La géostratégie vu des USA
L’hyper-puissance américaine, militaire, économique, politique pose aujourd’hui plus que jamais la question de l’équilibre mondial. Il ne s’agit pas d’inventer des scénarios mais de constater que l’idéal du pays des « libertés » est bel et bien de l’histoire ancienne sacrifiée sur l’autel des profits et de la main mise des USA sur les intérêts mondiaux. La question est de savoir ce que sera le prix à payer pour cette vision autoritaire et financiarisée du monde.
Tout commence à Dallas, Texas.
Dallas et son univers impitoyable, ville érigée en plein milieu du désert par les revenus du pétrole et la volonté de fer de quelques cow-boys. Dallas et l’état du Texas, état le plus puritain et conservateur de tous les Etats-Unis. Le Texas et ses "Walker Texas Ranger" combattant tous les "méchants" de ce monde et plus particulièrement ces saletés de mexicains voulant traverser la frontière pour un avenir meilleur.
Le Texas et sa culture familiale, croyante et manichéenne. Fief des Bush et terre de la fortune des lobbies des faucons américains. Et sa capitale, dernière demeure du meilleur président que les Etats-Unis aient jamais eu, JF Kennedy.
La face des Etats-Unis que nous voyons depuis Bush père et surtout depuis 2000 c’est la face émergée du Texas et de sa peur viscérale du monde, des socio-démocrates, de tout ce qui ne ressemble pas ou trop peu au modèle enseigné dans les écoles puritaines de l’Etat.
Pour fêter l’an 2000 et annoncer la couleur, GW Bush annonce au monde un "Axe du mal" constitué entre autres de l’Iran, de l’Irak et de la Corée du Nord. Un axe du mal bien identifié comme étant les cibles à détruire afin, et c’est le prétexte, d’étendre la démocratie dans le monde.
Derrière ces quelques paroles très simplistes, il fallait y voir la qualité d’expression optimale d’un jouet imbécile placé à la présidence de l’hyperpuissance (Cf H.Vedrine) pour mieux satisfaire les intérêts de ceux qui constituent le cerveau de l’administration Bush.
Il fallait surtout y voir un programme tactique fondé sur 3 objectifs géostratégiques majeurs :
Le premier
point étant d’assurer aux Etats-Unis le contrôle du pétrole, c’est à dire en
épuisant les autres producteurs tout en prenant les bénéfices économiques et en
s’assurant des réserves à terme qu’ils pourront vendre très cher.
Le second point
étant d’affaiblir autant que faire se peut le monde arabe et surtout musulman
en semant des dissensions internes favorable au ralliement de certains à la
cause US tout en occasionnant une opposition qu’il serait aisé de considérer
comme terroriste et facilement gérable puisque peu armé et non organisé.
Le troisième
point étant d’améliorer encore l’arsenal militaire des USA afin d’assurer non
seulement la sécurité territoriale mais aussi leur hégémonie durable sur le
reste du monde, et plus particulièrement sur les ennemis d’aujourd’hui (les
arabes-musulmans) et de demain (la Chine ou l’Inde).
Les faucons de l’administration Bush, eux-mêmes souvent d’obédience juive ou catholique ultra conservatrice, cristallisés par l’actuel président du FMI (cela ne s’invente pas) Paul Wolfowitz, ont tout planifié depuis 20 ans.
GW Bush est une marionnette que l’on agite pour assurer aussi longtemps que possible l’hégémonie américaine sur le monde et qui se traduit pour les faucons par une croissance sans limite de leurs fortunes personnelles et de leur pouvoir. Il n’est donc pas étonnant de voir les PDG de lockheed Martin (armement), d’Enron (énergie), d’Exxon Mobil (pétrole), JPMorgan Chase (finances) être dans les premiers rangs de lobbies favorables à la droite radicale de Bush, droite qui laisse crever sous ses yeux la "noire" Nouvelle-Orléans ou crée des Guantanamo dans le monde...
La stratégie du pouvoir et de la main mise sur le monde commence là et elle doit répondre à plusieurs règles pour ne pas être contrer à l’intérieur comme à l’extérieure :
Assurer la
croissance économique, même si elle creuse les inégalités, au moins comme
prétexte statistique (cela me rappelle une tactique française tiens...)
Assurer la
sécurité du pays et donc faire vivre constamment les citoyens dans la peur,
peur de l’autre, peur des extra-terrestres, peur du voisin (Patriot Act)
Ne pas avoir de
pertes américaines, et surtout pas de blancs catholiques
Trouver des
alliés susceptibles de faire la sale besogne à votre place en achetant la
chose, en trouvant les prétextes, en finançant les régimes, tout en
restant en 2ème ligne et s’occuper soit-même des gros morceaux.
Inventer des
prétextes, qu’il s’agisse de réseaux internationaux terroristes qui
n’existent probablement pas de manière organisée ou bien d’images satellites ou
même encore de tout autre stratagème.
La stratégie américaine étant posée, son aire de jeu étant le monde entier et plus particulièrement 2 zones : l’Amérique du sud et le Moyen Orient.
En Amérique du
Sud, tout fou le camp. Après 20-30 années de loyaux services, les fusibles
placés au pouvoir pour accéder aux richesses des territoires perdent un à un
leurs postes. Au Vénézuela, Hugo Chavez est une épine dans le pied des USA, une
aiguille qui pèse 7% de la production mondiale de pétrole et qui
souhaite nationaliser les ressources. En Colombie, c’est la guérilla
qui tient le coup et empêche les trafiquants américains d’avoir les parts
de marché (cf trafic). Au Chili, voilà une présidente de gauche qui risque
de s’attaquer aux concessions minières. En Argentine, l’économie a flanché et
le pays est à terre. Au Brésil, après avoir exploité autant que faire se
peut les richesses à bas prix, voilà que celui-ci commence à émerger la tête de
l’eau. Dans les caraïbes, l’industrie hôtellière doit faire avec les
révolutions locales et autres génocides auto entretenus du type Haïti.
Bref, en Amérique du Sud, ce n’est pas la grande forme, mais les USA ont pompé ce qu’il y avait à pomper (chasse gardée) et conserve une certaine main mise.
Mais les intérêts ne sont plus dans cette Région du monde.
Le Moyen Orient
est bien plus stratégique. Et quand on parle de Moyen Orient, il faut
comprendre même grand Orient de la Turquie au Pakistan, de la Libye à la
Somalie. Cette Région du monde est à plusieurs points
stratégiques, religieusement, pétrolièrement, géographiquement
(Canal de Suez), politiquement etc...
Il fallait donc aux USA un moyen de contrôler le secteur, moyen trouvé aux travers de plusieurs stratégies convergentes, qu’il s’agisse de l’idéal de démocratie à imposer en Irak ou en Afghanistan ou bien de l’avant garde des USA sur le sol du Moyen Orient au travers d’Israël. Il ne faut pas se leurrer d’ailleurs sur les intérêts des USA vis à vis d’Israël : Israël n’est qu’un outil, un prétexte, une tête de pont armé et financé pour déstabiliser le secteur afin de ne pas attirer l’attention du monde sur les activités enrichissantes des américains.
Cela se dédouble de plusieurs marchés florissants, parfaitement sous contrôle (cf Lord of War, Farenheint 9/11) dont la vente d’armes. Peu importe les "dommages collatéraux" du moment que la diplomatie "Bounty souple" de C.Rice permet de gagner du temps et d’engager des adversaires interposés.
Dans les années 80, les USA ont financé l’Irak pour s’armer contre l’Iran de même qu’ils avaient financé la Corée du Sud contre la Corée du Nord et la coalition vietnamienne contre les Khmers Rouges. Le résultat étant à chaque fois d’empocher les gains, de compter les morts de part et d’autres et de poser les pipe-lines là où il le faut.
Les "territoires tampons" contre l’ex URSS tombant en 1989, il fallait maintenir la pression et la peur mondiale en trouvant un nouvel ennemi : L’Irak de S.Hussein. Ce même Irak armé par les USA devint une cible frappée par l’Occident. Mis à terre en quelques mois, suivi d’un blocus-embargo "pétrole contre nourriture (on ne dira pas que c’est inique mais presque)" et parsemé de dissension Sunnites-Chiites-Kurdes, l’Irak était déjà hors d’état de quoi que ce soit dès fin 1991.
Après l’axe du mal de 2000 et les relents du conflit Israelo-Palestinien, le World Trade Center était une splendide occasion de rebondir (à tel point que certains pensent que cela a été fait exprès, ce qui n’est pas si dingue que cela (cf V pour Vendetta)) : voilà qu’il existait sous nos yeux une organisation underground et parfaitement armée du nom d’Al Qaïda. Son leader, O.Ben Laden devint en quelques secondes le terroriste numéro 1, terroriste dont on oublie de signaler qu’il est frère des meilleurs partenaires pétroliers des USA (l’Arabie Saoudite) et surtout l’un des bras armés financés des USA en Afghanistan VS les Russes dans les années 80.
La stratégie américaine a l’avantage d’être cohérente et suivie depuis plusieurs décennies, parce qu’avant les faits que nous connaissons, les US ont démontré leur capacité à faire d’ennemis des partenaires (la catalaxie) tout en tirant les bénéfices de ressources qu’ils ne possèdent pas. C’est ainsi que les USA ont fait d’un peuple de bédouins, l’Arabie Saoudite, le 1er producteur mondiale de pétrole et surtout le poumon du monde arabe.
"Si vous n’êtes pas avec moi, vous êtes contre moi". En jouant à ce jeu, le peuple de bédouins, terre de La Mecque, a fait le choix du partenariat plus que de l’opposition. Il a fait ce choix car il était préférable de s’enrichir plutôt que de dire non, surtout sans armée. Là où l’Iran pouvait dire non et où les US avaient peur d’un 2ème Vietnam, l’Arabie ne pouvait que dire oui. En s’arrogeant des alliés arabes, riches (donc puissants), les US avaient une formidable porte d’entrée pour contrôler le Moyen Orient.
Néanmoins c’était en oublier sa complexité (religieuse et ethnique) et surtout les rivalités fortes des clans du territoire. Ainsi la Syrie, la Libye, l’Iran, l’Irak n’ont jamais voulu s’allier aveuglément aux USA car eux-mêmes trop proches d’Israël. Le triangle de la mort fonctionnant à plein, les USA ont vite compris qu’il valait mieux rester loin des lignes et jouer de la "démocratie" pour tirer leurs intérêts.
En affaiblissant tous les opposants, principalement musulmans radicaux et dictateurs, les USA ont tenu le Moyen Orient. Mais l’administration Bush en voulait plus, toujours plus.
1er acte :
La somalie
La nécessité de contrôler le détroit de la mer rouge nécessitait une intervention en Somalie pour y placer un pion. Après la "chute du faucon noir", les US ont préféré financer des clans, contre d’autres pour tenter de tenir le détroit et maîtriser la périphérie du Moyen Orient. L’Égypte s’étant rangée, à priori le sud de la mer rouge était sous contrôle.
Manque de chance, en juin 2006, les tribunaux islamiques ont renversé les alliés des US, et tout en récoltant les déchets nucléaires italiens remontés par les tsunamis, les musulmans radicaux de Somalie peuvent à terme faire embraser toute la région. Et une Région tendue, et une facture mortuaire de 300 000 à 2 millions de morts (au choix).
2ème
acte : L’Afghanistan
Tout le monde vous le dira, l’Afghanistan est intenable. Sous prétexte de poursuite d’Al Qaïda, la coalition américano-Otan a fait tomber le régime des Talibans. Après avoir placé Hamid Karzaï au pouvoir, celui-ci ne pouvant pas sortir de Kaboul sans risquer sa vie, les US ont tenté de détruire les cellules "terroristes". Et je ne doute pas qu’elles y soient arrivées vu leurs moyens : il est fort à parier que Ben Laden soit déjà mort depuis longtemps, car on ne peut pas se cacher longtemps des satellites, visions nocturnes, espions et autres gadgets. La marionnette ne revenant que juste avant les élections de 2004 (étrange) et juste avant des moments clés (invasion en Irak). Comme par hasard ! Le tout avec des identifications maisons et des bandes sonores enregistrées, soit d’un palace où il vit paisiblement, soit d’outre tombe.
Bilan : Un pipe-line évitant la Russie, traversant la Turquie et ne rapportant rien à un pays en ruine. On ne parlera pas des 10 aines ou 100 aines de milliers de morts issus des combats.
3ème
acte : L’Irak, le retour
Sous prétexte d’un éventuel lien avec Al Qaïda, mais surtout afin de régler les comptes (surtout pour Exxon Mobil), la coalition américano-britannique envahit l’Irak en 2003. L’armée en face étant inexistante, la résistance se fait à la guerilla urbaine et à la voiture piégée. On a aussi eu droit à la résistance de Moktada Sadr et autre Al Zarqaoui. Et s’il avait fallu évincer S.Hussein, pourquoi ne pas l’avoir assassiné/capturé s’il était en lui-même le problème ?
Bilan des opérations : un pays à feu et à sang, plusieurs milliers de morts dans l’assaut principal et les bombardements. 40 morts par jour dans une guerre civile sans nom. Un régime assujetti, isolé et sans pouvoir. Sans parler des attentats commis pour une raison ou pour une autre en Espagne-Madrid où en UK-Londres (tiens des alliés de la coalition...)
4ème
acte : La Palestine et le Liban
Via Israël, attaquer les extrémistes du Liban et de la Palestine revient à inciter les financeurs arabes à sortir de leurs caches et à engager un engrenage de déstabilisation entretenu du secteur. En effet, en déstabilisent le Liban, les Usa-israël attirent l’attention sur ce secteur et incitent la Syrie et l’Iran à faire des faux-pas. L’UE étant un nain politique, qui plus est divisé sur la question du fait de la position de Blair en UK, les Russes n’ayant pas que cela à faire et la Chine préférant suivre et se développer plutôt que d’intervenir, les US ont carte blanche pour gérer le secteur à leur guise.
Du coup, C.Rice gagne du temps pour que le Hezbollah et le Hamas soient durement frappés, détourne l’attention sur le projet global des USA qui consiste à frapper à terme l’Iran (cf bases militaires USA Bilan du monde 2004 et 2005) et laisse Israël régler ses comptes localement dans un silence - de morts- assourdissant du fait d’un rapport de force clairement inégal en faveur d’Israël (aviations + vision nocturne VS kalachnikovs...).
Vu que l’AIEA n’arrive pas à faire péter les gonds à l’Iran, autant les attirer vers un autre piège, prétexte à la destruction du régime et bien évidemment à la prise de contrôle des ressources pétrolières et stratégiques de la zone (Golfe persique).
Bilan : Le Liban n’est qu’un prétexte, un rapport gagnant-gagnant USA-Israel qui consiste à détruire toute opposition locale en toute impunité et si possible avec les bénédictions de l’Europe, voire du monde via l’ONU impuissante. On dénombrera encore plusieurs milliers de morts, mais on a l’habitude...
5ème acte, la Syrie et l’Iran
Voilà la prochaine étape de l’administration Bush. Pour le moment elle ne peut pas agir sans un faux pas de l’Iran, surtout après l’Irak et aussi avec plusieurs fronts à gérer en même temps. Par ailleurs l’inconnu sur la bombe de l’Iran et ses réserves en uranium refroidit certaines velléités.
Il faut donc un prétexte autre que les fausses photos satellites et un autre fusible que ce brave Colin Powell. De plus l’Italie de Prodi et l’Espagne de Zapatero ne seront peut-être plus de la partie, surtout que l’Iran a des amis côté Russe et Chinois. La France n’étant que marginale dans l’histoire, pour ne pas dire anecdotique en la situation.
Bilan
global :
La stratégie de USA, phasée dans le temps, est particulièrement destructrice en vie humaines. Si les USA ne perdent que peu des leurs, et surtout des marines latinos, les dommages dans les territoires sous pression sont énormes et construisent l’instabilité de demain. Du Darfour au Soudan au Pakistan, voire en Inde, le monde arabo-musulman est sous pression. Il est d’autant plus sous pression qu’il est divisé et opprimé ce qui engage des luttes intestines de pouvoirs mais aussi peut-être la possibilité d’une grande coalition vers un ennemi commun.
Et là est l’erreur des USA. En semant la terreur, les USA et leurs alliés ont fait des terroristes-résistants-martyrs le terreau d’une possible alliance des genres vers un ennemi commun. De Guantanamo à la parodie de procès de S.Hussein, et malgré toute la chape médiatique du monde, la réalité est là : les USA sous couvert d’être un pays de libertés sont devenus les premiers oppresseurs du monde, qui plus est parfois avec les Américains eux-mêmes sous couvert de Patriotisme (vertu des brutes).
Il ne serait pas étonnant de constater dans les années à venir, sur le plan mondial, qu’en semant le chaos, les USA et leurs alliés ne récoltent que la colère et la violence aveugle. Ce n’est nullement un parti pris, c’est juste le constat que lorsqu’il y a une évidente oppression, il y a toujours un retour de bâton à craindre. Si l’ONU avait réellement un pouvoir, et si communauté internationale il y avait, cela n’aurait jamais du se passer ainsi, jamais.
Maintenant, la seule chose que nous puissions faire est d’espérer pour
ceux qui subissent les atrocités que le tribu ne sera pas trop lourd sur
l’autel des intérêts économico-stratégiques des cows-boys du
Texas...
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