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Accueil du site > Tribune Libre > Syrie : « victoire » turque à la Pyrrhus ? Ou l’art de se retourner (...)
#10 des Tendances

Syrie : « victoire » turque à la Pyrrhus ? Ou l’art de se retourner un pavé américano-israélien sur les pieds !

 

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Dans l'espoir de s'approprier au moins une partie conséquente de la Syrie, la Turquie a fait le jeu des USA et d'Israël au Moyen-Orient.

Elle a délibérément profité de l'affaiblissement de la Résistance palestinienne, dont elle se présentait comme une sorte de « porte drapeau », mais qui n'était donc agité que par le vent de ses « bonnes paroles », et de l'affaiblissement concomitant de l'axe de la Résistance chiite sous les bombes israéliennes, pour tenter d'avancer brutalement ses divers pions en Syrie. Et cela la menait donc à une situation potentiellement conflictuelle avec la Russie, même si ce n'est pas, pour la plupart des observateurs, la contradiction essentielle de la région.

En réalité, « essentielle » ou non, c'est bien la contradiction clef, sous-jacente des autres, et qui a pour l'instant « dénoué », ou plutôt, renoué autrement, l'ensemble de la situation au Moyen-Orient.

Il est clair qu'avec le contrôle du détroit du Bosphore la Turquie est en mesure de poser des conditions à la Russie pour son accès le plus direct à la Méditerranée. La Russie n’a certainement aucune confiance dans la Turquie d’Erdogan mais elle la ménage donc, Bosphore oblige, il suffit de regarder la carte !

Ce qui explique la volonté russe de "négociations", sinon de réelle bonne entente, sur la présence turque en Syrie.

Dans le nouveau rapport de forces qui a émergé avec l'affaiblissement du Hezbollah, sinon de l'Iran également, sous les assauts israéliens, et malgré une Résistance héroïque, la Turquie était apparemment en mesure d'avancer ses pions sur le terrain syrien et c'est bien ce qu'elle entendait faire, au détriment du régime de Bachar el-Assad, mais sans forcément anticiper jusqu'à quel point une partie de ses pions étaient en fait entièrement sous contrôle américano-israélien.

Elle a donc allumé le feu d'une "victoire" qui lui échappe complètement ou presque, au profit de ses "amis" américano-israéliens.

Il est donc clair que de toute façon la Russie ne pouvait pas engager une guerre contre la Turquie, aussi bien en Mer Noire, pour le contrôle du Bosphore, évidemment, qu'en Syrie, donc, ce qui revenait au même, indirectement, sauf à avoir un rapport de forces écrasant, ce qu'elle n'avait pas, vu la nécessité de concentrer ses efforts militaires sur l'Ukraine.

Le seul enjeu réel restant, désormais, pour la Russie dans ce coin du monde, c'est l'avenir de ses bases militaires, et notamment navale, en Syrie. Actuellement, il est donc impossible à prévoir, mais il est évidemment possible, sinon même, probable, que la Russie a entrepris les tractations "discrètes", sinon secrètes, nécessaires pour "sauver les meubles" et ne pas disparaître complètement de la scène tragique moyen-orientale.

Les proxys "pro turcs" ont donc servi de "cheval de Troie", plus ou moins "à l'insu de leur plein gré", selon les cas, mais probablement très consciemment de la part du HTS, nouvelle "force dominante" de pacotille en Syrie, et qui ne tiendra que tant qu'elle restera utile à ses maîtres, l'impérialisme américain et son proxy israélien. 

Les actuels et concomitants bombardements israéliens massifs sur Damas et le reste de la Syrie sont évidemment d'abord là pour faire comprendre à son proxy HTS les limites de son "pouvoir délégué".

le HTS est ainsi l'inventeur d'une nouvelle catégorie, en devenant en quelque sorte un proxy au deuxième degré, un "proxy de proxy", même s'il en profite pour distendre, sinon couper, le cordon ombilical qui le relie encore à la Turquie !

Nul doute, néanmoins, que la Turquie tentera de conserver et d'étendre son contrôle sur les zones anciennement kurdes du nord syrien : ce sera éventuellement son "lot de consolation", si elle parvient à le pérenniser dans le dépeçage déjà en cours de la Syrie "libérée" !

Une des conditions de cette "pérennisation" pourrait bien être, dans un avenir proche, une sorte de "deal" entre la cession de cette région à la Turquie et la pérennisation désormais revendiquée de l'annexion israélienne du Golan et de sa récente nouvelle extension, à la "faveur" de la "libération de la Syrie" !

De leur côté de l'Euphrate, si on peut dire, Les proxys "kurdes" de l'impérialisme US, dans la zone Nord-Est, tenteront également, comme ils le font déjà, avec le soutient militaire de leurs "sponsors américains" habituels, de pérenniser cette zone qu'ils ont donc "séparé" de la grande Syrie originelle, alors qu'ils y sont en réalité des "travailleurs émigrés" embauchés comme supplétifs par les forces armées US, loin de leurs zones historiques en voie de "turquisation".

Et dans tout ça les rescapés de Daech et d'autres "terroristes dormants", anesthésiés sous Bachar, penseront certainement que l'heure du réveil a sonné pour eux aussi, et voudront donc essayer de se tailler quelques califats d'opérette néanmoins sanglante dans le cadavre de la Syrie.

Et tout ça, encore et surtout, sans oublier le caractère multiconfessionnel traditionnel de ce pays, en plus de son côté multiethnique.

Bref, sous la férule islamiste façon HTS, "l'heure de la liberté" est venue pour la Syrie : l'heure de "s'éclater", littéralement, hélas.

La fête risque donc d'être de courte durée...

Luniterre

 

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Syrie : "victoire" turque à la Pyrrhus ??? Ou l'art de se retourner un pavé américano-israélien sur les pieds !

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+ d'actu sur le sujet :

 

Damas, Syrie, "libération" sous les bombes israéliennes, nouvelle avancée colonialiste dans le Golan : quel avenir ?
 

 

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Avec 3 vidéos d'analyses géopolitiques pertinentes

 

 

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10 réactions à cet article    


  • Soucougnan Soucougnan 11 décembre 17:39

    Ce sont les déboires des Russes en Ukraine qui sont à l’origine de la chute Bachar Al-Assad. Épuisée sur le front ukrainien, la Russie a été incapable de sauver Al-Assad et a entraîné dans le désastre son allié iranien dont le Hezbollah avait été lui-même durement atteint par Israël. Maintenant la Russie essaye de discuter avec ceux qu’elle traitait de terroristes et bombardait il y a de cela à peine semaine. Avec la perte de ses bases en Syrie, conjuguée à forte probabilité de voir l’Occident faire main basse sur plus de 80% de l’Ukraine au terme d’un futur accord de paix, on peut dire que la Russie paye cher son échec en Ukraine. En 2022 quand la Russie lancé son invasion, il n’existait aucun risque de voir l’Ukraine entrer prochainement dans l’OTAN ou l’UE. Désormais l’Ukraine est pratiquement assurée de rentrer au moins dans l’UE. Cette intervention en Ukraine aura été pour la Russie un ratage total.


    • charlyposte charlyposte 11 décembre 17:51

      @Soucougnan
      J’adore trop ton humour...vraiment smiley


    • Soucougnan Soucougnan 11 décembre 18:39

      @charlyposte

      J’adore trop ton humour...vraiment

       
      Oh je peux faire mieux ! smiley

      La Russie à son meilleur, comme on l’aime ! Grâce à l’écrasante domination de son armée en Ukraine, la Russie qui a réussi à s’emparer de presque 20% du pays en l’espace de trois rapides petites années de guerre et qui ne laissera donc de l’Ukraine que les minuscules 80% qui restent aux Occidentaux, a pu vaillamment se porter au secours de son allié syrien Bachar Al-Assad, qu’elle a su ramener sans coup férir sur le territoire russe, lequel territoire russe est entièrement sous contrôle russe, enfin hormis Koursk dont la Russie n’avait de toute façon que faire. Et grâce à ces flamboyantes victoires russes en Ukraine et en Syrie, l’allié Iranien a pu ramener lui aussi le Hezbollah en toute quiétude au Liban vu qu’il n’avait plus que faire lui-même en Syrie. Des Syriens pillent l’ambassade iranienne et marchent sur les portraits d’Ali Khamenei mais c’est le témoignage d’un profond respect dans ces cultures où la chaussure et tout ce qui se trouve en dessous est synonyme de valeur et déférence.


    • Luniterre Luniterre 11 décembre 21:06

      @Soucougnan

      Faire encore mieux en humour, pourquoi pas, mais faire mieux en termes de réflexion, ça semble donc plus difficile pour vous…

       

      L’effondrement du régime Bachar vient pour l’essentiel de lui-même, incapable de relativiser sa « victoire » précédente, qui était loin d’être totale, et donc précisément, relative.

       

      Ce dont ses ennemis, eux, ont donc été capable de profiter.

       

      Une victoire relative nécessite de préparer la phase suivante de la guerre, inachevée, et non pas de se reposer sur des lauriers illusoires.

       

      En Ukraine, la lutte, mal engagée sur les bases erronées définies par l’ex-ministre de la Défense Choïgou, aurait pu tourner aussi mal, à l’automne 2022, avec l’effondrement du front de Kharkov, mais ça n’a pas été le cas, grace à quelques initiatives « subalternes » mal comprises au départ, mais qui ont sauvé la situation et arrêté le recul du front.

       

      La poche de « Koursk », qui n’a donc jamais atteint cette ville, est une autre défaite relative, mais pour l’instant, au-delà du fait d’avoir déjà été réduite de moitié, elle « mobilise », pour des raisons politiques évidentes, le « meilleur » des troupes ukrainiennes restantes, et donc incapable de freiner l’avance russe ailleurs, lente mais régulière, et qui a su tirer les leçons de ses échecs précédents.

       

      Le mieux serait évidemment que cette guerre se termine, mais si c’est sur un « Minsk 3 » qui ne fait que préluder à une nouvelle guerre dans quelques années, il vaut mieux aboutir à une solution radicale, dans un sens ou dans l’autre. C’est la question en débat en Russie, semble-t-il. Il n’est donc pas du tout certain que le « gel » du front sur une base plus ou moins « 80%/20% » soit finalement la solution prochainement négociée par la Russie.

       

      Contrairement à vos assertions concernant l’OTAN et l’UE, la guerre actuelle vient du refus de négociation sérieuse exprimé par Biden en 2021 lors de sa rencontre avec Poutine à Genève, que vous avez sans doute oubliée.

       

      C’est à partir de là que les « accords de Minsk 2 » ont cessé de faire illusion et que la guerre, sauf revirement diplomatique US, devenait inévitable.

       

      Luniterre



    • leypanou 11 décembre 21:57

      @Soucougnan
      Ce sont les déboires des Russes en Ukraine qui sont à l’origine de la chute Bachar Al-Assad  : pas du tout, les soldats syriens loyalistes ne voulaient plus se battre car ils en avaient assez de la situation économique désastreuse à cause de l’embargo ainsi que du vol du pétrole syrien par les États-Unis présents au Nord-Est avec les Kurdes plus la corruption, la Russie ne pouvait plus rien faire pour aider un régime moribond.


    • Matlemat Matlemat 11 décembre 22:25

      @Soucougnan
       Si le but était d’ouvrir un deuxième front contre la Russie en Syrie c’est apparemment loupé.
       Pour info quand un des belligérants reste maître du champ de bataille cela s’appelle pour lui une victoire et celui qui a reculé subit lui une défaite.


    • Matlemat Matlemat 11 décembre 22:27

      @Soucougnan
      « Désormais l’Ukraine est pratiquement assurée de rentrer au moins dans l’UE »

      Les Russes ne sont pas opposés à l’entrée de l’Ukraine dans l’UE, quand votre ex petite amie a un nouveau petit copain c’est à lui de payer le restaurant. 


    • Soucougnan Soucougnan 12 décembre 02:15

      @Luniterre

      L’effondrement du régime Bachar vient pour l’essentiel de lui-même

       
      Oh allons un peu de sérieux ! Le régime de Bashar Al-Assad ne tenait plus depuis longtemps que grâce aux soutiens conjugués de la Russie et de l’Iran et vu l’importance stratégique des bases syriennes pour la Russie, on se doute bien qu’elle ne s’est pas résignée à la chute d’Al-Assad de gaieté de cœur. Cela constitue un sérieux revers pour les Russes. J’ignore quelle garantie la Russie a pu obtenir de la très déloyale Turquie d’Erdogan, mais il ne fait aucun doute que si Poutine avait pu faire autrement, Al-Assad serait encore au pouvoir. 
       

      si c’est sur un « Minsk 3 » qui ne fait que préluder à une nouvelle guerre dans quelques années, il vaut mieux aboutir à une solution radicale

       
      Une solution radicale ! Si la Russie en est au point de ne même pas pouvoir récupérer Koursk, son propre territoire (! !!) sans se mettre en péril sur le front ukrainien, c’est que la Russie est réellement à bout de force et il n’y a du coup rien d’étonnant à ce que les Russes aient été incapables d’empêcher la chute d’Al-Assad. Alors quant à être capables d’imposer “une solution radicale” là, c’est carrément du délire...

      Si la Russie s’est opposée à l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN au point de s’engager dans une guerre, c’est parce que les Russes savaient leur zone d’influence gravement menacée d’encerclement par les puissances occidentales. Pour préserver leurs ambitions géopolitiques, les Russes étaient face à la nécessité absolue de maintenir l’Ukraine dans leur giron, c’en était même une question d’identité nationale pour eux. Or après trois années de lutte, la Russie va probablement devoir se résigner à laisser 80% de l’Ukraine rejoindre définitivement le camp occidental. Quand cela se produira, ce sera une défaite énorme pour la Russie. Les Russes n’ont pas lancé en Ukraine une guerre de conquête, même si c’est ce à quoi ils semblent présentement réduits. Ils se sont engagés dans une guerre pour préserver leur zone d’influence face aux avancées occidentales et face à la menace d’un encerclement stratégique. Or malheureusement pour la Russie, en dépit de ses efforts, l’Occident va bel et bien mettre la main sur l’Ukraine.


    • Soucougnan Soucougnan 12 décembre 02:25

      @Matlemat

      Les Russes ne sont pas opposés à l’entrée de l’Ukraine dans l’UE

       
      Et comment qu’ils y étaient opposés ! Ils étaient prêts à la guerre pour l’empêcher et d’ailleurs ils ont fait la guerre ! La Russie savait sa zone d’influence géopolitique menacée en Ukraine d’un encerclement stratégique par les puissances de l’OTAN, et avait fait du maintien de l’Ukraine dans son giron, non seulement une question d’identité nationale, mais de surcroît un cas de guerre. Malheureusement pour eux, il y a de bonnes chances à présent que l’Occident mette quand même la main sur 80% de l’Ukraine. Pour une défaite, c’en sera une !!!

    • Matlemat Matlemat 11 décembre 22:15

      Les Kurdes sont utilisés pour faire pression sur la Turquie. 

      Il s’agit de créer un tampon sunnite à la frontière turque avec le retour des réfugiés syriens de Turquie.

      On sent qu’Erdogan est plus docile vis à vis les USA depuis qu’il a levé son veto à l’entrée de la Suède dans l’OTAN , on ne sait pour quelle raison.

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