http://www.michelcollon.info/Francois-Hollande-et-le-monde-des.html
François Hollande et le monde des affaires, quand le CAC40
prépare l’Alternance.
Geoffrey Geuens
Article du :
18 janvier 2012
En choisissant comme Directeur de Campagne le
vice-président du Cercle de l’Industrie – Lobby réunissant
les PDG des principaux groupes industriels français –
le candidat de la gauche de droite aux prochaines
élections présidentielles a envoyé un signal, on ne peut plus
clair, aux marchés financiers :
l’Alternance ne constituera pas une menace, bien au contraire,
pour les classes possédantes.
Après José Sócrates,
José Luis Zapatero,
George Papandréou et Elio Di Rupo,François Hollande
sera-t-il le prochain dirigeant socialiste à prétexter la « crise
des dettes publiques » pour imposer aux travailleurs l’austérité
et la régression sociale ?
Au vu du pédigrée de ses responsables de campagne, il y a tout
lieu de le craindre :
c’est que les principaux conseillers dudit candidat se signalent
par leur proximité avec le monde des affaires et leur volonté
de rassurer l’Europe des marchés.
A moins de quatre mois des élections, un passage en revue
des troupes s’imposait.
Pierre Moscovici (directeur de campagne)
Ex-ministre en charge des Affaires européennes dans
le gouvernement de Lionel Jospin, Pierre Moscovici est
Vice-président du Cercle de l’Industrie.
Ce Lobby, représentant les intérêts des trusts français
à l’échelle européenne, a été créé en 1993 par
Raymond Lévy, alors président de Renault, et
Dominique Strauss-Kahn, qui venait tout juste de quitter
le ministère de l’Industrie et du Commerce extérieur.
Partenaire du MEDEF, de l’Institut de l’Entreprise et de la
Table ronde des Industriels européens,
le Cercle de l’Industrie s’est doté du conseil d’administration
bipartisan suivant :
Denis Ranque (président)
Administrateur de CMA-CGM, de Saint-Gobain et du
Fonds Stratégique d’Investissement français ;
ex-PDG de Thalès
Pierre Moscovici (vice-président)
Membre du Parti socialiste, ancien ministre chargé des
Affaires européennes (1997-2002)
Alain Lamassoure (vice-président)
Membre de l’UMP, ancien ministre chargé des
Affaires européennes (1993-95)
Jean-Yves Naouri (trésorier)
Directeur des opérations du groupe Publicis.
Son frère, Jean-Charles Naouri, a été directeur de cabinet
de Bérégovoy à Bercy et associé-gérant de Rothschild & Cie
Banque, avant de prendre le contrôle du groupe de distribution
Casino, et de devenir l’une des plus importantes fortunes
de France estimée, en 2011, à 883 millions d’euros par le
magazine écofi Challenges.
Jean-Charles Naouri est aussi conseiller de la
Banque de France, administrateur de Rothschild & Cie Banque
et de Fimalac.
Cette dernière holding, chapeautant l’agence de notation
Fitch Ratings, appartient à un proche de Laurent Fabius :
Marc Ladreit de Lacharrière.
Benoît Potier (administrateur)
PDG d’Air Liquide, administrateur de Danone et de Michelin,
vice-président de la Table ronde des Industriels européens
Louis Gallois (administrateur)
PDG d’EADS, administrateur de Michelin, ex-directeur de cabinet de Jean-Pierre Chevènement au ministère de la Défense
Pierre-André de Chalendar (administrateur)
PDG de Saint-Gobain,
administrateur de Veolia Environnement
Pierre Gadonneix (administrateur)
Président d’honneur d’EDF,
ex-administrateur de
France Télécom,
Elf-Erap,
Usinor,
Renault
Bertrand Collomb (administrateur)
Administrateur des sociétés
Total,
DuPont et
Reuters Founders Share Company,
conseiller de la Banque de France,
président d’honneur de Lafarge et
ex-vice-président d’Unilever
Michel Sapin (responsable du projet présidentiel)
Ancien ministre délégué à la Justice (1991-92),
ministre de l’Économie et des Finances (1992-93), et
ministre de la Fonction publique
et de la Réforme de l’État (2000-02),
Michel Sapin pourra, en cas de victoire à la présidentielle,
s’appuyer sur ses ex-conseillers :
Thierry Aulagnon (directeur de cabinet à Bercy) est
membre du comité de direction de la Société générale ;
Eric Lombard (conseiller technique à Bercy) est président
de BNP Paribas Cardif et du
Groupement français des Bancassureurs ;
quant à Godefroy Beauvallet(conseiller e-Government au
ministère de la Fonction publique),
il dirige actuellement le Fonds Axa pour la Recherche.
Les conseillers économiques de François Hollande (1)
Elie Cohen
Directeur de recherche au CNRS et à Sciences Po,
membre du Conseil d’analyse économique auprès du
Premier ministre, il est aussi administrateur des firmes
EDF Energies Nouvelles, Steria et PagesJaunes,
ex-administrateur d’Orange et Vigeo.
Jean-Hervé Lorenzi
Professeur à l’Université Paris-Dauphine,
président du Cercle des économistes,
membre du Conseil d’analyse économique auprès du
Premier ministre,
ex-conseiller du président du Groupe Havas et du Premier ministre socialiste Edith Cresson,
actuel administrateur de BNP Paribas Assurances,
de la Cie financière Edmond de Rothschild,
et membre du conseil d’orientation de l’Institut Montaigne, think tank créé par Claude Bébéar (Axa).
Jean-Paul Fitoussi
Président de l’Observatoire français de la conjoncture économique (OFCE),
membre du Conseil d’analyse économique auprès du Premier ministre,
ex-coordonnateur de la « Commission sur la performance économique et le progrès social » – lancée à l’initiative
du président Sarkozy –
et président de la sous-commission de la « Commission des Nations-Unies sur la Réforme du système monétaire
et financier international »,
ce chroniqueur du Monde et de La Republicca est aussi
administrateur du trust financier italien Sanpaolo IMI, de Telecom Italia et de Banca Sella Holding.
Emmanuel Macron
Ancien membre de la « Commission Attali pour la libération de la croissance » – installée par le président Sarkozy –
et actuel associé-gérant chez Rothschild & Cie Banque.
Stéphane Boujnah
Ex-membre de la « Commission Attali pour la libération de la croissance » et
conseiller de Dominique Strauss-Kahn à Bercy,
il est aujourd’hui le patron de la branche française du Groupe Financier espagnol Santander.
Forts de leurs positions dans le monde des mass-médias (Libé, Le Nouvel Observateur, Le Monde), les jeunes loups
du capitalisme à la française sont désormais en mesure de faire coup double :
dénoncer, à longueur de chroniques ampoulées, les « excès » des marchés financiers, tout en bénéficiant des profits symboliques
et, plus encore, matériels associés à leur statut de dirigeants de la haute banque et de la grande industrie.
Un économiste tel que Daniel Cohen – membre de l’équipe de campagne de Martine Aubry – a
pu ainsi prêcher la bonne parole « régulationniste » dans l’émission de France Télévisions « Fric, Krach et gueule de bois »,
à l’appui de poncifs sur les traders fous, l’aveuglement libéral et la droite de Reagan et Thatcher, sans que Pierre Arditi,
animateur de la soirée, ne juge bon de préciser que cet éditorialiste au Monde siégeait, au même moment, à la banque
d’affaires Lazard, au conseil scientifique de la Fondation Jean-Jaurès et au think tank « A Gauche, en Europe », une boîte à
idées sociale-libérale créée par Rocard, Strauss-Kahn et Moscovici.
La boucle est bouclée.
(1) Pour plus d’informations sur la contribution apportée par ces économistes à la campagne de François Hollande, lire
Fanny Guinochet et
Gaëlle Macke,
« Ces économistes et ces patrons qui soutiennent François Hollande », Challenges, 16 octobre 2011.
Pour en savoir plus sur les travaux de Geoffrey Geuens, vous pouvez lire son ouvrage, La finance imaginaire, aux éditions Aden :
http://www.aden.be/index.php ? ....
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