suite à un petit soucis technique, ci-joint une version plus aboutie de ce même article... Avec mes excuses aux futurs lecteurs
Aucune banque représentée au Grenelle de l’Environnement : un simple oubli ou une erreur de stratégie ?
Lorsqu’on regarde attentivement la liste des parties prenantes invitées par le Ministre d’Etat et ministre du MEDAD, Jean Louis Borloo, http://www.legrenelle-environnement.fr/grenelle-environnement/spip.php?article1,
on se rend compte qu’il manque une profession essentielle à tout changement profond des habitudes et des comportements en matière de développement durable : ce sont les banques et les banquiers. On peut légitimement s’interroger sur cet oubli, explications :
Que l’ensemble des experts issus du collectif des associations écologique, l’Alliance et consorts soit présent à ce grand rassemblement marque la volonté d’ouverture du nouveau gouvernement. Que des personnalités charismatiques dont les idées et les actions peuvent être reconnues en particulier par les pouvoirs économiques et politiques par delà les frontières de l’Hexagone est encourageant pour la teneur des débats. Qu’un bon nombre d’organismes et de parties prenantes soient représentées dans une mosaïque de tendances allant du Medef aux syndicats en passant par des associations professionnelles du BTP ou des transports et toutes ces associations écologiques montre une révolution du comportement de l’Etat Français dans sa manière de construire sa décision publique* à l’image de ce qui se fait déjà depuis longtemps dans les pays anglo-saxons.
Mais quand on se penche sur l’ampleur des chantiers à mettre en œuvre en peu de temps à l’issue de ce Grenelle de l’environnement, on peut s’étonner que ceux qui permettent à des initiatives privées de prendre corps et se répandre dans toutes les communes, dans tous les projets à venir, ne soient pas invités ou présents à la table des négociations ! Pourquoi ce manque ? Est-ce parce que ce Grenelle est un écran de fumée comme le disent certains ou est ce un oubli de la part des organisateurs ou un déficit de vision stratégique des banques qui pourrait être relié à l’étude publiée par les enfants de la terre : http://www.amisdelaterre.org/IMG/pdf/Banques_francaises_banques_fossiles.pd f ?
Car les banquiers, ce sont d’eux dont on parle, qu’on les aime ou qu’on les déteste permettent à chacun d’entreprendre : prêter de l’argent pour créer, innover, construire. Car c’est un de leurs premiers métiers que parfois ils oublient. Mais qu’ils décident de se placer dans une logique à la fois économique et vertueuse, où les prêts servent à réduire l’empreinte écologique des ménages, des entreprises et au sens large des agents économiques, pourrait devenir pour eux une nouvelle stratégie à part entière sur un gigantesque nouveau marché paradoxal où plus on paye, moins on consomme...d’énergie :
Prenons par exemple un domaine qui parmi un grand nombre de propositions faites au Grenelle de l’environnement http://legrenelle.lalliance.fr/?p=39#more-39 pourrait attirer à lui un consensus : la maîtrise de l’énergie dans les bâtiments neufs et dans la rénovation.
Comment parvenir à mettre en œuvre la rénovation de 30 millions de logements si aucun produit bancaire n’est conçu pour s’adapter à la réalité de chaque projet individuel ? Car lorsqu’on réduit la consommation d’énergie dans sa maison de façon à atteindre le nouveau standard bâtiment basse consommation (BBC2005 ou Effinergie www.effinergie.org), c’est par 4 à 7 que la facture annuelle d’énergie des ménages est ainsi réduite !
Le raisonnement qui doit alors s’établir se fait en coût global : - d’un côté apparaît le surcoût de l’investissement destiné renforcer l’efficacité énergétique de la maison (étude et simulation thermique, traitement des ponts thermiques et d’une étanchéité à l’air du bâtiment, fourniture et pose d’une isolation renforcée, mise en place d’une ventilation mécanique contrôlée double flux... une logique d’opérations préalables et incontournable avant tout choix d’énergie renouvelable), - d’un autre côté, en payant plus à l’investissement (autour de 150€ par m² de surcoût en plaine) on réduit la facture de consommation d’énergie.
Du point de vue du particulier ou du client** : le surcoût d’investissement est payé une fois, mais la réduction de la facture se produit chaque année à partir de la fin des travaux ! En général on refait des travaux lourds de rénovation tous les 25 ou 30 ans, donc on peut multiplier l’économie par 25 ou par 30 pour avoir le montant total ! Au final, si d’un côté on n’a rien fait d’autre que construire ou rénover dans les standards actuels (RT2005), on n’a pas payé le surcoût d’investissement mais on continue à payer une grosse facture d’énergie. En revanche, si on a choisi d’améliorer l’efficacité énergétique de sa maison en payant ce surcoût initial, au bout d’environ 15 ans, ce dit surcoût est épongé par les économies d’énergies et alors se produit un petit miracle : on commence à gagner de l’argent parce que sa maison reste très économe en énergie.
Du point de vue du banquier l’opération est tout aussi intéressante : il conviendra, d’un côté, d’aider les ménages à financer ce surcoût d’investissement pour améliorer l’efficacité énergétique de leurs maisons. Mais dans un deuxième temps, dés que ces travaux seront terminés, les charges fixes de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire se réduisent considérablement. Donc pour le banquier, apparaît un double avantage : - d’un côté il augmente le montant de l’emprunt pour chaque opération, - mais dans un même temps, il réduit son risque de crédit, d’une part par l’allègement des charges de fonctionnement liées au chauffage et à la production d’eau chaude de son client, mais aussi parce que la valeur patrimoniale de l’hypothèque prise sur le bien sera supérieure à celle qu’elle aurait été sans mise en oeuvre de cette performance énergétique du bien considéré.***
Au final, le banquier, en choisissant une telle stratégie gagnante en réduction de ses risques de crédit et en augmentation de son produit net bancaire pourrait aussi axer sa communication en évoquant une démarche de développement durable (qui devient véritable et qui est prouvée), qui aide aussi considérablement la relance de la consommation et la réduction du chômage par l’augmentation du besoin en ressources pour effectuer tous ces projets. Un tout, totalement vertueux pour ce Grenelle de l’Environnement (qui peut aider le gouvernement à atteindre ses objectifs) !
Il existe donc une véritable opportunité pour la première banque qui se décidera à créer ce type de produit pour capturer un gisement colossal de clients qui souhaiteront s’engager dans ce type de dépenses « durables ». Cette banque améliorant au passage sa crédibilité de financeur de projets individuels et d’entreprises innovants !
Voyons voir quelle sera la première banque à participer activement aux débats...
* http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/024000521/index.shtml
** de plus en plus de projets de constructions (BBC2005, HQE, Minergie) sont financés par des Partenariats public privé (PPP) ou des opérations de crédit bail qui permettent de réunir dans une logique de coût global les crédits d’investissement et les crédits de fonctionnement.
*** car l’étiquette énergétique du bâtiment, obligatoire tant pour la vente que pour la location, sera cotée A ou A+ et les retours d’expériences montrent qu’en Suisse, les maisons construites au standard Minergie (BBC2005 s’inspire directement du label Suisse) conservent une valeur patrimoniale supérieure de 10 à 15% par rapport aux bâtiments traditionnels.
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