• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Christian Aubry

sur Presse : Internet sauveur du papier, la première marche d'une spirale fatale


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Christian Aubry Christian Aubry 27 août 2009 15:40

Je trouve que cet article prospectif manque singulièrement d’imagination. Une fois épuisé le recours à la publicité pour vivre, les « médias trad » n’auraient donc d’autre choix que de vivre au crochets de l’État. Ce qui me rassure, c’est que vous reconnaissez vous-même la fragilité et la maladresse de vos « pistes de solution » et que vous posez les prémisses du problème de la bonne façon : ce ne sont pas les coûts qu’il faut réduire, il faut au contraire augmenter les recettes.

Et comment augmenter les recettes sur Internet ? Simple : en vendant, plus chers, des produits à valeur ajoutée. Et de quels produits à valeur ajoutée les entreprise de presse disposent-elles ? Leurs archives ? Oui, certainement, mais ce n’est pas rare, pas très utile, donc pas suffisant. La réponse est, selon moi, évidente et je le répète depuis plus 10 ans : LES SOURCES, nom de Dieu !!!

Considérez l’information dans son ensemble comme un océan et chaque sujet comme un iceberg qui y fond tranquillement et, ainsi, l’alimente. Ce qui dépasse au-dessus de la surface, c’est le « papier », l’article. C’est beau et c’est impressionnant. Mais ce qui nourrit l’océan, ce n’est pas simplement la partie émergée de l’iceberg, c’est aussi et surtout sa partie immergée, beaucoup plus importante. Au niveau de l’information, cela s’appelle LES SOURCES.

Pour des raisons de contraintes spatiales et temporelles, puis par habitude ou par nécessité de conserver jalousement le feu qui alimente leur pouvoir magique, les journalistes des siècles passés ne publiaient pas leurs sources, même lorsqu’aucun enjeu de sécurité ou de confidentialité n’est en cause. Or, au XXIe siècle, ce comportement propriétaire n’a plus lieu d’être. Les sources viennent du peuple, qu’elles y retournent puisque ni l’espace disque ni le « temps d’antenne », désormais, ne sont limités.

  • Enregistrez donc en audio, vidéo ou pdf autant de sources INTÉGRALES que possible.
  • Puis validez-les, décrivez-les, « taxonomisez-les » et classifiez-les.
  • Enfin, entrez-les dans un système informatique qui me permette à moi — utilisateur final, journaliste, chercheur, étudiant, cadre d’entreprise, fonctionnaire, peu importe — de la retrouver quand j’en aurai besoin.
  • En complément de votre article, disponible gratuitement en ligne et maigrement financé par la publicité, vendez-moi UN ABONNEMENT DE LUXE, au moins aussi cher qu’un abonnement papier, qui me permette, SI ET QUAND CELA M’INTÉRESSE, de visiter la partie immergée de l’iceberg — toutes ces sources que vous avez trouvées pour construire votre article et traiter le sujet.
  • Si je ne veux pas m’abonner, offrez-moi la possibilité de consulter vos sources EN FORMULE DE MICRO-PAIEMENT.
  • Si je veux RÉUTILISER VOS SOURCES, ou une partie de vos sources (audio, vidéo, PDF), VENDEZ-MOI LE DROIT DE LE FAIRE et livrez les moi en haute définition afin que je puisse en inclure un extrait dans mon propre topo audio ou vidéo.
  • Devenez ni plus ni moins qu’une AGENCE DE PRESSE LOCALE (ou internationale, si vous en avez la portée et les moyens) et comprenez que les citoyens et les entreprises de demain deviennent peu à peu des producteurs de contenus d’information, mais que s’ils sont capables de faire flotter de beaux icebergs à la surface de l’eau, ILS ONT BESOIN DE SOURCES VALIDES POUR LES NOURRIR SOUS LA SURFACE.
Ce faisant, vous ferez œuvre sociale, vous augmenterez la valeur de l’information commerciale et citoyenne et vous aurez des recettes suffisantes pour payer correctement (1) vos journalistes d’enquête et de terrain (2) vos secrétaires de rédaction traitant non seulement l’info interne, mais également celle provenant des citoyens et des entreprises et (3) vos programmeurs-intégrateurs qui feront fonctionner et amélioreront sans cesse les systèmes d’information complexes nécessaires à l’exploitation de vos sources.

Libérez le cœur même de l’information. Ouvrez vos sources. Ne les gardez plus jalousement dans vos coffres-forts propriétaires. Permettez qu’elles circulent librement à la manière du code des logiciels libres et ouverts. Entrez dans l’ère de l’information « open sources » et n’hésitez pas à les tarifer, si nécessaire, afin de survivre et prospérer. La démocratie a un prix que les citoyens seront prêts à payer si vous savez le leur vendre intelligemment.


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès