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Accueil du site > Tribune Libre > Délation et mauvaise conscience

Délation et mauvaise conscience

 
Dans l’Essonne, en banlieue parisienne, on va tenter de promouvoir une nouvelle et audacieuse approche pour assurer l’ordre : la délation. Nous allons bientôt entrer dans le signe de la Balance… Nouvelle, c’est vite dit, car d’Adam à Eve et d’Eve au Serpent, on était déjà en pleine délation et, à Venise, on mettait déjà discrètement les médisances « dans la bouche du lion ».
 
Pas de doute, toutefois que ce ne soit une approche audacieuse. Car alors que l’espion est parfois perçu comme un héros, le délateur, lui, le « stool », la « balance », il a vraiment mauvaise presse… Pourquoi ne denonce-t-on pas fièrement, avec la satisfaction du devoir accompli ? Surtout maintenant que la dénonciation est indispensable ?
 
Indispensable ? Eh oui… Parce que, contrariant la lecture qu’on a voulu faire de l’évolution du rapport des forces entre l’individu et la société, l’individu ne devient pas sans défense face à la société ; c’est la société qui devient d’autant plus vulnérable qu’elle devient plus complexe. La technique moderne permet désormais à chacun de porter dans une mallette, sinon dans sa poche, le virus ou le gaz qui causera à la société un dommage colossal, voire fatal.
 
Depuis le 9/11 et l’incident du métro de Tokyo, on peut tenir ce point pour avéré. Cette société ne survivra que si chacun prend sur lui de surveiller son voisin. De lui sauter dessus s’il y a urgence, au moins de le dénoncer s’il est suspect. Une sécurité publique qui n’est plus l’affaire de tous n’apporte plus la sécurité qu’on voudrait.
 
Un système de sécurité publique ne peut plus fonctionner correctement que si tous les citoyens sont essentiellement d’accord avec la loi et se sentent solidaires des gestes posés pour assurer son application. La première condition de la sécurité publique, c’est un soutien inconditionnel à la loi. L’ordre ne peut donc plus être maintenu que s’il existe un large consensus quant à la légitimité du pouvoir et quant à l’équité fondamentale de la loi.
 
Ce consensus est le basilaire, le palier “0″ sur lequel on peut construire l’édifice de la sécurité publique. Une société doit inspirer le respect, être perçue comme légitime et ses lois doivent jouir d’un soutien inconditionnel. Or ce soutien n’est possible que si une majorité effective de la population croit que la loi est juste. Le citoyen d’une démocratie doit avoir bonne conscience. Dans la société actuelle, il ne l’a pas. Les assises du basilaire sont lézardées et ce soutien inconditionnel n’existe plus. Pour deux (2) raisons fondamentales.
 
La première, c’est que notre société est gérée par un système dont les règles sont perçues intuitivement comme iniques, puisqu’elles mènent à des injustices intolérables et croissantes. Dans le contexte de misère qui prévaut presque partout, il n’est plus toujours évident de déterminer qui, du “criminel” ou de la société, a le bon droit de son côté. Doit-on faire trébucher l’enfant qui fuit avec un quignon de pain ou le gendarme qui le poursuit ? Ce dilemme est une réalité quotidienne dans les marchés publics des trois-quarts des villes du monde.
 
Comment demander au citoyen moyen d’être ABSOLUMENT contre le vol, s’il y a des millions d’individus dans la société pour qui le vol est l’unique accès aux besoins essentiels à leur survie ? Notre société a bien raison d’avoir mauvaise conscience, parce qu’elle ne fait pas ce qu’elle devrait faire pour assurer droits, gîte, couvert, services et espoirs à tout le monde. Parce qu’elle ne le fait pas, on ne peut lui reconnaître le droit moral ABSOLU de sévir contre ceux qui transgressent la loi, puisqu’il en est qui ne le font que pour en pallier les criantes injustices.
 
Le mot-clef, ici, est “absolument”. Aussi longtemps que les conditions sont telles que la société et ses lois ne sont pas perçues comme absolument justes, le droit moral absolu pour une société de faire respecter ses lois est remis en question et cède la place à une casuistique. Nul ne sachant plus très bien si chapardeurs, fraudeurs d’impôts, travailleurs au noir et contestataires n’ont pas le bon droit de leur côté, chacun s’arroge le droit de décider au cas par cas du soutien qu’il doit accorder à la loi.
 
Comment intervenir si on ne sait plus qui a tort, de celui qui s’enfuit ou de celui qui le pourchasse ? Que ce dernier, d’ailleurs, porte ou non un uniforme. Quand on entre dans le champ de la casuistique, on ne peut attendre du citoyen le soutien inconditionnel de la loi. Il en prend et il en laisse. La première lézarde dans les assises de la loi, c’est l’iniquité de la société qui transparaît dans la misère qu’elle crée.
 
Il y a une deuxième lézarde : l’ingérence indue de la loi dans des domaines où elle apparaît si bête qu’on ne peut que penser qu’elle sert des intérêts sordides. La population accueille avec une immense tolérance les écarts à toutes les prohibitions qui voudraient interdire à des adultes des choix qui ne concernent qu’eux. On ne peut respecter une loi qui s’attaque en priorité à la culture du pavot plutôt qu’au viol des enfants.
 
Pour que renaisse un soutien inconditionnel de la loi, il faudrait que les lois expriment une volonté collective de justice conforme à la morale des citoyens. Il faudrait d’abord que le crime soit toujours perçu comme odieux, mais il faudrait aussi que la loi, se bornant à interdire ce qui porte atteinte aux droits et à la liberté, ne se discrédite plus en consacrant la plus grande partie de ses ressources à imposer des prohibitions futiles.
 
La population a mauvaise conscience et ne soutient plus la loi. Parce qu’elle ne la soutient plus, la sécurité publique semble devenir la seule responsabilité des professionnels de la police et du droit, ce qui fait peu à peu de ceux-ci des éléments étrangers dans le corps social. Des greffons que ce corps rejette. Cette absence de complicité entre les citoyens ordinaires et ceux qui doivent assurer l’ordre pose obstacle à la délation.
 
Elle est aussi le premier pas vers la fin de la démocratie. La population doute de la capacité - et de la volonté même - de l’État de faire respecter la justice. Pourquoi ceux dont c’est le rôle de protéger la société, résisteraient-ils à la tentation de la corruption, quand le système qui régit la société semble gérer une opération de rapine institutionnalisée ?
 
Si ceux dont c’est la mission de maintenir la sécurité publique ne peuvent plus avoir la conviction d’être du côté du bien, pourquoi ne participeraient-ils pas à la curée en utilisant le pouvoir dont ils disposent ? Dans l’imaginaire populaire, les politiciens deviennent corrompus, les gestionnaires vénaux, les policiers pourris et ce n’est plus de la société que vient la protection : la justice est trop lente et trop faible.
 
Cela conduit à la recherche de solutions de rechanges : port d’armes, gardes privés, villes murées. Les modèles d’imitation changent. Les héros de la télévision sont les justiciers privés : les policiers et militaires qui défient le système et font triompher la justice MALGRÉ les ordres reçus. Cela conduit aussi à une mutation des valeurs, celles-ci s’accommodant d’une nouvelle réalité qui n’est plus tout à fait celle d’un État de droit.
 
Une part croissante de la population, aujourd’hui, ne fait plus confiance à la police ni aux tribunaux. Il n’existe donc plus de solidarité active contre les éléments criminels dynamiques, gangs et mafias de tout genre, pour qui le désordre est une opportunité. L’État de droit n’est plus soutenu que du bout des lèvres et, sans nous en rendre compte, nous allons ainsi droit vers un dilemme entre fascisme et anarchie.
 
C’est dans ce contexte que s’inscrit le refus de la délation. La réaction de la population dans l’Essonne nous montrera où nous en sommes sur le plan de la bonne conscience. Or, soyons lucides. Sans cette bonne conscience, l’insurrection est arrivée. Elle est là, passive... Elle n’attend que le déclencheur pour s’activer.
 
Pierre JC Allard
 
 


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43 réactions à cet article    


  • Allain Jules Allain Jules 21 septembre 2009 16:54

    Une vraie catastrophe s’il en est.

    Mais en réalité, quelle honte !

    Et ça ose critiquer la Chine.


    • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 00:46
      @ Allain Jules

       Il n’y a aucune ambiguïté à ne pas dire le contraire de ce que l’on ne dit pas smiley

       PJCA

    • Ungh Ungh 21 septembre 2009 17:37

      C’est, à mon avis, à la fois morale et au-delà. La situation est, en partie, la résultante du contexte socio-économique lié à la mondialisation.

      La légitimité de la Loi ne vaut que si elle provient d’élus du peuple qui travaille pour ce dernier et non contre lui. Le citoyen, en république, est un acteur de cette chose publique. Si il est dépossédé de cette dernière, il ne lui tourne le dos. Voilà, la république, le mot est lâché ...

      Dans un contexte mondialisé, pour un citoyen français :

      Quelle est la légitimité des ONG de type FMI, OMS, AIEA, Codex Alimentarus, etc ? Qui les a élu ?

      Quelle est la légitimité du gouvernement de Bruxelles sachant que 80% de nos textes viennent de là bas ? Qui sont les commissaires, comment sont-ils élus ?

      Que dire de commissions parlementaires où tous les francs-maçons sont auditionnés sur les lois bio-éthiques ?

      Que reste-t-il de la chose publique qui s’effrite jours après jours sous le coup de privatisations ?

      Les débats à l’assemblée sont pitoyables et malgré une opinion publique hostile, les lois passent ... OGM, Hadopi, privatisations, sans compter le référendum sur le traité constitutionnel qui n’est autre qu’un hold-up. Allez donc vous faire foutre petit peuple ( France d’en haut, France d’en bas, tout ça ). Et depuis quand change-t-on une constitution sans référendum ?!

      Enfin, la loi ne pond plus que de l’interdit et glisse vers la présomption de culpabilité. ( cf Hadopi 1 et 2 dernièrement )

      La république agonise tous les jours un peu plus sous couvert de démocratie et malgré la masse infernale d’informations futiles, le citoyens lambda le sent bien. Dépossédé du bien public, il fait bien le distinguo entre répression et justice. Alors, pourquoi participerait-il à la mascarade ?


      • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 00:48

        @ Ungh : Oui. Mais vous élargissez le débat. Attention de ne pas le diluer, sans quoi il sera reporté sine die


         PJCA

      • Senatus populusque (Courouve) Claude Courouve 21 septembre 2009 17:46

        Pour être complet, il faudrait tenir compte d’un phénomène nouveau, celui des représailles communautaires contre les victimes qui déposent plainte.


        • Ungh Ungh 21 septembre 2009 19:04

          Des personnalités comme Anne-Marie Le Pourhiet essayent de lutter contre ce genre de dérives, mais ça ne va pas tenir bien longtemps ... ( article ou video, très agréable à écouter la leçon qu’elle inflige aux parlementaires )

          Mais cela ne reste qu’un symptôme parmi tant d’autre, il y aurait bien d’autre aspects à envisager.


        • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 00:52

          @ CC. Oui. Un élément-clef et qui n’est controlé, justement, que quand la masse est spontanément du côté de la justice, que celle-ci soit ou non déjà devenue « la loi ». Pensez à la scene du film Vendetta .


          PJCA

        • Francis, agnotologue JL 22 septembre 2009 09:12

          @ Ungh : en effet, excellente Mme Le Pourhiet. Grand bravo à elle.

          Avez-vous noté la tête que faisait Mme Taubira, que je respecte au demeurant, qui entendait qualifier sa loi, entre autres lois, de neutron législatif ?

          Vidéo très roborative, à consommer sans modération.


        • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 00:54

          # Le furtif J’y retourne dans un instant me rendre compte de visu. Que la LRI soit avec nous.


           PJCA

        • Francis, agnotologue JL 22 septembre 2009 08:57

          « Perso je connais un forum dont la base du fonctionnement est la dénonciation . »

          C’est une obsession furtive, ou bien du f-ocultisme ?


        • Internaute Internaute 21 septembre 2009 19:35

          Dénoncer, mais vous n’y êtes pas !

          Celui qui se porte témoin à charge dans un procès voit l’avocat d’en face communiquer ses nom et adresse au criminel en cours d’inculpation.

          Celui qui dénonce un djeune se voit immédiatement traité de raciste par le policier, le juge, le journaliste et le député.

          Celui qui ose de défendre se voit inculpé pour coups et blessures contre le criminel qui est rentré chez lui par effraction et l’a menacé d’un pistolet. Celui qui ose défendre une autre personne qui se fait attaquer,... alors là j’ose même pas y penser.

          D’une manière générale, le citoyen est infantilisé à un point tel qu’on est traité comme des véritables bébés. Tout acte de la vie courante devient dangerositeux selon les journalistes. Maintenant la ceuillette des bolets ne doit se faire qu’accompagné par un spécialiste ayant suivi une formation et tout est à l’avenant.

          Dans ce contexte, qui va prendre le risque de dénoncer ?


          • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 01:01

            On n’a pas demandé des propositions pour rendre cette politique efficace. Je me borne ici à constater qu’il y a aura réticence, parce que la bonne conscience n’est pas là, et vous ajoutez, à raison, que le pouvoir qui n’est pas très sympathique n’assure même pas la sécurité des citoyens qui se risqueraient malgré tout à prendre fait et cause pour la légalité... C’est doublement perdu.


            PJCA

          • playeur 21 septembre 2009 20:46

            bonjour ,


            y’a dénoncer et dénoncer !

            J’ai déjà opter pour la délation , un enfant battue (18 mois, bras cassé , mâchoire fracturé ) j’ai passé une soirée chez les parents ,prit a part leurs version ne tenez pas la route j ai appeler les flics.

            Après dénoncer le dealer en bas de mon immeuble , je ne suis pas la polices , je ne suis pas payer pour rétablir de l’ordre , je n’est pas a faire le sale boulot .( et surtout je ne vais pas prendre le risque )

            je trouve même que ces un peut ce lavé les mains de la part de la polices , on attend tranquille qu’un voisin dénonce , plus d’investigation , d’enquête aurait’ ils peur des représailles ?

            • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 01:09

              @ Playeur : C’est exactement la position que je soutiens. Je dénoncerais un crime crapuleux, mais certainement pas un crime sans victime autre que consentante, dont le trafic de drogue est le meilleur exemple. Je pourrais penser à dire que je ne le ferais pas, même si je pouvais le faire sans aucun risque, mais je ne le dirai pas sans m’être assuré que cette opinion peut être émise sans constituer un délit.


              PJCA

            • moebius 21 septembre 2009 21:19

              si je filme une bavure policiére et si j’envoie la vidéo sur son site, c’est aussi de la délation ?


              • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 01:10

                @ Moebius : vous voulez joindre l’agréable à l’utile ?


                 PJCA

              • moebius 21 septembre 2009 21:21

                est ce que la délation par émail c’est pire que par téléphone ?


                • Francis, agnotologue JL 21 septembre 2009 21:24

                  Bonjour JPCA, bonne analyse, j’y souscris. Vous dites : « nous allons ainsi droit vers un dilemme entre fascisme et anarchie. » En effet, mais n’est-ce pas un peu bonnet blanc blanc bonnet ? Puisque l’anarchie c’est la porte ouvertes aux fascistes amateurs en quelque sorte.

                  C’est dans cet esprit que j’ai écrit sur le fil voisin (par le sujet) :

                  En appeler à la délation, le Pouvoir met les citoyens dans l’obligation de prendre parti, soit de la docilité et la soumission, soit de la complicité avec les voyoux au nom de ce que celui « qui ne dit mot consent ». C’est ainsi que ls voyoux le percevront.

                  Il met les citoyens entre le marteau des délinquants et l’enclume de la force publique. Il prend les citoyens en otage.

                  Ces procédés relèvent du totalitarisme.


                  • Francis, agnotologue JL 21 septembre 2009 21:24

                    Mais, vous avez raison, le terme de fascisme est plus approprié.


                  • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 01:13

                    JL 


                     Votre analyse rejoint parfaitement la mienne... et vice versa

                    PJCA

                  • Francis, agnotologue JL 22 septembre 2009 08:17

                    @ PJCA : pour être plus précis, j’ajoute que le fascisme, cette caratéristique commune à un certain pouvoir et aux voyoux explique beaucoup, beaucoup de choses.


                  • Francis, agnotologue JL 22 septembre 2009 08:21

                    C’est mal dit et je m’en excuse.

                    Ce n’est pas le fascime qui explique les accointances ni la convergence, mais la communauté, le partage de ce trait de caractère. Vous m’aviez compris.


                  • Radix Radix 21 septembre 2009 21:28

                    Bonsoir

                    Comme vôtre article porte sur le même sujet que le sondage d’Agoravox nous allons pouvoir le commenter en direct !

                    Nous avons donc :

                    C’est inacceptable et relève d’une police d’une autre époque 58.4% C’est dangereux car il y aura des abus 21.4% Ce sera inefficace 3.5% Bonne idée, il faut vivre avec son temps 3.8% Très bonne idée, à généraliser dans tout le pays 12.8%
                    58,4% de gens raisonnables, 21,4% de faux culs qui trouvent l’idée séduisante mais faudrait pas que çà dérape (traduisez : faudrait pas qu’on me dénonce aux impôts !), 3,5% de mecs qui ont voter mais qui s’en branlent, 3,8% qui ont déjà rédigé leur premier mail au commissariat et enfin 12,8% de membres de l’UMP !

                    Radix

                    • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 01:20

                      Je m’inscrirais dans la case : « Ce sera inefficace ». La délation n’est efficace que si elle est spontanée et repose sur un soutien à la loi. Elle l’est contre les violeurs d’enfants, elle ne l’est pas contre les auteurs de crimes dont l’odieux n’est pas très largement reconnu.


                      PJCA



                    • lord_volde lord_volde 22 septembre 2009 01:22

                      @ JC Alard

                      J’aime bien ta manière de glisser du thème relatif à la délation à celui de l’équité de la loi !
                      Les arguments que tu y développes sont apparemment pertinents et convaincants. L’institution de la délation est un habile moyen pour séparer les français en diverses franges. La première, majoritaire (la fraude n’est-elle pas un sport individuel commun aux Français ce que la corruption est un sport universel commun aux élites) prendra de la distance avec ce procédé insane, la seconde balance entre le oui et le non en fonction des intérêts qu’elle défend et la dernière acquiesce en réclamant plus de sévérité. 
                      Diviser pour mieux régner et occuper les faiblesses par un nouveau jeu du crique imaginé par le César aux semelles compensées. 
                      Je n’acquitte plus la redevance TV et pour ce faire, je fraude en cochant la case : je ne dispose pas de TV. Au lieu de dénoncer nos voisins présumés fraudeurs, nous devrions plutôt militer pour l’institution d’une désobeissance civile contre les lois scélérats, les bas salaires, la cherté de la vie, la hausse des pirx et des taxes diverses, la diminution qualitative des proragmmes scolaires, la TVA injuste et inéquitable, les salaires indécents, les possessions patrimoniales et capitalistiques d’un niveau insupportable qui rendent caduque l’idée de fraternité et d’égalité... 


                      • Francis, agnotologue JL 22 septembre 2009 08:30

                        @ Lord_volde, si je suis d’accord avec votre argumentation, en revanche je ne crois pas que la taxe télé soit assimilable à une loi scélérate. Mais en vertu de mes convictions, je me dois de respecter les votres. Et parce que votre « crime » est bénin, je ne vous dénoncerai pas. smiley

                        Ceci dit, un bon citoyen - il y en a de moins en moins, le pouvoir aurat-il les citoyens qu’il mérite ? - est fier de payer ses impôts.

                        Le pouvoir aurait-il les citoyens qu’il mérite ?

                        « J’apprends que le gouvernement estime que le peuple a ’trahi la confiance du régime’ et ’devra travailler dur pour regagner la confiance des autorités’. Dans ce cas, ne serait-il pas plus simple pour le gouvernement de dissoudre le peuple et d’en élire un autre ? (Berthold Brecht)


                      • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 01:43

                        Je suis bien d’accord avec et j’ai prédit que la désobéissance civile serait générale contre HADOPI. Je pense qu’elle pourrait être universelle et mener à la chute du gouvernement et même de l’État, si la crise actuelle s’aggrave et que le citoyen passe un certain seuil de mécontentement


                         Je ne pense pas que le citoyen ait atteint ce seuil de mécontentement, mais il a certes atteint celui où il ne croit pas qu’il doive prendre la défense inconditionnelle de la loi, ce qui serait la condition d’une dénonciation efficace et généralisée. Donc, cette initiative va simplement mettre en lumière le hiatus profond entre la morale citoyenne et la loi. Comme « collaborer » est une riche idée en soi, mais ça dépend avec qui et pour quoi...

                        Il y a bien des dossiers en marche...



                        PJCA


                        • lord_volde lord_volde 22 septembre 2009 01:54

                          Sorry pour avoir écorché ton nom J.C Allard, mais un bug curieux modifie ou retranche des lettres à mon texte posté.
                          La désobéissance civile est le seul acte civique et citoyen qui reste à la disposition des opprimés et des laisser pour compte. La répression qui s’en suivra sera la goutte d’eau qui fera déborder le vase de la révolution à venir. On peut rebâtir la société sans les riches car la terre est fertile et le travail ne manquera pas.
                          Bien à toi. 


                          • Gaëtan Pelletier Gaëtan Pelletier 22 septembre 2009 07:05

                            La semaine dernière on nous a livré une pizza avec une fausse facture. On connaît le truc : ils en vendent des bidons partout.
                            En plus, on y colle les taxes du Québec et du Canada. Dans les poches de la pizzéria...
                            J’ai pensé à « déléter » la pizzéria, mais c’est la meilleure dans le coin.
                            Voilà qu’une « entreprise » - ce pourrait être le plombier ou l’électricien - engouffre les taxes en plus du produit.
                            On dérive...
                            Et, étant donné, que je joue le jeu, je double la perte...
                            J’ai décidé de « déléter » le gouvernement.
                            Pourquoi ne pas imposer une facturation avec étiquettes produite par le gouvernement ?
                            Quand j’y pense, j’entends le dollar glisser et tictacter dans un cochon de porcelaine de Chine.
                            C’est le supplice de la goutte d’eau, version métallisée...
                            Si vous me réglez ce problème, M. Allard, je vous paye 50% cash et 50% en de la facturation réelle.
                             smiley


                            • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 13:23

                              @ GP : Pour l’explication du rêve. L’anarchie, en effet, c’est bien « to delete » le gouvernement... Les dollars qui font tictac, c’est chez les pharmaceutiques qu’ils tombent et le petit cochon est l’emblème de la grippe que vous savez smiley


                              PJCA

                            • Annie 22 septembre 2009 09:42

                              Je suis un peu étonnée par le tour qu’a pris cette conversation. Si au départ, j’avais tendance à adhérer à l’article, je me demande maintenant si finalement l’iniquité de la loi n’est pas uniquement utilisée comme prétexte pour se soustraire aux lois qui ne devraient s’appliquer qu’aux autres. Un peu comme l’automobilisme qui ne respecte pas les limites de vitesse parce que c’est un bon conducteur. Il semblerait que chacun a ses propres valeurs pour décider ce qui constitue un délit. Même dans l’exemple de trafic de drogue, que feriez-vous si cette victime consentante était votre fils ou votre fille ? Est-ce pour cela que la dénonciation (que je n’approuve pas spécialement si elle est institutionnalisée) est-elle aussi décriée, parce que nous serions tous amenés dans cette logique à enfreindre délibéremment certaines lois ? 


                              • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 13:14

                                @ Annie


                                « Il semblerait que chacun a ses propres valeurs pour décider ce qui constitue un délit »

                                C’est l’essence de mon argumentaire. Il n’y a plus consensus. Or, sans le consensus qui confère la légitimité, la dénonciation ne se justifie plus que par des critères personnels et on est toujours un délateur pour quelqu’un. Ainsi, je vois comme un mouchard celui qui dénonce son voisin consommateur de marijuana. Quand on aura rétabli le consensus, on dénoncera fièrement... 

                                Quant au cas concret auquel vous faites allusion, NON je n’aurais pas dénoncé le « pusher » de mes enfants adultes et consentants. 


                                Pierre JC Allard
                                 



                              • Hermione Hermione 22 septembre 2009 11:03

                                J’aime beaucoup cet article, tout comme l’argumentaire qui l’accompagne dans la discussion. Comme vous Pierre JC et Lord Volde, je pense que la seule chose qui puisse être bénéfique à l’heure actuelle, c’est une vraie désobéissance civile et donc civique.

                                Cependant (et là, c’est probablement mon réalisme parfois négativiste... attention ! interdit de dire négationniste lol), je crains que cette désobéissance ne se fasse pas ou peu. Ce qui fonctionne actuellement et cela nos politiques l’ont bien compris, c’est la peur. La délation est souvent une conséquence de la peur. C’est une manifestation du faible réfugié dans une notion totalement manichéenne du bien et du mal : « c’est mal, donc, j’ai le droit de dénoncer » pensent souvent ceux qui ne lèveront jamais le petit doigt pour réagir.
                                Malgré tout, j’ose espérer me tromper.

                                @ Annie : bien que n’étant pas juriste, je crois que la loi n’est qu’un cadre et qu’à partir de là, chaque cas peut s’adapter ou se se dégager du carcan. Les puristes (et juristes) me reprendront si je me trompe, mais les jurisprudences sont bien des évolutions, adaptations et contournements de certaines lois par rapport à des contextes bien spécifiques. Vous dites que chacun a ses propres valeurs pour décider ce qui constitue un délit ; et bien justement ! pour cette simple raison, la délation institutionnelle ne doit pas exister. J’irai même plus loin, toute délation doit être regarder avec d’infimes précautions et j’aurais tendance à me méfier d’avantage du délateur (pour moi, une personne faible qui se réfugie derrière des faux principes moraux) que du dénoncé.


                                • Annie 22 septembre 2009 11:26

                                  @Hermione,
                                  C’est un point que je n’ai pas développé, mais qui était présent dans mon esprit. Effectivement la loi n’est pas gravée dans la pierre, elle est fluide et doit évoluer, mais je ne crois pas qu’elle puisse donner lieu à des interprétations personnelles. En cela je suis tout à fait favorable à la désobéissance civile, mais elle doit aller dans le sens du bien collectif ou dans le sens d’une société idéale à laquelle la majorité aspire, et non pas promouvoir des intérêts particuliers.


                                • Guil 22 septembre 2009 13:42

                                  Sauf que la majorité peut se tromper, on l’a vu des tas de fois dans l’histoire... La désobeïssance civile est légitime si celui qui la réalise le fait au nom d’un idéal auquel il croit lui même sincèrement, même si son idée n’est pas majoritaire, même si en fait il se trompe sans le savoir ou sans s’en rendre compte. C’est la sincérité de la démarche qui en fait sa légitimité et non pas l’idéal qu’elle porte ni le nombre de personnes qui y adhèrent.


                                • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 14:55

                                  @ Hermione : 


                                  il y a un problème d’hystérèse. La loi tend à obéir à ses précédents. En droit anglo saxon, elle est même obligée de le faire ( stare decisis). Dans une société où les circonstances et la morale évoluent rapidement, on est vite en porte à faux et on trouve des excuses pour s’adapter (casuistique). En droit civil et commercial, c’est une bonne chose


                                  En droit pénal, ce n’est pas un avantage si la loi devient floue et ne répond plus aux principes moraux de tous. Il faut recréer un consensus. Il faut remettre les pendules à l’heure... En attendant qu’elles le soient, la dénonciation/délation est un outil dangereux...

                                  Pierre JC Allard


                                • Annie 22 septembre 2009 14:56

                                  Sûr, mais si je décide de ne pas payer la redevance télé, je peux appeler cela de la désobéissance civile, mais je vois mal en quoi elle est légitime, même si je suis sincère et surtout en quoi elle va changer les choses. 


                                • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 14:59

                                  @ Gull L’Individu doit obéir à sa conscience, mais l’État doit obéir à la loi qui elle même doit exprimer les principes moraux qui font consensus. C’est le dilemme d’Antigone.


                                  PJCA

                                • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 15:20

                                  @ Annie : S’il y a une loi et qu’une large majorité de la population juge qu’elle est inique, ne pas la respecter est une action efficace pour la justice. C’est aussi un acte révolutionnaire. C’est un acte qui est justifié uniquement si vous voulez contester et si nécessaire abattre la société au nom du principe que vous défendez. Ce n’est pas une décision à prendre à la légère. 


                                  Que le principe en cause en vaille ou non la peine, c’est justement le consensus social, dans une démocratie, qui en bout de piste en décide, dans le cadre d’un contrat social qui a lui même fait l’objet d’un consensus fondateur. La désobéissance civile a sa place quand les décisions de l’État s"écartent de ces consensus.

                                  Son opportunité est à débattre, car c’est scier la branche sur laquelle nous sommes assis. La désobéissance civile doit soutenir un projet ; autrement, elle ne conduit qu’a la confusion. Quant à son efficacité, toutefois, n’en doutez pas : la société est devenue si complexe qu’elle n’a aucune chance de survivre à une contestation générale. 


                                  PJCA

                                   

                                • domdom94 22 septembre 2009 14:21

                                  « Peut-il y avoir une police efficace sans informateur ? » Malheureusement les voyoux des quartiers comme tu dit, sont connus et reconnus par la police ... Pas besoin de délation.
                                  Le problème vient surtout de la justice qui ne punis plus les aggressions subits par des personnes vivants dans ses quartiers donc cette loi est sans intêrets dans l’exemple que tu cites. 


                                • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 22 septembre 2009 14:36

                                  @ Pasou : transmettre une information à la police est une initiative que doit prendre le citoyen qui respecte la loi - on revient à la notion de loi "respectable et qui fait consensus - et elle DEVRAIT être anonyme, car la personnalité de celui qui informe ne devrait pas biaiser l’évaluation objective de l’information. Une société doit le prévoir. (Voir section 1.2 alinéa d) du texte préliminaire en lien)


                                  http://nouvellesociete.wordpress.com/2008/09/10/une-societe-branchee/

                                  Cela dit, une information anonyme n’a de valeur que si elle est corroborée, 10 fois plutôt qu’une, et si la police mène scrupuleusement ses enquêtes. La dénonciation est autre chose. Elle suppose que le dénonciateur s’identifie et soit prêt à témoigner. C’est à ce palier qu’il faut assurer une protection et VALORISER socialement le geste. Mais cette valorisation, je le répète, n’est possible que si la loi fait consensus. Ce n’est pas le cas, loin de là !


                                  PJCA
                                   

                                  • ASINUS 22 septembre 2009 16:02

                                    yep les cas de conscience c est beau comme l antique ! pendant que vous discourez sur le sexe des anges nos vieux nos gosses se font tabasser racketer , l etat baisse les bras
                                    baste laissez nous monter des milices quelques cailleras gigotant aux lampadaires
                                    calmeront les ardeurs de la majorité d entre eux pour les recalcitrant un peu de plomb.

                                    ALALA le vilain faschiste il veut punir des chtite povres victimes de la société
                                    société de merde qui eduque soigne rmise ces chtites victimes qui seraient tellement
                                    plus heureux dans leurs pays d origine .



                                    eho les gentils ! les intelligents  les barbares sont déja dans la ville !!!


                                    • jeananto 22 septembre 2009 19:52

                                      Il est possible de trouver des points positifs a cette mesure en cherchant beaucoup et en niant l’histoire. N’oublions pas l’homme et ce qu’il fera de telles lois. Je ne vous le souhaite pas mais imaginez que vous soyez mis en garde à vu pendant 24, 36 ou 48 heures a cause d’une délation anonyme. 

                                      Que penseront les « autres » lorsque vous sortirez de cette garde vu même en ayant été blanchi ?

                                      En disant les « autres » je pense à votre employeur, vos proches, vos amis, vos voisins ... quelles conséquences pour vous ? licenciement, divorce, mise à l’écart, voir agression ...

                                      Comment vous sentirez vous si pendant votre interrogatoire votre nom apparait dans la presse, même blanchis ?

                                      Qui réparera cela si cela est encore possible ? votre délateur étant anonyme

                                      Il n’existe de bonne délation anonyme .... rappelons nous ce qui se passait dans l’URSS de Staline, ou au temps du maccarthysme. Pourquoi ensuite ne pas ouvrir des goulags pour faire bnne mesure

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