Réforme des retraites
Il y a aujourd’hui d’incessantes querelles à propos de la question de rallonger la durée de cotisation, afin de sauver le système des retraites. En fait, il existe une solution pérenne et définitive au problème des retraites, qui passe par un ensemble de mesures structurelles, concernant la retraite par capitalisation.
Voici un exposé assez long, mais je l’espère assez clair, du problème des retraites.
Il faut, à mon sens, promouvoir les régimes de retraite par capitalisation. Ces régimes, contrairement à ceux par répartition, ne peuvent pas être structurellement déficitaires, sauf si les assurés vivent beaucoup plus longtemps qu’il n’avait été prévu. Ces régimes offrent une très grande liberté. Dans un régime de retraite par capitalisation, le client cotise ce qu’il veut quand il veut et commence à toucher sa pension également quand il le veut (par exemple à 20 ans ou à 100 ans) et peut même changer d’avis en différent la perception d’une rente qu’il avait commencé à toucher. Enfin la retraite par capitalisation permet, en mettant les organismes de gestion en concurrence, d’offrir des prestations diversifiées, bien adaptées aux besoins et de grande qualité.
Il existe plusieurs sortes de régimes de retraite par capitalisation. Je vais donner une description brève du système le plus simple :
Tout d’abord, signalons que la retraite par capitalisation résulte de contrats, c’est-à-dire d’engagements souscrits volontairement. La souscription de ces contrats n’est pas une chose anodine, puisque ces contrats sont insolubles : ils subsistent jusqu’à la mort du client. Malgré cette insolubilité, ces contrats peuvent être transférés (avec les actifs gérés) d’un organisme gestionnaire à un autre, soit par décision conjointe de ces deux organismes, soit par décision des pouvoirs publics, notamment lorsque l’organisme qui gère le contrat est en faillite. Cette insolubilité n’est pas effrayante pour le client car, même s’il s’engage à payer, ses paiements ne seront jamais juridiquement exigibles, c’est-à-dire que le client ne pourra pas subir de saisie. Le client a bien sûr le droit d’ouvrir plusieurs contrats auprès de plusieurs organismes.
On nomme « sociétés d’assurance vie et de capitalisation » les organismes qui gèrent les systèmes de retraite par capitalisation. Un contrat de retraite par capitalisation fonctionne un peu comme un contrat d’épargne géré par une banque (ou un autre investisseur institutionnel), avec quelques nuances, comme le fait que le client choisit soit d’adosser son épargne aux actifs généraux gérés par la société d’assurance vie, soit d’opter pour un contrat en unités de comptes, c’est-à-dire que les placements de l’assureur sont choisis par le client. Parmi les fonds proposés au client, il y en a toujours au moins un qui soit (quasiment) sans risque. Les placements se font essentiellement en emprunts d’État, actions, obligations et parts de sociétés civiles immobilières. La loi impose aux assureurs d’investir la quasi-totalité de leurs avoirs dans des actifs cotés en bourse, ce qui pose problème car seule une très faible part des actifs de l’économie nationale sont cotés. Il serait souhaitable, pour permettre le développement de l’assurance vie, d’autoriser les sociétés d’assurance vie à investir plus fortement dans des actifs non cotés, et de permettre également qu’une plus grande quantité d’actifs soient cotés, par exemple en multipliant les bourses, notamment en autorisant la création de bourses privées.
Cependant, ce qui fait du contrat de retraite par capitalisation un contrat d’assurance et non un contrat d’épargne, c’est le point suivant : lorsque le client meurt, ses héritiers n’ont droit à rien, c’est-à-dire que la Société d’assurance vie qui gère le contrat garde tout. En contrepartie, et afin que le contrat ne génère en moyenne ni gain ni perte pour l’assureur ni pour le client, la valeur du contrat, que l’on appelle dans le jargon de l’assurance la Provision Mathématique, est divisée en fin d’année par la probabilité que le client soit encore en vie à ce moment-là sachant qu’il était vivant un an plus tôt, outre que la valeur du contrat est également revalorisée par les intérêts des placements acquis dans l’année.
L’appellation « provision mathématique » donnée à la valeur du contrat évoque le fait qu’il s’agit pour l’assureur d’une dette dont le montant et la durée ne sont pas connus, mais dont est connue une moyenne probable.
Le quotient se justifie par la raison suivante : un actif financier qui vaut A lorsqu’un événement de probabilité P survient et qui vaut zéro si l’événement ne survient pas vaut en moyenne A*P. Le contrat conserve sa valeur moyenne en passant d’une année sur l’autre, si bien que l’on obtient, en identifiant l’ancienne valeur moyenne et la nouvelle valeur moyenne, (Ancienne Valeur) = (Nouvelle Valeur) * P, soit encore Nouvelle Valeur = Ancienne valeur / P. Cette probabilité P (d’être encore en vie sachant qu’on l’était un an plus tôt) est établie à partir de tables de mortalités décrites dans le contrat, et qui ne changent plus une fois que le contrat est souscrit, à moins qu’il n’ait été prévu dès le départ que ces tables seraient réévaluées. Ces tables de mortalité indiquent la probabilité qu’a une personne de mourir dans l’année. Elles sont établies notamment en fonction de l’âge, du sexe et de la profession. La loi française, qui ne fait guère confiance aux parties contractantes, exige que ces tables de mortalité aient en outre été certifiées par des certificateurs eux-mêmes contrôlés par l’État. Elle va même encore beaucoup plus loin en confiant à des statisticiens du gouvernement la mission d’établir également des tables de mortalité (utilisant comme seule variable l’âge des personnes, et établies à partir des seuls âges de décès des femmes, supposées vivre plus longtemps que les hommes) et en exigeant que les tables de mortalité utilisées dans le contrat prévoient une mortalité toujours plus faible que celle des tables officielles, c’est-à-dire que la durée de vie des clients prédite par les tables utilisées par les assureurs doit toujours être plus élevée que celle prédite par les tables publiées par le gouvernement. Officiellement, cette disposition a pour but d’apporter de la sécurité aux assureurs. En réalité, il s’agit plutôt de permettre aux assureurs de gagner de l’argent sur le dos de ceux de leurs clients qui ont une durée de vie inférieure à la moyenne, comme les ouvriers, lesquels n’ont dès lors guère intérêt à souscrire ce genre de contrats. Si les assureurs étaient libres de leurs tarifs, ils pourraient proposer des contrats aux ouvriers qui soient favorables à ces derniers.
Le client peut déposer autant qu’il veut quand il le veut sur son contrat, à moins qu’il n’y ait des limitations contractuelles. Il peut également retirer chaque année une partie de ses avoirs, mais ses retraits sont plafonnés. L’usage, ainsi que la loi, limitent les retraits à un montant tel que si l’on retire toujours le maximum on obtient une rente viagère. Cette limitation est justifiée par le fait que si une personne est gravement malade et proche de la mort, elle aurait intérêt à retirer immédiatement tout ses avoirs (lesquels sont destinés à être rapidement perdus pour sa famille du fait de la limitation des retraits). Mais alors elle utiliserait une information nouvelle et imprévue qui la ferait s’enrichir et qui ferait s’appauvrir l’assureur, ce qui mettrait en péril le régime. Remarquons au passage que la loi qui crée cette limitation fait partie des innombrables lois inutiles et infantilisantes de la législation française : un assureur est tout à fait capable de se rendre compte par lui-même de son intérêt sans qu’il faille qu’une loi le lui dise. Signalons de même qu’une autre loi prévoit une exception à cette règle si la provision mathématique est très faible : dans ce cas, c’est l’assureur lui-même qui prend l’initiative de rembourser au client la provision mathématique afin de se débarrasser d’un aussi piètre client.
Il y a plusieurs façons de concevoir une rente viagère : on peut prévoir notamment soit un montant annuel (souvent nommé arrérage de la rente) qui reste constant d’une année sur l’autre, soit un montant qui croît chaque année au même rythme que les placements, ce qui permet de compenser les effets de l’inflation. Les contrats de retraite par capitalisation diffusés ordinairement prévoient un fonctionnement selon une solution intermédiaire entre les deux ci-dessus. La solution d’un montant qui croît chaque année au même rythme que les placements offre la formule la plus simple : le montant annuel de la rente est alors égal au quotient de la provision mathématique du contrat par le nombre moyen d’années que l’assuré a (en moyenne) encore à vivre, calculé d’après les tables de mortalité évoquées ci-dessus.
Les contrats de retraite par capitalisation sont extrêmement peu connus du grand public, notamment du fait que les assureurs n’ont jamais beaucoup fait de pédagogie dessus. En outre, il est d’usage dans le milieu de l’assurance de rendre les contrats aussi peu intelligibles que possible, les assureurs craignant d’effrayer leurs clients si ceux-ci découvrent l’ampleur des frais que renferment les contrats. Cet usage ancien est cependant en voie de disparition.
Les régimes de retraite par capitalisations existent en France depuis le milieu du XIXe siècle. Ils sont apparus sitôt qu’ont été collectées les premières statistiques de décès et qu’ont été établies les premières tables de mortalité. Ils ont eu beaucoup de succès jusqu’au début de la Première Guerre mondiale. Ils avaient deux inconvénients, qu’ils partageaient avec les contrats d’épargne. D’une part, ils conduisaient des organismes (les Sociétés d’assurance vie et de capitalisation) à gérer d’énormes fonds, ce qui attirait les personnes peu scrupuleuses. D’autre part, et c’est ce qui a tué le système à partir de la Première Guerre mondiale, ils servaient des prestations qui se dévalorisaient du fait de l’inflation. L’inflation est en effet apparue pendant la Première Guerre mondiale ; elle était provoquée par le gouvernement qui l’utilisait pour financer la guerre. La politique inflationniste du gouvernement n’a pu cesser que pendant les années 1980. Depuis lors, il n’y a heureusement plus de problème. La retraite par capitalisation a définitivement cessé d’être à l’honneur lorsque le maréchal Pétain a créé en 1941 la retraite par répartition obligatoire (et en a profité pour confisquer d’énormes fonds gérés par des sociétés d’assurance vie).
Depuis cette époque, la retraite obligatoire par répartition, organisée de façon très autoritaire, avec des cotisations à dates et montants imposés, et avec un âge de cessation du travail et de début de perception de la rente également imposés, est devenue dans l’opinion publique la référence principale.
Le public, totalement désinformé, se fait de fausses idées.
Il y a par exemple beaucoup de gens qui pensent qu’il y a plus de solidarité dans la répartition que dans la capitalisation alors que c’est exactement pareil. En voici l’explication.
Il est clair tout d’abord que la technique de la répartition implique la solidarité. Maintenant, en ce qui concerne la capitalisation, il faut remarquer tout d’abord qu’il y a solidarité entre les personnes appartenant à une même génération, c’est-à-dire que ceux qui vivent longtemps profitent à la place de ceux qui décèdent tôt. En effet, les valeurs des contrats (nommés provisions mathématiques) des clients survivants augmentent de telle sorte que l’assureur ait toujours à gérer les mêmes sommes. Certes, il y a une petite différence, nommée « risque technique », en ce sens que le nombre de décès pris en comte pour augmenter les provisions mathématiques des contrats des clients survivants n’est pas le vrai nombre de personnes décédées, mais le nombre prévu grâce aux tables utilisées par l’assureur. Mais cette petite différence ne change rien au principe. Ensuite, il y a également fatalement dans les contrats de retraite par capitalisation une solidarité entre les générations. Cette propriété est d’ailleurs partagée avec les contrats d’épargne. Elle résulte du fait que dans toute civilisation ce sont toujours les personnes actives qui créent des richesses par leur travail, si bien que les retraités (et les autres inactifs) vivent forcément des richesses créées par les travailleurs du moment. Plus précisément, le rendement des contrats de retraite par capitalisation et des contrats d’épargne correspond au rendement des placements de ces contrats, lequel dépend du travail de personnes actives. Aucun placement ne rapporte le moindre fruit tout seul. Prenons pour plus de clarté un exemple. Ce que rapporte un champ, qui appartiendrait à des retraités, est clairement proportionnel au travail fourni par les ouvriers agricoles qui l’exploitent, et est même, pour une productivité donnée des ouvriers, proportionnel au nombre de ces ouvriers. Ainsi le rendement moyen des contrats de retraite par capitalisation dépend directement du nombre des personnes actives du pays (ou de l’aire géographique où se font les placements).
Il y a beaucoup de gens qui pensent que le système de la capitalisation est moins favorable aux pauvres que la répartition alors que c’est l’inverse. On peut remarquer tout d’abord que dans un régime de retraite par capitalisation, les droits acquis par chacun sont clairement proportionnels à sa cotisation, si bien que celui qui n’a pas cotisé n’a droit à rien. Mais, en fait, dans un régime de retraite par répartition, il en a toujours été de même, sauf lors du tout début de la mise en place de ces régimes. Dans un régime de retraite par répartition, celui qui ne cotise pas n’acquiert pas non plus de droit. On peut apercevoir par ailleurs que les régimes de retraite par répartition aboutissent à accroître les inégalités, car les pauvres cotisent pour les riches. En effet, les différentes caisses gérant les régimes de retraite par capitalisation sont organisées selon des règles de compensation qui font que tout fonctionne comme s’il y avait une caisse unique. Et, dans ce système, les pauvres cotisent pour les riches pour la simple raison que les pauvres vivent moins longtemps que les riches, et ce essentiellement parce qu’ils exercent des métiers plus éreintants. Les caisses versent les pensions comme si tout le monde avait exactement la même durée de vie. Elles ne disposent d’ailleurs d’aucune donnée pour agir autrement. Elles n’ont jamais eu la mission de faire des études statistiques ni d’utiliser des statistiques établies par d’autres. Ce n’est pas un hasard si les dirigeants socialistes d’autrefois, comme Jean Jaurès, qui se voulaient soucieux des pauvres, et qui vivaient avant la mise en place de la retraite par répartition obligatoire, s’en méfiaient fortement et soutenaient ardemment la retraite par capitalisation.
Quant à la question de la solidarité envers les personnes les plus pauvres, et notamment des personnes âgées les plus pauvres, il s’agit d’un problème qui n’a rien à voir avec les régimes de retraites, qu’ils soient par répartition ou par capitalisation. L’État peut, s’il le désire, mettre en place une allocation pour les pauvres, ou pour les vieux pauvres, sans que celle-ci ait un quelconque lien avec un régime de retraite.
Il y a enfin beaucoup de gens qui pensent que la capitalisation présente un risque (du fait de la fluctuation des cours boursiers) alors que les assureurs ont toujours disposé et largement usé de placements quasiment sans risque (dans l’immobilier et sous forme d’obligations). En outre, les placements que l’on croit ordinairement risqués (comme les indices boursiers) ne sont en réalité pas si risqués que cela. En effet, un contrat de retraite par capitalisation est souscrit pour du long terme (toujours pour une durée d’au moins vingt ans, et qui peut excéder quatre-vingts ans) : la durée va du moment de la souscription du contrat à la mort du client. Or, même si un indice boursier peut baisser d’une année sur l’autre, une baisse est toujours précédée et suivie de hausses, si bien que l’on n’a jamais vu un indice boursier baisser sur un intervalle de temps excédant dix ans. Rappelons encore que le choix d’un placement risqué se fait forcément à l’initiative du client. En l’absence d’intervention de sa part, les fonds sont gérés avec des placements sans risque.
La retraite par capitalisation souffre aujourd’hui d’un problème grave et peu connu : la complexité fiscale. L’impôt sur le revenu est conçu d’une manière extrêmement complexe, avec une multitude de niches fiscales. Ces niches fiscales ont pour effet d’inciter les contribuables à choisir (pour réduire leurs impôts) d’autres placements que ceux qu’ils auraient choisis spontanément. Or les contribuables investisseurs savent d’eux-mêmes quels sont les bons choix. Tout choix qui leur est imposé ou auquel on les incite est certainement moins bon. En particulier, en ce qui concerne les contrats de retraite par capitalisation, la fiscalité a été conçue de telle sorte que, précisément, plus un contrat laisse de liberté de choix au client, et plus il est taxé : la fiscalité a à dessein été conçue pour empêcher les gens de choisir les contrats dont ils ont besoin.
Plus précisément, le fisc français ne taxe pas les contrats de retraite par capitalisation comme les contrats d’épargne. Pour les contrats d’épargne, l’impôt sur le revenu est calculé et collecté annuellement à partir des intérêts. En revanche, pour les contrats de retraite par capitalisation (appelés contrats de rentes viagères à titre onéreux par l’administration fiscale), le législateur n’a jamais eu l’idée d’appliquer la même méthode, si bien que les intérêts ne sont ici calculés que lors des retraits et que l’impôt n’est dû qu’à ce moment-là. L’administration fiscale utilise à cette occasion une formule forfaitaire pour déterminer la partie des retraits qui est constituée d’intérêts, et qui est seule taxable, car l’impôt sur le revenu ne taxe que les intérêts et non le capital. Cette formule très simple et très simpliste est basée sur l’âge qu’a l’assuré lors de son premier retrait (même s’il s’agit d’un petit retrait et qui n’est suivi d’aucun autre pendant plusieurs années). Tous les autres retraits sont ensuite soumis au même taux que le premier. Il s’agit de 70% si le premier retrait a eu lieu avant les 50 ans de l’assuré, de 50 % pour un premier retrait effectué entre 50 et 59 ans, de 40 % pour un premier retrait effectué entre 60 et 69 ans et de 30 % pour un premier retrait effectué après 70 ans. L’utilisation d’une formule forfaitaire par le Fisc est rarement dans l’intérêt des contribuable. Celle-ci peut avoir pour effet de taxer le client nettement plus que s’il avait investi dans un contrat d’épargne. À côté de cela, le législateur a créé de nombreux régimes spéciaux, qui offrent beaucoup moins de liberté au client, mais qui sont, quant à eux, nettement moins taxés que des placements d’épargne.
Remarquons au passage que le législateur a prévu une fiscalité rationnelle en ce qui concerne l’Impôt de solidarité sur la fortune, qui est assis quant à lui sur la provision mathématique. Si le Fisc emploie une méthode rationnelle au sujet de l’assiette de l’ISF, pourquoi en est-il incapable quand il faut déterminer l’assiette de l’Impôt sur le revenu des personnes physiques ?
Une fiscalité rationnelle (c’est-à-dire similaire à celle qui frappe l’épargne) se conçoit de la façon suivante (non appliquée pour l’instant) :
Si l’on note PMF la provision mathématique en fin d’année, laquelle n’a pas encore été augmentée des intérêts de l’année ; si l’on note x le taux d’intérêt des placements (après le prélèvement des frais de gestion et avant le calcul de l’impôt) ; si l’on note P la probabilité que le client soit encore en vie sachant qu’il l’était un an plus tôt ; si l’on note PMD la provision mathématique au début de l’année suivante (avant impôt), alors, d’une part, on a PMD = PMF * (1+x) / P et, d’autre part, l’assiette de l’impôt sur le revenu devrait être de PMF * x / P, soit encore PMD * x / (1+x), cette dernière formulation étant exactement similaire à celle qui s’applique aux contrats d’épargne. Et, bien entendu, l’assiette de l’Impôt de solidarité sur la fortune doit être ce qui reste de la provision mathématique une fois payé l’impôt sur le revenu. On pourra remarquer que le taux de rendement des placements net des frais de gestion x peut être, les mauvaises années, négatif, auquel cas il n’y aura rien à payer au Fisc et rien à en recevoir non plus, la perte étant dès lors déductible de l’assiette de l’impôt sur le revenu de l’année suivante. Et, conformément à la logique exposée dans les calculs ci-dessus, il faut que le montant de la perte reportée l’année suivante soit lui-même revalorisé en étant divisé par la probabilité (calculée pour la nouvelle année) que le client soit en vie sachant qu’il l’était un an plus tôt. Remarquons enfin qu’il serait souhaitable, pour parfaire l’homogénéité de l’assiette de l’impôt sur le revenu, que celle-ci soit définie par la différence des valeurs des biens des contribuables entre la date du calcul de l’impôt et l’année précédente. En effet, le système fiscal en vigueur aujourd’hui est tel que la valeur utilisée par le Fisc pour certains biens (comme les parts de sociétés ou les actifs immobiliers) dans le calcul de l’assiette de l’impôt sur le revenu n’est réévaluée que lors des ventes, ce qui n’est pas très logique, et est en outre différent de la règle utilisée pour le calcul de l’assiette de l’Impôt de solidarité sur la fortune, qui est quant à elle basée sur une réévaluation annuelle.
Ce que doivent promouvoir les libéraux et réformateurs :
* Une promotion de la liberté contractuelle, et notamment de la liberté tarifaire, dans le domaine de l’assurance, comme ailleurs.
* Un accroissement de la liberté de placement des fonds gérés par les assureurs, notamment dans des actifs non cotés.
* La légalisation des bourses privées.
* Une réforme de l’impôt sur le revenu (avec la suppression de toutes les niches et spécificités fiscales, celles-ci conduisant les contribuables à faire de mauvais choix, surtout dans le domaine de la retraite par capitalisation, où aujourd’hui plus un contrat laisse de liberté plus il est lourdement taxé).
* L’abolition de tous les régimes de retraite obligatoires, ceux-ci n’apportant absolument rien d’autre que des contraintes inutiles par comparaison avec les régimes de retraite par capitalisation et à adhésion libre. Cette abolition devra avoir lieu rapidement, ou au moins avec un calendrier impératif. On pourra par exemple mettre en place un calendrier imposant pendant une trentaine ou une quarantaine d’années une baisse progressive, jusqu’à suppression totale, des cotisations et prestations obligatoires. Évidemment, pendant la période de transition, les gens devront payer plus, puisqu’ils payeront pendant leur vie active pour les retraites des retraités du moment, mais n’auront ainsi acquis que des droits nettement plus faibles que ceux qui auraient vraiment correspondu à leurs cotisations. Plus cette période sera longue et plus la transition sera douce. Mais, en même temps, plus cette période sera longue, et plus on repoussera la mise en place d’une vraie liberté. Il est souhaitable, afin que nul n’y perde beaucoup, que la durée de la transition excède la durée moyenne des retraites, et même, si possible, qu’elle excède le double.
Rappelons à ce sujet que les estimations effectuées par divers organismes s’accordent à dire que l’espérance de vie sera voisine de 90 ans au milieu du XXIe siècle. Il sera bien évidemment nécessaire, pendant la période de transition, d’accroître l’âge normal de départ à la retraite afin de rendre les cotisations supportables, après quoi on pourra enfin abolir la notion d’âge de départ à la retraite. On pourra aussi, pendant la période de transition, faire en sorte que les cotisations baisent plus vite que les prestations, en reportant ainsi une partie de la charge sur l’État, c’est-à-dire sur la collectivité nationale. Tout cela est évidemment parfaitement réalisable. D’ailleurs cela a été réalisé avec succès au Chili.
Parmi ces diverses réformes, la plus simple à mettre en œuvre et qui sera certainement celle qui aura le plus d’impact, est la réforme fiscale. En effet, la fiscalité joue un rôle énorme dans les choix des gens. Rendre la fiscalité neutre aura beaucoup d’effets.
Si la retraite par répartition est si appréciée du public français, c’est uniquement par inertie. Mais la capitalisation présente énormément d’avantages que doivent défendre les libéraux : une totale liberté de choix des dates et des montants des versements et une totale liberté du moment auquel on commence à percevoir la rente. En outre, la retraite par capitalisation est totalement indépendante de l’activité de la personne : on peut cotiser même si on ne travaille pas et on peut percevoir même si on travaille en même temps.
La retraite par capitalisation a la particularité de fonctionner toujours, pour peu que l’État intervienne le moins possible, les problèmes qui la frappent étant en règle générale le produit d’interventions publiques. La retraite par répartition a, quant à elle, besoin de fréquentes interventions de l’État, comme on ne cesse de l’observer. Cela fait la supériorité économique manifeste de la capitalisation sur la répartition.
Il faudra bien sûr faire beaucoup de pédagogie, en utilisant les arguments donnés ci-dessus.
PS :
Les articles qui abordent la question des retraites évoquent souvent
les notions de « régime à prestation définie » ou de "régime à
cotisation définie". Dans les deux cas, il s’agit de régimes qui
laissent peu de liberté au client et qui ne sont pas la vraie retraite
par capitalisation. Ces notions de « prestation définie » ou de « cotisation définie » s’entendent surtout pour des régimes de retraite
de salariés créés par l’employeur et financés en partie par l’employeur
sous forme d’avantage en nature moins imposé que les salaires. À cette
occasion également, il faut réclamer une réforme fiscale pour que les
avantages en nature soient imposés exactement comme les salaires.
On pourra remarquer toutefois qu’il existe une forme de retraite par répartition qui ressemble à la retraite par capitalisation : il s’agit de la retraite par répartition à cotisations définies, telle celle qui est gérée par l’AGIRC. Elle présente beaucoup de points communs avec la retraite par capitalisation, notamment de ne pas pouvoir faire faillite, et de permettre à chacun de choisir lui-même son âge de départ à la retraite, ce qui ne l’empêche pas d’avoir pour inconvénient de ne pas dissocier période d’activité et période de cotisation. Elle présente un défaut majeur, à savoir qu’il s’agit d’une forme d’économie administrée, avec tous les défauts des économies administrées : il s’agit d’un monopole à clients captifs habilité même à saisir les biens de ses clients récalcitrants. Un tel monopole coûte forcément cher et produit forcément une prestation de mauvaise qualité. Mais, comme il s’agit de la forme la moins mauvaise de retraite par capitalisation, il est possible et souhaitable de transformer très rapidement les régimes de retraite par répartition en un tel régime à cotisations définies, qui serait le seul régime de retraite par répartition existant durant la période de transition vers une situation de pure capitalisation.
PS bis : Lorsque l’on parle de « fonds de pension », on fait allusion à des systèmes de retraite par capitalisation très particuliers, qui se sont surtout développés aux États-Unis, qui sont réservés aux seuls salariés, et non accessibles à l’humanité tout entière - ce que sont les contrats de retraite par capitalisation dans le régime général -, qui n’offrent pas une totale liberté, ne serait-ce que parce qu’ils sont soumis à des plafonds, et qui fonctionnent grâce à une spécificité fiscale (qui constitue encore une fiscalité un peu avantageuse par rapport au droit commun) : les cotisations sont déductibles du revenu imposable, et les intérêts générés par le contrat ne sont pas non plus taxés annuellement, en contrepartie de quoi la rente finalement perçue par le client est entièrement considérée par le Fisc comme un revenu. Ce système est avantageux fiscalement car ce qui échappe à la taxation annuelle produit des intérêts capitalisés. Cependant, il faut bien voir que le principe de déductibilité des cotisations induit une très forte limitation de la liberté des clients. En effet, les clients qui ont recours aux contrats de retraite par capitalisation du régime général, qui permettent des versements libres, se contentent le plus souvent d’effectuer un unique versement au moment de leur départ à la retraite, en utilisant le produit de l’accumulation d’une épargne constituée essentiellement dans ce but. Ce versement unique est bien évidemment un très gros versement, très supérieur à leur revenu imposable de l’année où il est effectué. Cela n’aurait donc aucun sens pour eux que ce versement soit déductible : seule une petite partie de ce versement serait admise par le Fisc comme déductible. En outre, il se trouve que la loi, lorsqu’elle permet la déductibilité, de versements sur un contrat de retraite, prévoit toujours que le maximum déductible des versements est limité à une faible partie du revenu imposable. La fiscalité des fonds de pension n’est donc acceptable que pour un client qui veut effectuer des versements réguliers et de montant assez faible ; tout versement important, même exceptionnel, est impossible. Il s’agit bien ici d’une énorme réduction de la liberté par rapport au régime général. Il existe en droit français depuis une vingtaine d’années deux régimes qui correspondent à cette définition des fonds de pension : un organisme, nommé la "PRÉFON", habilité à recevoir des cotisations plus ou moins libres de la part de fonctionnaires, et un régime destiné aux salariés des entreprises privées. Ce dernier régime est conçu de telle sorte que ce sont les employeurs qui décident souverainement de ce que leurs salariés doivent cotiser, sans que ces salariés ne puissent rien y ajouter ni rien en enlever. Comme forme de liberté, on a vu mieux. L’avantage pour les salariés - parce qu’il y en a un - est que l’employeur peut y faire un "abondement", lequel fait l’objet de moindres prélèvements obligatoires que s’il versait la somme officiellement sous le qualificatif de "salaire". On pourra noter cependant que depuis peu de temps un contrat destiné pour la première fois au grand public a été institué : il est nommé "Plan d’épargne pour la retraite populaire", mais il est lui aussi soumis à de nombreuses limitations.
D’une manière générale, l’expression "fonds de pension" désigne simplement un cadre fiscal qui offre un faible avantage par rapport au régime général de la retraite par capitalisation en échange de fortes réductions de la liberté. Il convient donc de rejeter ces "fonds de pension" et de réclamer avec force une réforme du régime général de la retraite par capitalisation.
Remarquons également que ce système est loin d’être celui qui offre le plus d’avantages fiscaux. Il existe en effet encore aujourd’hui un régime de retraite par capitalisation exonéré d’impôts : il s’agit du "Plan d’épargne en actions", qui est une sorte de contrat d’épargne que le client a le droit d’échanger au bout de huit ans contre une rente viagère exonérée d’impôt. Ce contrat est bien évidemment soumis lui aussi à tout un tas de restrictions.
Tout cela (tous ces types de régimes fiscaux et de restrictions) est bien puéril. Osons enfin réformer le régime général des contrats de retraite par capitalisation afin d’offrir enfin la liberté aux citoyens, sans qu’ils soient obligés de naviguer à l’aveuglette entre les nombreuses et complexes réglementations et sans que l’État ne les incite (par ses mesures fiscales ou réglementaires) à faire d’autres choix que ceux qu’ils auraient faits spontanément. En effet, chaque citoyen sait de quelle protection d’assurance il a besoin. Le gouvernement ne peut pas le savoir mieux que les citoyens. La gloire reviendra à un gouvernement qui osera entreprendre une réforme, avec une volonté ferme, en s’inspirant de la célèbre formule du cardinal de Richelieu : "la politique est l’art de rendre possible ce qui est nécessaire" plutôt que de se contenter de dire comme le faisait le président Pompidou à ses fonctionnaires : "arrêtez d’emmerder les Français" sans rien faire pour entreprendre les réformes.
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