Merci Laurent pour votre article.
Je suis d’accord avec pas mal d’éléments de votre analyse à commencer
par la complémentarité entre médias traditionnels et médias citoyens.
Votre vision des choses correspond assez bien à la réalité d’AgoraVox
au jour d’aujourd’hui. J’en conviens avec vous, environ 9 mois après
son lancement, AgoraVox ne publie pas suffisamment d’éléments factuels
et inédits par rapport à ce que j’avais prévu. En revanche, nous avons
eu beaucoup d’analyse parfois de très haute qualité qui ont été même
reprises dans la presse.
Mais à mon avis ce n’est qu’une question de temps. D’une part, le
réseau des « capteurs » (les citoyens reporters) n’est pas encore
suffisamment étendu pour remonter régulièrement des faits inédits
(même si nous avons 2.600 rédacteurs inscrits, OhMyNews en Corée du
Sud en a plus de 40.000 !). D’autre part, la démocratisation des NTIC
n’est pas encore entièrement accomplie en France même si la
pénétration du haut débit est impressionnante et que les « outils » du
reporter citoyens se répandent de plus en plus (caméscope, portable
avec appareil photo ou caméra, ordinateurs portables...). Dans cette
logique nous venons aussi de lancer « AgoraVox Tv » :
http://www.agoravox.fr/video.php3
Bref, je pense qu’il faut que le « maillage » d’AgoraVox progresse et
que les outils de « capture » se démocratisent encore plus pour
qu’AgoraVox puisse sortir davantage d’informations inédites. Et
surtout que les citoyens commencent à comprendre qu’ils peuvent être
des reporters ou des capteurs d’informations pour un média citoyen. A
ce jour, je pense que 99% des français ne savent même pas ce qu’est un
média citoyen et donc ignorent qu’ils peuvent y contribuer. Cela dit,
nous avons déjà publié un certain nombre d’informations inédites ou
peu reprises dans la presse même si elles sont « noyées » au milieu
d’articles d’analyse ou d’opinion.
L’avenir nous dira si je me trompe ou pas, mais je pense réellement ce
que j’ai écrit dans la politique éditoriale, à savoir qu’un des
objectifs d’AgoraVox est de publier des actualités concernant des
évènements ou des faits objectifs, vérifiables et autant que possible
inédits.
Ainsi, contrairement à ce que vous dites, je pense qu’un média citoyen
peut « sortir » des informations que la presse traditionnelle ne donne
pas. Pour une raison très simple : aucune agence de presse ou aucun
média ne dispose d’un réseau de correspondants aussi étendu qu’un
réseau de citoyens. Aucune agence de presse ou aucun média ne peut
avoir un correspondant au pied de chaque immeuble....
En conclusion, je suis d’accord avec votre analyse sur l’état actuel
des médias citoyens et d’AgoraVox mais pas avec votre vision à terme.
Ainsi, en reprenant votre exemple, il est vrai que si aujourd’hui vous
publiez une info inédite sur une évènement qui a eu lieu dans la
région de Grasse on aura du mal à la vérifier si personne d’autre n’en
parle. Mais si le réseau des bloggeurs et des correspondants citoyens
s’étend et le maillage s’intensifie alors quelqu’un d’autre qui est
dans votre région pourrait facilement valider ou invalider votre
information. Sans parler des vérifications habituelles faites par les
rédacteurs et les veilleurs via Internet ou les croisements sur
l’auteur.
En ce qui concerne la vérification des informations soumises sur
AgoraVox elle s’effectue à trois niveaux. Elle est décrite d’une
manière assez détaillé dans la présentation du projet dont voici un
extrait : http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=61
"Cela dit, nous sommes conscients qu’une initiative comme AgoraVox
augmente les risques de désinformation, de déstabilisation, de
manipulation ou de propagation de rumeurs. Pour cette raison, nous
pensons qu’il est indispensable de disposer d’un comité de rédaction
d’un nouveau type qui puisse agir en tant que « filtre ». L’information
soumise est donc modérée pour éviter toute dérive politique ou
idéologique. Vu la spécificité d’AgoraVox le comité de rédaction n’est
pas calqué à l’identique sur le comité classique d’un journal. Pour
cette raison, il est constitué par certains rédacteurs indépendants
qui ont souhaité participer mais aussi par des experts en veille et
recherche d’information de la société Cybion. Tous les modérateurs
sont chargés de voter individuellement chaque article en fonction de
son actualité, de sa pertinence, et surtout de son originalité.
Mais au-delà des vérifications effectuées par les rédacteurs et les
veilleurs, AgoraVox prône un processus d’intelligence collective pour
fiabiliser les informations mises en ligne. Ce processus se base sur
les commentaires des lecteurs. Dés qu’un article est publié, tout
lecteur peut intervenir librement pour le commenter, le critiquer, le
compléter, l’enrichir ou le dénoncer. L’auteur et la rédaction peuvent
interagir ainsi avec les lecteurs afin de compléter et améliorer
l’article. Comme le dit le journaliste bloggeur Dan Gillmor, "mes
lecteurs sont souvent mieux informés que moi". Parfois, le comité de
rédaction décide de supprimer un article après certains commentaires
des lecteurs (notamment en cas de plagiat avéré). D’ailleurs, nous
encourageons vivement nos lecteurs qui ont un doute à l’exprimer
librement à la suite de chaque article. Souvent des lecteurs assidus
mènent des recherches et des investigations pour valider ou invalider
un article et il s’agit là d’excellentes initiatives que nous
encourageons vivement. L’apport informationnel de chaque article doit
être donc évalué dans le contexte des réactions qu’il a suscité."