copeaux de parmesan.
C’est tout de même mieux que de tomber dans le piège que nous tendent certains industriels de la chimie alimentaire : une rumeur persistante évoque un riz artificiel que fabriqueraient chinois, ou indiens, à base de plastique, de pommes de terre, et patates douces.
Après les poulets à la mélamine, le thé aux pesticides, les faux œufs de poule, les nouilles de riz cancérigènes, le porc transformé en bœuf à l’aide d’un additif à base de borax, l’imagination des malfaisants de l'industrie alimentaire ne connait pas de bornes. lien
Comme dit mon vieil ami indien : « fais du bien à ton corps pour que ton âme ait envie d’y rester ».
L’image illustrant l’article vient de dreamstime.com
Merci aux internautes pour leur aide précieuse.
Olivier Cabanel
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