Dans le domaine de la communication et des médias, une des dix-neuf pages du rapport est employée à décortiquer le bien étrange fonctionnement des sondages à l’Elysée. On y apprend que l’Elysée a signé le 1er juin 2007 une« convention » avec un cabinet chargé de réaliser des études d’opinion, « pour un coût avoisinant 1,5 million d’euros ». Les conditions sont... intéressantes : pas d’appel d’offre, ce qui est illégal pour un marché public de cette dimension, et seulement une page de contrat pour lier les deux parties. La Cour souligne le caractère « exorbitant » de cette convention, puisqu’elle prévoit que le cabinet décide seul des études à commander, à l’institut de son choix et quand il le souhaite, sans demander l’avis de l’Elysée ! En 2008, « près de 130 » études auraient ainsi été commandées.
A la demande de la Cour des comptes, le contrat a été modifié en mars 2009. Mais rien que pour l’an dernier, l’institution comptabilise plusieurs dizaines de cas de sondages commandés et payés par l’Elysée, alors qu’ils ont été également publiés dans la presse. On peut donc s’interroger : pourquoi l’Elysée participe-t-il au financement d’études qui ne lui apprendront rien de plus que ce que disent les journaux ?
Bien que la plupart des sondeurs travaillent de façon « confidentielle » pour la présidence, un seul est cité par la Cour, sans doute en raison de l’importance de ses relations avec l’Elysée : Opinion Way. Le cabinet anonyme a facturé en un an 392 228 euros à la présidence pour participer au « politoscope » bimensuel du sondeur. Or, cette enquête est régulièrement publiée par LCI et Le Figaro et il s’avère que « la comparaison des résultats publiés dans la presse et de ceux remis à la Présidence » ne fait « pas apparaître de différence »... Au moins quinze autres sondages parus dans la presse, réalisés par des instituts non précisés, ont également été facturés (en partie ?) à l’équipe présidentielle.
La Cour des comptes s’interroge sur le bien-fondé de la dépense pour l’Elysée. On peut aussi (surtout ?) changer de focale, et questionner le rôle et la place d’Opinion Way, qui clame haut et fort ne pas être marqué à droite (son président Hugues Cazenave, est d’ailleurs venu sur notre plateau en juin pour s’en défendre), mais qui disposait d’une confortable ressource venue de l’Elysée, pour un service qui semble bien maigre en réalité. Depuis, les choses ont changé : selon l’Elysée, cité par le rapport, le sondeur livre depuis mars des études « exclusives et confidentielles », différentes de celles publiées par le Figaro et LCI. Ces deux médias représentent d’ailleurs une autre source d’étonnement : si l’on comprend bien, ils ont régulièrement utilisé des sondages payés en partie par l’Elysée, sans le mentionner...
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