Quelques remarques relatives au Manifeste du Parti Capitaliste Français.
Tout d’abord, le socialisme, du moins à l’origine et tel que je le
conçois (un peu) et le défends (un peu comme le fait un Michéa, par
exemple), est loin de se réduire à un système qui vise à parvenir à répartir équitablement ces
richesses que le capitalisme produit mais ne parvient pas à répartir
équitablement. Il est d’abord et surtout, sinon le refus général du
salariat, l’exigence d’un travail qui respect le besoin fondamental
d’enracinement de l’homme, et permet des relations sociales largement
fondées sur la dynamique du donner-recevoir. Ce qui n’exclut évidemment pas la possibilité de marchés.
Or vous remarquerez que cela est tout à fait compatible avec votre slogan : « Se libérer de l’obligation de travailler et, pour y parvenir, consentir à produire tous les efforts nécessaires ! », que vous qualifiez de Paradoxe Fondateur du Progrès, pour cet être humain [qui] demeure avant tout créatif, inventif, dynamique et continuera d’innover. Mais, librement cette fois !... Je
vous ferais également remarquer que la voie du socialisme des origines
n’allait guère dans le sens du Progrès libéral - et qu’il reste
d’ailleurs à démontrer que celui-ci corresponde (encore) à la voie
consensuelle au présent. Le salariat est toujours une forme d’esclavage,
mais il devient vraiment inhumain que dans la mesure où l’intéressé est
dévoré par la machine, l’usine, l’asservissement au logiciel, etc.
Je ferais aussi remarquer que l’idéal socialiste en question
s’accommode donc mal, a priori, avec la formation de gros capital,
industriel et autres, autrement dit de grosses entreprises, qui
déshumanisent, mais qui impliquent aussi la division plus stricte du
travail, donc le travail aliénant. Enfin, un peu plus accessoirement
(?), avec une grosse machine d’entreprise, on conçoit plus difficilement
que les travailleurs aient un contrôle sur la bestiole ; en tout cas,
division et planification des taches obligent, on se voit mal aller dans
le sens de la liberté du travail.
La lutte de
classes n’est pas tant une lutte pour le pognon et le confort ; la lutte
de classe, c’est aussi la « courte vue du technicien » qui, plutôt
libre dans son travail, ne peut se mettre à la place de celui qui
est essentiellement asservi par un travail qu’il ne contrôle ni ne
définit lui-même. Voilà aussi et surtout l’enjeu de « l’appropriation des moyens de production par le Prolétariat »
- je ne suis pas communiste, et ma vision du socialisme n’est
certainement pas celle d’un capitalisme d’État - ça, se serait
d’ailleurs plutôt votre programme...
Ainsi, si l’on tient compte des besoins humains, qui ne se réduisent
pas, loin de là, à la répartition de richesses, le problème est loin de
se résoudre par la redistribution équitable des dividendes. Je n’ai
évidemment rien, a priori, contre l’idée d’une large redistribution des
richesses et une grosse diminution des écarts de revenus, mais le
problème que je soulève ici est que le dividende universel en question
me paraît difficilement compatible avec la liberté du travail.
La centralisation des moyens de production
pose bien plus que le problème (sans doute contournable, oui, du moins
dans une vision statique) des revenus. En parlant simplement d’ « acquisition » des moyens de production par le Prolétariat, vous gardez le prolétariat et vous oubliez ou ne comprenez pas que le plus important est la propriété d’usage. Besoin fondamental sans le respect duquel il n’y a pas de système économique intrinsèquement Écologique, Anthropocentrique, Philanthropique et Équitable.
En pratique, pour ma part, voici en quelques mots la solution
générale que je propose (outre une organisation démocratique des
pouvoirs politiques au sens restreint). Toutes les formes d’entreprises
sont tolérées, de la coopérative à la grande entreprise avec forte
concentration de capital, mais toute forme d’impôt et de taxe sur les
entreprise est doublement pondérée, d’une part, par un facteur
proportionnel à l’écart type des salaires dans l’entreprise, d’autre
part, par un facteur qui traduit l’inégalité de répartition des
bénéfices entre dividendes et salaires (pour un donneur d’ordre ayant
des fournisseurs à l’étranger, obligation légale de produire les grilles
concernées pour toute la chaîne de sous-traitants étrangers). Je vois
là un système vertueux et robuste ; je n’ai pas le temps de rentrer dans
les explications / illustrations.
Du reste, interdiction des
« marchés » financiers (qui ne sont pas des marchés, abondance illimitée
de l’offre oblige) : pas d’obligations (sauf publiques, mais non
cessibles, matérialisées sur les comptes bancaires) ; prêt aux
entreprises seulement par le crédit bancaire (socialisé) ; détention
d’actions uniquement permise aux salariés de l’entreprise (à céder quand
ils la quittent).