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Paul Villach Paul Villach 28 février 2009 17:24

@ Daerel

Pardonnez la longueur de mon témoignage. Je ne peux pas faire plus court pour nourrir avec exacititude votre dossier de la destruction méthodique du Latin aujourd’hui en France. Il importe de connaître les méthodes employées.

Voici comment a été programmée par deux principaux incultes qui se sont succédé, la destruction méthodique de l’enseignement du Latin au collège où j’ai exercé 16 ans, avant de devoir en fuir. Je le raconte dans un ouvrage : « Un blâme académique flatteur » (Éditions Lacour, 2008).

La destruction a été opérée par la conjugaison de quatre procédés sans doute astucieux, mais méprisables.
 
I- Un premier procédé : l’indifférence qu’a rencontrée l’action destructrice perpétrée par un professeur de Lettres Classiques incompétent 
1- L’évolution des effectifs des Latinistes depuis 1988, date de mon arrivée dans ce collège, et la nomination d’un second professeur, agrégé de Lettres Classiques, qui a d’abord assuré le cours de Latin de 5ème, puis celui d’une classe de 4ème , sont fortement corrélées : les chiffres qui avaient doublé dès 1991, passant de 25 à 50 élèves, après mon « 1er voyage en Campanie », ont plongé autour de 20 élèves après son arrivée. Saisi des plaintes des parents et des élèves, à maintes reprises, je n’avais nul moyen d’endiguer les abandons d’élève, le principal ayant eu la bonne idée de faire suivre les mêmes élèves par le même professeur de la 5ème à la 3ème. Sur l’insistance des parents, il a dû tout de même renoncer à attribuer une Troisième à cet incompétent, en septembre 2002. 
2- L’inspectrice pédagogique régionale à l’occasion de ses différentes inspections, n’a rien trouvé à redire à cette situation, puisque ce monsieur, après ces inspections, a continué sa besogne de destruction en toute tranquillité : on ne peut mieux illustrer les dégâts que cause à l’institution ce simulacre de contrôle qu’est l’inspection. 
3- Pour comble d’ironie, ce professeur, muté par mesure de carte scolaire en septembre 2003, est parti exercer ses talents… en Mathématiques !!! Du moins le Latin n’a-t-il plus été exposé aux infortunes de son incompétence.
 
II- Un second procédé : la mise en place d’un dispositif administratif ayant pour effet ou objet de raréfier les candidatures en Latin dès la 5ème.
1- Parallèlement, il a été interdit de cumuler le Latin et certaines options, comme… la Natation ( ! ) et l’Anglais dit européen.
2- Il a été simultanément rendu impossible d’associer l’Allemand et le Latin ( !) , en raison d’une « judicieuse » concurrence horaire.

-  À la suite de la plainte de leurs parents auprès de l’Inspection d’Académie, j’ai pris sur moi, en septembre 2003, d’accepter deux élèves germanistes de 5ème en classe de Quatrième, à raison de 2 heures sur 3 pour leur permettre de s’initier à la Langue Latine. Voilà où l’on en était !

-  Un élève de 4ème qui avait découvert dans mes cours de Français l’importance du Latin pour une connaissance approfondie de la Langue française, s’est vu interdire en octobre 2003 par le nouveau Principal (ex-prof d’EPS) d’intégrer le groupe de Latinistes, réduit pourtant à 4 élèves (+ les 2 Cinquièmes), bien qu’il fût libre 2 heures sur 3, et sous prétexte qu’il ne s’était pas inscrit en 5ème : et pour cause, son option « natation » l’interdisait. L’année de 5ème manquée n’était toutefois pas un handicap puisqu’il était notoire que les élèves n’avaient pas fait grand chose avec le professeur mentionné ci-dessus, comme j’ai pu m’en apercevoir. J’ai donc dû saisir M. l’Inspecteur d’Académie du problème, qui ne m’a pas répondu, mais qui semble l’avoir fait auprès du Principal, puisque celui-ci a fini par autoriser fin novembre ce qu’il interdisait depuis un mois. Telle était l’idée qu’on se faisait de l’intérêt de l’élève.

3- Un cours de Latin sur 3 en classe de 4ème, une fois tous les 15 jours, s’est déroulé entre 16h30 et 17h30. Ce cours était, à ma connaissance, le seul du collège dans cette plage horaire tardive, qu’on n’oserait pas imposer à un cours de Mathématiques.
4- Dans ce contexte, un « lapsus calami » calamiteux ne manque pas de sel : les parents des élèves latinistes de 5ème ont été surpris de constater que sur la grille d’orientation destinée à leur indiquer les salles occupées par les professeurs qu’ils avaient à rencontrer, le mardi 4 novembre 2003, le professeur de Latin que j’étais, avait été oublié !

III- Un troisième procédé : la tentative de destruction, orchestrée par le Principal, de mon Projet d’Action Educative Innovant « Initiation à l’archéologie Gallo-Romaine » incluant en 3ème un voyage en Campanie pour la 15ème année consécutive.
1- L’évolution des effectifs montrant à l’évidence que « le voyage en Campanie » était un facteur relativement attractif pour les élèves (J’ai emmené 450 élèves en 15 voyages, de 1990 à 2004), le Principal (ex-prof d’EPS, un mois après son arrivée, n’a donc rien trouvé de plus urgent que de tenter de le casser à sa 15ème édition. 
2- Au Conseil d’Administration du 9 octobre 2003, comportant à son ordre du jour les autorisations de voyages pour l’année en cours, mon « 15ème voyage en Campanie » a fait l’objet - tout comme, du reste, mon « 2ème Voyage à Venise » (complément naturel du travail fait en Campanie) - d’une présentation discriminatoire de la part du Principal.

-  Ce dernier a attendu la séance pour remettre aux parents une grille censée présenter les caractéristiques des voyages proposés. Pour égarer le CA, seul le mien se voyait assorti d’un prix imbécile et extravagant par élève (2.250 F (48 él ?) ou 4.400 Euros), alors qu’il était de 360 Euros, et d’un nombre précis d’élèves : les 8 survivants de la « casse » organisée. Je m’associais avec un ami d’un collège d’Albi : il m’apportait le nombre d’élèves pour remplir un car de 50 places et moi, je lui fournissais en échange ma logistique rodée depuis 15 ans.

-  Tous les autres voyages avaient une mention « liste jointe » sans qu’aucune liste d’élèves ait été communiquée, pour faire croire que tous les élèves d’une classe étaient inscrits, alors que nul n’en savait rien, puisque tous les autres organisateurs avaient été incapables de fournir la moindre liste d’inscrits à cette date. Le Principal l’avouera au CA du 20 novembre 2003.

-  N’importe, le but était d’aller au-devant des deux arguments avancés par des alliés ( professeurs SNES et parents PEEP ) du Principal pour rejeter ce voyage : cherté et élitisme !!!

-  Seule la détermination des parents FCPE (exception faite de leur président, allié du Principal !), pas dupes, qui avaient présenté une pétition demandant un vote en faveur du voyage, a permis de faire échouer la manœuvre malhonnête. « Le 15ème Voyage de Naples » a été adopté par 10 voix contre 6 voix (les 4 « administration » et les 2 SNES). Mon « 2ème Voyage à Venise » dans le cadre de mon Projet d’Action pédagogique, « L’information par l’image », a été, lui, sauvé par 9 voix contre 8. Ces scores sont à rapprocher de l’unanimité ou peu s’en faut recueillie par tous les autres voyages, y compris le stage de voile ! Cela s’appelle une discrimination. Je passe sur la demande d’un vote secret demandé par le principal pour cacher son vote. Il croyait pouvoir mieux l’emporter ainsi. Manque de pot, les délégués agents, à la faveur du secret du vote, ont eu le courage de voter pour mes projets, ce qu’ils n’auraient peut-être pas fait à main levée !!!

3- Je vous épargne les débats du CA suivant, le 20 novembre 2003, au sujet de l’adoption du procès-verbal du CA du 9 octobre 2003.
Le principal a présenté un projet de procès-verbal malhonnête pour masquer son opération malhonnête de destruction manquée. Or, les amendements que les parents FCPE et moi-même avons présentés séparément, ont été rejetés, à une exception près. Curieusement, alors que le choix ne pouvait être que binaire, certains délégués se sont réfugiés dans l’abstention, soulignant le mensonge, mais n’ayant pas le courage de la vérité.
4- Un délégué de professeurs, parlant au nom du SNES, a expliqué que « le rapport fidèle de ce qui (s’était) dit au dernier CA  n’(était) pas une priorité pour eux ». Sommes-nous toujours dans un établissement d’Education ?
5- Les parents FCPE ont exprimé leur écœurement devant « ce tissu de mensonges », selon les termes inscrits au procès-verbal du CA…
Le Principal a pris sa revanche en mai et juin 2004 : il a imposé des conditions ineptes de voyage interdisant désormais tout nouveau voyage en Campanie et à Venise (Prix dérisoire et obligation d’en passer par un voyagiste privé. J’étais le seul du collège à organiser seul mes voyages, traitant directement avec les prestataires de service.) J’ai décidé d’arrêter d’enseigner !

Fruit d’un travail de plus de 15 ans, ces voyages étaient intégrés à deux projets pédagogiques complémentaires qui avaient pourtant rencontré la faveur et l’estime des élèves et de leurs parents, comme ils ont eu le courage de l’écrire dans la presse locale et dans une pétition au recteur restée sans réponse.

IV- Un quatrième procédé : le masque avantageux de l’humanitarisme dévot
Cette destruction méthodique avait, en outre, le culot de se parer du masque avantageux de l’humanitarisme dévot  : une option comme le Latin, s’ajoutant à d’autres, contrarierait le choix du collège en faveur de « l’hétérogénéité des classes » et la prétendue assistance « aux élèves en difficulté », dixit la Principal adjoint au CA du 20 novembre 2003. C’est ainsi qu’en affichant les plus nobles intentions, on éloigne encore plus du Savoir ceux qui en sont déjà les plus éloignés.

Voilà comment a été traitée la Langue Latine dans ce collège. Cela ressemble à une guerre menée contre l’Intelligence et la Culture sous couvert de bienfaisance et au profit du sport.

La Natation, c’est bien. Mais pourquoi priver un nageur de la culture fondatrice de sa propre culture ? On voit bien que ce type de choix offert à des jeunes adolescents est un leurre qui joue de leur ignorance et stimule le réflexe du moindre effort, compte tenu de l’image d’un sport professionnel magnifié à longueur d’antenne et de papier journal. C’est ainsi qu’on organise un désastre culturel, tel que le révèlent les films et les programmes télévisés plébiscités par le grand nombre. Paul Villach

 



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