Article très pertinent Charles, comme d’habitude !
Si les Américains se rendent compte seulement de la menace qui pèsera sur leur autonomie d’accès à l’espace, les Européens, pour leur part, semblent avoir fait de cette dépendance - pardon, comme on dit en Europe, de ce "partenariat stratégique mutuellement profitable" - une politique à part entière. Les raisons qui ont conduit l’ESA à conclure avec la Russie un accord sur le transfert de Soyouz vers le centre spatial guyanais tient à une raison bien simple : le désinvestissement qui avait frappé voici une dizaine d’années les recherches relatives au développement d’un moteur de nouvelle génération pour la filière Ariane !
Le comble est que les démonstrateurs technologiques du système de radionavigation par satellites Galileo sont envoyés sur orbites avec des fusées Soyouz. La Russie, autrement dit, détient entre ses mains la capacité de réaliser un chantage de dernière minute sur les conditions de lancement de son lanceur lorsque celui-ci place des satellites européens stratégqiues.
Je me souviens avoir lancé, voici 3 ans à Toulouse, une toute petite diatribe sur le risque stratégique d’une telle dépendance ; dépendance d’autant plus insuportable que nous disposons en Europe du potentiel et de l’expertise scientifique nécessaire à la réalisation du type de rupture technologique dont la filière Ariane a tant besoin ! Je me souviens également avoir vu à cette occasion, de la part du public composé de représentants industriels et politiques, des petits sourires tendrement moqueurs à ’adresse de ce jeune chercheur belge qui s’adressait à eux. Evidemment, toute l’Europe politique était encore plongée dans un antiaméricanisme primaire (teinté également de fascination pour l’oncle Sam). il était donc plus facile de gloser sur le différentiel stratégique et technologique entre Européens et états-uniens. Je serais curieux de savoir si ces mêmes sourires réapparaitraient aujourd’hui sur ces visges à l’aune des événements qui vienennt de se produire...