Et si l’affaire Zemmour faisait réfléchir ?
La LICRA vient de retirer sa plainte. Est-ce cela qui devrait faire réfléchir à ce que l’on peut appeler l’affaire Zemmour ? On se rend compte que le débat est extrêmement difficile car il se heurte à de multiples obstacles : sociologique, politique, humaniste, idéologique. Il touche à la vérité, sa nécessité ou non de l’exprimer, les conséquences de son expression, les conséquences de son interprétation ou de son utilisation, la liberté d’expression et la censure. Il y a aussi les jolis cœurs qui s’en servent en contre-sens pour s’auto-valoriser dans l’échelle de la morale et de la conscience, s’y plaçant en haut d’une échelle de Jacob qui leur ouvrirait le paradis avec une médaille au revers de leur veste tellement ils sont justes et bons.
Eric Zemmour se complaît dans un rôle de provocateur. Cela lui sied et lui plaît. Ce terme-même de provocateur lui sert aussi d’ouvre boîte (de Pandore) et de bouclier. C’est le fameux droit à briser les tabous, bien utile en campagne électorale.
A dire le vrai, Zemmour m’insupporte par ses raccourcis et ses facilités, par des raisonnements parfois simples et simplistes. Alors est-ce parce qu’un fait énoncé dans un certain contexte devient faux selon celui qui l’énonce ? Zemmour est accusé de racisme, convoqué au Figaro pour s’en expliquer avec un licenciement possible à la clé, et est tancé par le CSA dont un des membres, Rachid Arab, lui répond vertement tout en déformant les propos incriminés ce qui diminue terriblement la force de l’attaque. Je ne prends ici aucune précaution oratoire pour camoufler une certaine sympathie insidieuse pour le racisme ou un colonialisme tant sournois que flamboyant, ni ce qui est aberrant un néocolonialisme sur notre sol, si on peut m’autoriser cette expression pour parler de la France.
Zemmour s’explique dans une longue lettre à la Licra. Je vous la mets en fin de texte (source Marianne). C’est à la suite de cette lettre que la LiCRA accepte un débat et sans foute renonce à sa plainte. Ce renoncement devrait faire réfléchir. Mais dans d’autres articles comme ici à Rue89, certains parlent de la part de Zemmour d’un inconscient colonialiste, sorte de tarte à la crème qui évite tout débat par un argument d’autorité péremptoire qui va chercher des arguments chez les psychiatres.
Cette affaire pose quelques questions :
- ce que dit Zemmour est-il la vérité ?
- la vérité est-elle toujours bonne à dire ?
- que se cache derrière l’énoncé de la vérité ?
- que se cache derrière la censure de cette vérité ?
- quelles sont les causes de cette vérité ?
- ces causes rendent-elles moins vraies cette vérité ?
- la condamnation de cette vérité change-t-elle quelque chose à cette vérité et à ses causes ?
- que peut-on faire pour changer cette vérité ?
Les actes de violence sont innombrables en France, un score explosif. De ce fait il est d’une certitude d’airain que ceux qui la subissent sont une multitude et que ceux-ci, pour une grande majorité, en connaissent les auteurs. Cette information qui passe, semble-t-il, à l’as alors qu’elle est une évidence de La Palice, me désarçonne. En effet pourquoi cacher - par les médias et les politiques - un fait que la majeure partie de la population sait d’évidence. Ainsi, si la délinquance est majoritairement commise par une population jeune issue de l’immigration, la population le sait. Ce simple fait devrait amener une réflexion principale : quelle est la conséquence de cacher une vérité que tout un chacun constate ? La cache-t-on pour espérer que cela en changera la nature ? La cache-t-on pour espérer que cela empêchera le racisme de perdurer sinon de s’épanouir ?
Si le racisme naît de la violence subie, alors cacher la vérité ne changera rien car celui qui subit la violence, et pour peu que celle-ci soit répétée, en connaît l’origie. Cacher la vérité aura selon le caractère des conséquences différentes : soit cela mettra le racisme naissant sous le boisseau, soit au contraire cela l’exacerbera. Il en sera de même en cas d’énoncé des faits réels. Certains s’en serviront dans leur discours pour conforter leur racisme et d’autres sentant que le fait est reconnu cela l’éteindra. Tout n’est finalement qu’une notion de pourcentage. Cependant en analysant les choses taire ce qui est connu ne peut qu’être négatif au global.
La question primordiale est de savoir si taire la vérité améliore les choses et fait diminuer et la délinquance dans sa totalité et le pourcentage de délinquance de l’implication de la jeunesse issue de l’immigration. C’est là le vrai débat. Accuser de stigmatisation une population en disant que c’est un fait est une contre vérité. De plus tout dépend de la fréquence de ces affirmations. Le dire lors d’un débat où la police est accusée de tous les maux, comme du délit de sale gueule, accusation qui ne soulève aucune indignation, accusation qui est vraie mais ne l’est que pour une partie de la police, accusation que les mêmes qui interdisent l’autre vérité demandent de mettre au grand jour afin que cela cesse - un argument donc qui ne va que dans un sens, vrai pour la police, faux pour les délinquants - ces mêmes qui cherchent une excuse aux délinquants (justifiée au non on verra plus loin) n’en veulent aucune pour cette police qui si elle est confrontée - dans le cas où les statistiques le prouvent - en grande majorité par cette population incriminée réagit en être humain et donc se concentre d’évidence et naturellement sur la cause, fait entrer dans un débat idéologique qui ruine toute réflexion mélangeant cause et remède, vérité et efficacité.
Dire que la cause de la délinquance est la misère ne change en rien la vérité, ni ne résout le problème. Car la réponse de Zemmour l’était à une accusation : la police contrôle plus la jeunesse issue de l’immigration que le reste de la population. Alors on n’autorise pas Zemmour à donner une cause à ces contrôles, alors qu’on s’autorise à donner une cause à ce pourcentage élevé de délinquance chez les jeunes issus de l’immigration. Sans rentrer dans les détails la cause de la délinquance est sans doute en partie à cause de la pauvreté, mais ce n’est évidemment pas la seule. Car si cela est vrai à un début de cycle, dès que les suivants profitent des retombées de cette délinquance : voitures, argent facile, la pauvreté n’est plus là, ne restent que la violence et l’argent facile. Cela s’auto-entretient parce que les autres, les honnêtes, eux sont confrontés à un racisme ordinaire sur-développé par la délinquance des voyous. Ces problèmes surmultipliés des uns servent de prétextes à ceux qui profitent de leur violence. On a deux mondes en fait, dont un subit la double peine : innocent et mis à l’écart, alors que les autres voyous et délinquants vivent dans la violence et l’opulence, ces derniers étant, en fin de compte excusés et parfois soutenus par de bonnes âmes qui se servent assez honteusement de la misère de ceux qui justement subissent la double peine : les honnêtes.
Quels sont les remèdes potentiels ? On ne peut pas agir que d’un côté (pauvreté ou délinquance) d’autant que nous sommes dans un cercle vicieux (et un cercle n’a pas de côté en plus) : la violence entraîne une réaction souvent disproportionnée d’une police exaspérée par des provocations (qui peut nier les caillassages ?) et cette réaction sert de prétexte à ces voyous qui se sentent soutenus par de bien-pensants ne stigmatisant que leur pauvreté (fausse pour nombre d’entre eux) mère de tous les vices.
Selon moi il y a les voies à emprunter :
1- le respect absolu des lois (pour peu qu’ont les rendent cohérentes, adaptées et non surnuméraires comme aujourd’hui) par la police
2- le respect absolu des formes sans violences, sans mépris. La police n’est pas là pour juger mais pour arrêter un délinquant. Sans lui demander d’admirer, et surtout pas d’accepter la violence, il faut lui demander une action ferme mais aussi sereine (hors cas de déchaînement de violence où la force est nécessaire) et respectueuse des formes et de l’humanité qui de ce fait ne laisse plus aucune prise à la critique. Quel que soit le ressenti, qui peut être justifié à la vue des violences commises, la police n’a pas pour fonction de se substituer à la justice. Si les deux, police et justice, sont séparées ce n’est pas pour rien.
3- casser le lien de subordination et d’excuse qu’il y a entre les délinquants et les pauvres qui leur servent de prétexte et de bouclier
4- bien évidemment lutter contre la pauvreté
5- dire la vérité car elle est sue en souterrain et cela ne peut qu’être négatif de la cacher, mais annoncer en même temps les actions pour en changer la nature
6- condamner les utilisations partisanes de cette vérité et non faire de mauvais procès à ceux qui ne l’utilisent pas de façon orientée car alors c’est le contraire qui se passe et on obtient un résultat inverse avec exacerbation des violences racistes sous prétexte de vouloir étouffer les voix qui s’expriment et de vouloir tuer la liberté d’expression.
Monsieur le Président,
Je fais suite à notre rencontre à l’instigation de mon avocat, Olivier PARDO. Cette rencontre nous a permis de nous rendre compte qu’il y avait bien eu un malentendu et une confusion non seulement dans la reprise de mes propos par les médias, mais également dans l’analyse qui a pu ensuite en être faite et qui a conduit à ce déchainement médiatique à mon encontre.
En effet, je n’ai jamais dit contrairement à ce qui a pu être colporté dans les médias que « tous les délinquants sont Arabes et noirs », mais que « la plupart des délinquants sont Arabes et noirs. »
Ma volonté n’a jamais été de stigmatiser « les noirs ou les arabes » comme des délinquants, mais si cette phrase, sortie de tout contexte, a pu heurter, je le regrette.
La mise en scène tout de gouaille cynique d’un Ardisson sur Canal +, qui prévient d’avance par un panneau comme dans les dessins animés de Tex Avery : « Attention, Zemmour dérape », et qui mime un effarement scandalisé d’autant plus surjoué qu’il est enregistré et inséré a posteriori, tandis que pendant l’émission, il avait pris un air patelin, pour me glisser à l’oreille : « tu as un rôle très important dans la société de dire les vérités qui dérangent...Ne t’inquiète pas, je te protégerai au montage... » Car si mes propos étaient si infâmes à ses yeux, que ne les a-t-il coupés au montage ?
D’autres sont allés plus loin. J’aurais déclaré : « tous les Arabes et noirs sont délinquants. » C’est ainsi que l’a pris - ou a voulu le comprendre- un membre éminent du CSA, Rachid Arhab, qui a rétorqué à la cantonade : « on peut être Arabe et membre du CSA ». Mais était-ce le sujet ? Des journalistes m’ont même demandé si j’avais voulu dire qu’ils « étaient délinquants parce qu’arabes et noirs ». Et ils se sont étonnés que je refuse de leur répondre.
Je n’ai bien entendu pas voulu dire tout cela. Je connais trop la souffrance réelle de mes compatriotes « Arabes et noirs », honnêtes travailleurs, parents intègres, qui se sentent « salis » par les exactions des bandes de jeunes gens qui ont la même origine qu’eux. Je le sais d’autant mieux qu’avec mon patronyme, je me souviens du temps pas si lointain - les années 70- où une bande de truands célèbres - les frères Zemour - défrayaient la chronique criminelle, la honte dans les yeux de mon grand-père ; et accessoirement, l’attente interminable dans les aéroports pour la vérification vétilleuse - et sans ordinateur- de mon identité. Mon grand-père souffrait en silence pour « son nom traîné dans la boue », mais il n’a jamais prétendu que nos homonymes n’étaient pas des brigands de grand chemin !
On a volontairement oublié que ma désormais fameuse phrase n’était qu’une réponse aux arguments développés par les autres intervenants selon laquelle « la police n’arrête que les Arabes et noirs ». Cette double « stigmatisation » - et de la police républicaine - et des « Arabes et noirs » ne choque personne. Les « Arabes et noirs » peuvent être distingués du reste « de la communauté nationale » s’ils sont héros ( le livre de Thuram exaltant les héros noirs) ou victimes. Dans tous les autres cas, il est infâme de les distinguer. Cette injonction universaliste conviendrait assez bien à mon tempérament assimilationniste. J’ai tendance à ne voir dans tous les Français que des enfants de la patrie, sans distinction de race ni de religion, comme dit le préambule de notre Constitution.
Mais voilà que l’on me reproche aussi cette position, que l’on juge désuète, très IIIème République, exhalant un fumet néo-colonialiste. Au nom du droit à la différence, de la modernité, on doit pouvoir exalter ses racines et l’enrichissement d’une société multiculturelle. Mais quand vous avez l’outrecuidance de montrer l’envers de ce décor riant, on redevient furieusement universaliste !
J’ai eu le malheur d’ajouter : c’est un fait ! J’aurais sans doute dû ajouter « malheureusement ». Je ne me réjouis ni pour eux ni pour la société française ; mais l’autruche n’est pas mon modèle. On me rétorque un peu facilement qu’il n’y a pas de statistiques ethniques pour prouver mes dires. Pourtant, devant une commission parlementaire du Sénat, Christian Delorme, surnommé « le curé des Minguettes », ne déclarait il pas : « en France, nous ne parvenons pas à dire certaines choses parfois pour des raisons louables. Il en est ainsi de la surdélinquance des jeunes issus de l’immigration qui a longtemps été niée, sous prétexte de ne pas stigmatiser. On a attendu que la réalité des quartiers, des commissariats, des tribunaux, des prisons, impose l’évidence de cette surreprésentation pour la reconnaître publiquement. Et encore, les politiques ne savent pas encore en parler. »
Il y a quelques années, une enquête commandée par le ministère de la justice, pour évaluer le nombre d’imans nécessaires, évaluait le pourcentage de « musulmans dans les prisons » entre 70 et 80%. En 2004, l’islamologue Farhad Khosrokhavar, dans un livre « L’islam dans les prisons ( Balland) confirmait ce chiffre. En 2007, dans un article du Point, qui avait eu accès aux synthèses de la Direction Centrale de la Sécurité Publique ( DCSP) et de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) on évaluait entre 60 et 70% des suspects répertoriés issus de l’immigration. Il y a près de dix ans, la commissaire Lucienne Bui Trong, chargée des violences urbaines à la direction centrale des RG relevait que 85% de leurs auteurs sont d’origine maghrébine. Dans un article du Monde, du 16 mars 2010, les rapports des RG sur les bandes violentes, établissaient que 87% étaient de nationalité française ; 67% d’origine maghrébine et 17% d’origine africaine. La « plupart » est donc, au regard de ces chiffres, le mot qui convient.
Mes contempteurs pourraient d’ailleurs me rétorquer que ces chiffres prouvent bien que les personnes issues de l’immigration sont défavorisées, puisque depuis Victor Hugo, on sait bien que c’est la misère qui crée la délinquance. On pourrait aussi rappeler que dans tous les pays d’immigration, les derniers arrivés donnent souvent les gros effectifs à la délinquance - Irlandais dans l’Amérique du XIXème siècle, Marocains dans l’Israël des années 50, Russes aujourd’hui. Ces arguments ne sont d’ailleurs pas sans fondement, mais on ne me les présente nullement. On exige seulement que je me taise.
On me reproche aussi de contester le principe de « discrimination ». Mais je continue de penser que le concept même de « discrimination » est dangereux, qu’il pousse à la délation et l’irresponsabilité. Depuis quand n’a-t-on plus le droit en France de contester le bien fondé d’une loi ? Cette question des discriminations est potentiellement explosive dans un pays égalitaire comme la France. Quand certains grands patrons déclarent qu’ils n’embaucheront plus désormais que « des gens issus de l’immigration, et en tout cas pas des mâles blancs », c’est aussi une discrimination, mais personne ne s’en soucie. C’est pour éviter ces querelles sans fin que j’explique que « la discrimination, c’est la vie », c’est à dire la liberté de choix. Il faut traiter les problèmes réels autrement. En tout cas, on peut en débattre dans un pays libre.
Il existe aujourd’hui une ambiance délétère dans le débat démocratique français. Le pays de Voltaire :« je ne suis pas d’accord avec vous mais je me battrai pour que vous puisiez le dire » devient le pays de Torquemada qui tue l’hérétique pour sauver son âme. Pourquoi les journalistes qui prétendent faire un portrait de moi, s’empressent ils de demander à mes employeurs s’ils me garderont leur confiance ? Il y a aujourd’hui en France une ambiance maccarthyste qui réclame « l’interdiction professionnelle » comme exutoire des dérapages. C’est ma mort sociale qui est réclamée.
Notre rencontre a eu le mérite d’ouvrir un dialogue qui je l’espère pourra se prolonger, hors de l’enceinte d’un tribunal.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l’assurance de mes sentiments distingués.
Eric ZEMMOUR
Vignette Zemmour (capture d’écran de Dailymotion prise sur Marianne2.fr)
158 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON