PARTIE 3
Analyse de trois articles de la Décroissance contre Malthus
Il va de soi que la revue Décroissance ne se prétend pas écologiste mais antiproductiviste. Reste à définir le terme qui fait fureur mais qui ne veut rien dire. Aucune civilisation n’est contre la productivité et une société quelle qu’elle soit est nécessairement pour une forte productivité du travail humain. Quant a la forte productivité et non productivisme de la société occidentale libérale, nos trois auteurs refusent de la lier clairement à l’utilisation des ressources fossiles. Reste également à définir le productivisme modèle soviétique.
Premier texte signé par Bruno Clémentin : La maladie infantile de l’écologie.
Le vocabulaire est à la hauteur de la réflexion : « Manque de bol, Malthus n’a pas toujours vu juste, et le débat en cache un autre : la peur du partage ». Donc traitons de la peur du partage.
Tout abord scientifique quantitatif de la question est écarté : « Quand on commence à traiter scientifiquement de quantité de vivant ça finit toujours par déraper ... cela peut être exploité par ceux qui veulent éradiquer les malades, les malformés ou les pas tout à fait comme nous, par ceux qui zigouillent les populations décrétées indésirables ». Ce qui signifie que si vous essayez d’aborder le problème scientifiquement, vous êtes des nazis potentiels.
La peur de manquer, cette peur n’est pas nouvelle, nous ne le contredirons pas.
L’injonction malthusienne se résume d’après Clémentin à : « S’il n’y a pas assez à manger pour tous, plutôt que d’envisager que les goinfres se restreignent, yaka diminuer le nombre de convives ».
Le hic, c’est qu’il serait utile que Clémentin nous explique comment les goinfres vont volontairement se résigner à une frugalité heureuse, et combien de goinfres la planète peut sustenter.
Ceci n’est qu’anecdotique par rapport aux affirmations péremptoires que nous assène Clémentin : « Peu importe que vous apportiez la preuve de capacité de biomasse suffisante sur la planète pour nourrir de 3 à 4 fois notre nombre actuel d’humains ».
On attend cette démonstration que l’on ne trouve nulle part. Curieusement il ne craint pas par ailleurs d’affirmer que 20 % de la population, en gros nous occidentaux, consommons 80 % des richesses naturelles .Mais pour lui Il n’y a pas de problème politique. La prédation des pays occidentaux disparaîtra par la conversion des goinfres à une frugalité heureuse. Le problème est celui d’une conversion individuelle.
Pour ce qui est du nombre d’humains que peut permettre l’utilisation de la biomasse, nous avons une approche (nous disons bien une approche) de la réponse : la population mondiale pendant tout le Moyen Age a oscillé entre 400 et 600 millions d’habitants. Le mode de régulation naturel étant les trois cavaliers de l’apocalypse de G. Bouthoul : famines, guerres, épidémies.
Enfin notons qu’il reproche à la politique malthusienne de la Chine de créer un déficit féminin. Peu lui chaut d’admettre que cette politique a évité un surcroît démographique de 300 millions de Chinois ou plus.
Il est vrai que cette politique a exacerbé la tradition de la prééminence de l’héritier mâle indispensable à la perpétuation du culte des ancêtres et à la malédiction de la fille qui va servir de bonne reproductrice dans une autre famille comme en Inde. Il oublie que cette élimination des foetus femelles fait également rage en Inde où la fécondité est de trois enfants par femmes contre 1,6 en Chine.
En bref emporté par ces certitudes fantasmées il oublie tout simplement le rôle de l’échographie qui a permis de déceler le sexe de l’enfant précocement et de remplacé la traditionnelle élimination des nourrissons filles, par manque de soins, par l’avortement des fœtus féminins.
Pour Clémentin, pas de doute l’ultime conviction des malthusiens est la peur du partage.
On en revient à la trouille des partageux, sauf qu’il n’explique pas comment on peut obtenir de la population telle qu’elle est un partage volontaire avec les plus pauvres !
Avec Cheynet on monte d’un cran dans la spéculation métaphysique comme le montre le titre de son article qui prête à réflexion : « Pour sauver l’humanité, faut-il sacrifier ce qu’il y a d’humain en nous ? »
Tout le discours s’appuie sur cette certitude Cheynésienne que la part d’humain en nous qu’il faut sauvegarder même au péril de la destruction de l’humanité, c’est la fonction reproductrice.
Nous apprenons que le débat est miné ? Que le qualificatif de malthusien est infâmant.
Débat miné dont nos héros antimalthusiens s’en sont sortis jusqu’à présent en affirmant que le problème n’est pas qu’il y ait trop d’humains mais trop d’automobilistes.
Cheynet convient que l’argument est un peu court. Faudra-t-il occire les automobilistes trop nombreux ?
On nous prévient : « La présence du PSY est ici nécessaire : en fréquentant les milieux écologistes, nous croisons inévitablement les militants pour la réduction de la population humaine. Chez eux, pour lesquels ce sujet constitue la préoccupation prioritaire, il est particulièrement aisé de percevoir le caractère pathologique de leur démarche. Leur expression se caractérise par tous les traits de la phobie sociale. Ouvrir un débat avec eux présente donc peu d’intérêt ».
La démocratie à ses limites, Cheynet devrait se souvenir qu’à l’Est les opposants étaient enfermés comme fous. Il est bien évident qu’il doit lui être plus facile d’avoir comme interlocutrice Madame Boutin. A un lecteur de La Décroissance qui ose évoquer que l’intégrisme chrétien de M. Cheynet est pour quelque chose dans son antimalthusianisme, il répond : imagine-t-on nous interpeller en écrivant : « mais peut-être Cheynet est-il juif ? » (Serait-ce interdit ?). Bien entendu M. Cheynet est un grand pourfendeur d’antimalthusiens et d’anticolonialistes parce qu’ils sont par essence antisémites.
Il est difficile d’analyser un article assez confus, mais nous sommes en pleine pataphysique : Je cite : « La question est là : pour sauver l’humanité, faut-il sacrifier ce qu’il y a d’humain en nous ? Le débat sur le contrôle des naissances renvoie à des questions métaphysiques qui vont bien au-delà de la seule réflexion d’écologie scientifique. Ces interrogations engagent l’idée même que nous faisons de la condition humaine : LE PIEGE LE PLUS IMPORTANT FACE A CETTE PROBLEMATIQUE CONSISTE A ALLER CHERCHER UNE REPONSE DEFINITIVE DANS LE REEL ».
Fermons le ban : le sacré ne se discute pas. Evacuons la réalité gênante.
De toutes ces considérations il ressort qu’en, dehors des contorsions sémantiques, Cheynet est contre la contraception et qu’en résumé ce qu’il y a d’humain en nous et que nous devons préserver avant de penser à sauver la planète c’est sauvegarder notre pulsion reproductrice.
Dans le paragraphe suivant ou il évoque son ami le député Vert Yves Cochet, il confirme que ses arguments se limitent à la croyance, il écrit : « Quoiqu’il en soit, des scientifiques en tirent la conclusion, suite à la raréfaction des ressources fossiles, la quantité d’énergie disponible va se réduire, entraînant une réduction de la population humaine. ON NE PEUT NE PAS ETRE D’ACCORD AVEC CETTE THESE ; L’ELIMINER AU MOTIF QUELLE NE CADRE PAS AVEC NOS CROYANCES NE SERAIT PAS SERIEUX ».
Encore un peu de sérieux Monsieur Cheynet et vous accepterez de discuter avec les fous malthusiens après cette profession de foi antiscientifique et négatrice du réel
L’ensemble de l’article nous livre les états d’âme d’un chrétien intégriste qui pose les problèmes en terme uniquement de morale personnelle et qui refuse l’analyse de la réalité dans sa globalité et exclut toute analyse géopolitique susceptible d’éclairer pourquoi 20 % des occidentaux s’approprient 80 % des richesses naturelles. Il n’est question nulle part d’aborder le rôle prédateur de l’empire américain et de ses marches européennes, de prendre position sur le rôle historique de l’occident judéo-chrétien dans la situation mondiale actuelle.
Avec Paul Ariès, l’emphase sémantique est de rigueur, titre de son article : « De l’humanisme à l’humanicide ».
« Les non-dits des discours néo malthusiens et pédophobes se révèlent clairement dans les groupuscules états uniens qui prônent ouvertement l’Euthanasie générale de l’humanité ».
J’ignore si M. Ariès appartient à une secte stalinienne, mais il manie l’amalgame avec l’absence de scrupule d’un stalinien de l’époque du communisme triomphant. D’après lui les néomalthusiens plaident la haine de l’enfant à naître.
Ariès cite Hervé Lebras : « Est-ce le nombre trop élevé des hommes qui entraîne le rétrécissement de la couche d’ozone et le réchauffement du climat ? Est-ce lui qui épuise les ressources naturelles et affame les plus pauvres ? ».
Monsieur Lebras devrait penser au moins que c’est le nombre des goinfres dont parle Clémentin qui pose problème, mais non, la pollution tombe certainement du ciel, le nombre des hommes n’y est pour rien. Ariès écrit à la suite de cette citation : « Cette fixation sur la question démographique servirait en fait les intérêts d’un Nord opulent qui entendrait bien se passer d’un partage plus égalitaire avec le Sud ».
Que les bêtes fauves du Tea Party de Sarah Palin soient prêtes à adopter cette position, nul n’en doute, mais cela ne répond pas au problème actuel qui est : L’empreinte écologique globale de l’espèce à largement dépassé les capacités d’accueil de la planète d’une part, et d’autre part c’est la surconsommation occidentale qui doit être réduite prioritairement, si l’on veut résoudre la crise écologique.
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